Géronimo (Geronimo : an American legend) – de Walter Hill – 1993
Walter Hill est un grand cinéaste classique. Sa filmographie n’est sans doute pas irréprochable, mais je suis assez persuadé que la postérité le mettra à la place qu’il mérite. Il n’y a plus qu’à espérer que ce soit de son vivant. Film après film, le talent du cinéaste est en tout cas de plus en plus flagrant. Même dans des films à moitié réussis seulement, il y a un sens de l’image et du rythme, une manière de filmer l’action et la tension, et un classicisme particulièrement séduisants.
C’est le cas de ce Geronimo, ambitieuse fresque westernienne sortie dans une indifférence à peu près générale, et complètement oubliée dans la foulée. Un film que j’aurais sans doute laisser sommeiller longtemps sur une étagère sans la découverte de Ry Cooder, immense guitariste qui en signe la musique hypnotisante (découverte due à l’excellente émission d’Inter Very Good Trip).
C’est une belle réussite pourtant. Imparfaite, certes, ne serait-ce que parce que Hill doit faire avec un écueil de poids : Jason Patric, acteur balourd, sans charisme ni talent, à qui on confie le rôle central de l’histoire. Hill en est d’ailleurs visiblement conscient : même si Patric figure bien à la première place au générique, son personnage semble avoir été effacé autant que possible, ses apparitions se limitant au strict minimum pour assurer le déroulement du scénario.
Pour le reste, que du bon ou presque. Un excellent casting d’abord (en dépit du sus-mentionné, donc) : Gene Hackman et Robert Duvall qui en font juste un tout petit peu trop pour ne pas être agaçants, Matt Damon tout jeune et impeccable, et surtout Wes Studi, impressionnant de rage et de sagesse dans le rôle de Geronimo.
Moins ouvertement manichéen que Danse Avec Les Loups, le film se place tout de même très clairement du côté des Indiens, dont les exactions ne sont pas édulcorées. « Vous avez tué des femmes et des enfants », lance le général Gene Hackman à Geronimo. « Vous aussi », lui répond-il. C’est simple et direct, et ça a un impact fou. A l’image du cinéma de Hill en quelque sorte.
On est du côté de la grande Histoire (avec un grand H), que Walter Hill dépoussière comme il le fera aussi avec Wild Bill. On est surtout du côté du grand cinéma classique. Ce n’est pas un hasard si le film a été tourné à Monument Valley. Comme Ford, dont il a sans doute beaucoup aimé Les Cheyennes, Hill place l’homme dans son élément, avec de grands et larges plans somptueux. Pour mieux souligner la douleur et la cruauté de l’exil, thème central comme dans le chef d’oeuvre de Ford.
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