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Le Sergent noir (Sergeant Rutledge) – de John Ford – 1960

Classé dans : 1960-1969,FORD John,WESTERNS — 27 septembre, 2018 @ 8:00

Le Sergent noir

John ne s’est jamais vraiment engagé politiquement. Mais s’il y a un mot qui caractérise sa vision du cinéma, et de la vie telle qu’elle transparaît dans ses films, c’est l’humanisme. Ses films sont toujours du côté de l’humain. Cela va parfois avec un regard conservateur charmant mais border-line : dans ses comédies champêtres avec Will Rogers par exemple, le noir de service était le bon nègre tel qu’on le voyait dans cette Amérique d’un autre temps.

Avec Sergeant Rutledge, Ford se montre tel qu’il est : un grand pourfendeur des injustices. Il le sera encore avec le magistral Les Cheyennes, où il effacera tous les mauvais traitements qu’il a réservé aux Indiens au cours de ses précédents films. Ici, la notion de justice est même centrale puisque, comme dans Vers sa destinée, l’action se déroule au cours d’un procès.

C’est même ici toute l’action qui est racontée par les témoins de ce procès, dans des flash-backs joliment introduits par d’audacieux jeux de lumière. Visuellement plus modeste que The Searchers par exemple, le film confirme pourtant l’extraordinaire sens de l’image de Ford, qui compose de splendides images, à la fois dans Monument Valley et dans des décors de studios.

La scène nocturne du bivouac, avec Woody Strode se dressant dans la nuit, est magnifique. Comme la première apparition de l’acteur d’ailleurs, habituel second rôle de Ford à qui le cinéaste offre un très beau rôle de soldat noir (le seul personnage à donner son nom à un film de Ford, en VO, de toute sa carrière). Tout un symbole : un ancien esclave fier de faire partie de l’armée américaine, tout en n’étant dupe de rien.

« On est fou de se battre pour les blancs », lui lance un autre soldat noir mortellement blessé. « On se bat pour notre fierté », lui répond-il.

Et pour l’avenir, aussi. Si l’action se déroule en 1881, le film se projette ouvertement sur l’Amérique du 20e siècle. Lorsque Woody Strode évoque son émancipation, il reconnaît qu’il n’est pas libre… peut-être le sera-t-il un jour. Et quand son défenseur Jeffrey Hunter tente de défendre l’Ouest aux yeux de la belle Constance Towers (toujours formidable, même si son rôle est moins intéressant que dans The Horse Soldiers), il clame : « C’est un beau pays… Peut-être pas maintenant, mais il le sera un jour. »

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