Les Misérables – de Jean-Paul Le Chanois – 1958
A revoir cette version, je peux confirmer ce que je pensais déjà : Raymond Bernard a sans doute réalisé la meilleure adaptation des Misérables. Vingt-cinq ans plus tard, Jean-Paul Le Chanois a les moyens de ses ambitions, un casting époustouflant, une histoire évidemment hors du commun. Et s’il ne lui manquait que le talent ?
Il n’a en tout cas pas celui de donner du souffle à ce film qui, plus il devrait être spectaculaire, plus il devient terne. S’il fallait un film pour démontrer que de grands moyens ne suffisent pas pour une reconstitution historique réussie, celui-ci serait parfait.
Dans les quelques séquences nécessitant de nombreux figurants, le problème est particulièrement flagrant. Les funérailles de Lamarque ou la bataille de Waterloo semblent n’exister que comme des tableaux immobiles auxquels Le Chanois est incapable de donner de la vie. Même les barricades de Paris, pourtant théâtres d’une véritable tragédie, semblent trop propres, trop lisses.
Il y a quand même du bon : dans les moments plus intimes, Le Chanois est nettement plus à l’aise. La mort d’Eponine, notamment, est joliment cadrée et très émouvante. Et la photographie de Jacques Natteau, si elle manque de cohérence, réserve quelques très beaux moments picturaux. Dans les séquences les plus intimes, toujours.
Et puis, heureusement, il y a le casting. Bourvil en Thénardier, ça a quand même de la gueule. Bernard Blier en Javert, c’est carrément enthousiasmant, tant il est touchant dans son jusqu’au-boutisme aveugle et ravageur. Et Jean Gabin en Jean Valjean ? Eh bien c’est une évidence, et la meilleure raison pour lequel le film, même s’il agace et déçoit, réussit à séduire malgré tout.
Il est non seulement formidable dans le rôle, mais il fait partie de ces acteurs qui savent donner du liant et de la consistance à un film, dès qu’il est à l’écran. Ils ne sont pas si nombreux dans ce cas, à pouvoir sauver n’importe quoi : il y a John Wayne, et une poignée d’autres. Lui rend évidente toute la complexité, toute la force et toute la fragilité de Jean Valjean. Rien que pour lui…
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