The Immigrant (id.) – de James Gray – 2013
Un film peut-il être une grande fresque historique passionnante, un mélodrame tragique et sublime, une petite déception ? Je sais, la question est idiote, et la réponse semble évidente. Pourtant, je ne peux m’empêcher d’éprouver une pointe de déception que je n’arrive pas à m’expliquer. The Immigrant est magnifique, puissant et bouleversant. C’est un film parfaitement maîtrisé, aux images incroyables et aux personnages forts et originaux. C’est un fait. Mais pourquoi diable ne m’a-t-il pas habité comme l’avait fait Little Odessa, ou La Nuit nous appartient ?
La déception tient sans doute à l’immensité de l’attente autour de ce film : James Gray, grand cinéaste de la violence urbaine et contemporaine de New York, qui plonge quasi au cœur des origines de cette violence, dans le New York cosmopolite des années 1920, avec ces immigrés qui arrivent d’une Europe exsangue pour se heurter à la loi impitoyable d’Ellis Island et des marchands de sommeil. Forcément, les promesses étaient énormes, et elles sont tenues, nul doute.
Visuellement, c’est somptueux, à la hauteur des grandes références du genre (Le Parrain 2, ou Il était une fois en Amérique). Narrativement, c’est admirablement tenu. Et James Gray nous livre l’une de ces grandes tragédies dont il a le secret, avec pour une fois une pointe d’optimisme inattendue, teintée d’un cynisme et d’une cruauté immenses. Quant aux acteurs, ils sont prodigieux : Jeremy Renner, tellement bien quand il sort de ses grosses machines hollywoodiennes sans âme ; Joaquin Phoenix, qui en fait un peu trop juste comme il faut ; et surtout Marion Cotillard, exceptionnelle.
La plus grande actrice hollywoodienne de ces dix dernières années, c’est bien elle. Je l’affirme depuis Lisa en 2000 (quelqu’un se souvient de ce film?) : Marion Cotillard est la digne héritière des grandes actrices de l’âge d’or, et sa prestation dans The Immigrant le prouve une nouvelle fois. Avec ce pur personnage de tragédie, soumise aux pires drames intimes et historiques, elle s’inscrit dans une longue tradition, celle de la Vivien Leigh de Waterloo Bridge par exemple. D’une justesse totale, belle et bouleversante, elle est d’une sobriété remarquable.
Bah alors, c’est un chef d’œuvre, non ? Ben ça y ressemble fort, c’est vrai. Mais allez savoir pourquoi, l’émotion, immense durant le film, s’est évaporée dès le générique. Disons que ça doit venir de moi… Je le revois et je vous en reparle.
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