Alliés (Allied) – de Robert Zemeckis – 2016
Zemeckis nous fait le coup du grand cinéma classique romanesque, avec un modèle évident et proclamé : Casablanca, dont il reprend le décor (le Casablanca de 1942, pour la première partie du film), et même le « Play it » insistant devant un piano… Mais le réalisateur de Retour vers le Futur a-t-il la carrure de Michael Curtiz ? Pas sûr, quand même.
Dès le tout premier plan, absolument virtuose mais (très visiblement) entièrement numérique, le problème principal du film apparaît, avant même les acteurs, problème qui se confirmera scène après scène : Zemeckis soigne le moindre de ses plans avec une application et une volonté de se mettre en danger qui forcent le respect, mais avec une virtuosité trop évidente, trop systématique, et trop dominante.
Cette virtuosité, qui vaut quelques moments de plaisirs, semble le plus souvent trop appliqué. Zemeckis, qui a visiblement envie d’imprimer ce genre très hollywoodien de son emprunte, oublie la passion en route. Et si on suit l’intrigue sans le moindre ennuie, et avec un intérêt qui ne retombe (presque) jamais, l’émotion ne passe pas vraiment, et on reste constamment à distance de ce mélodrame pourtant costaud.
On le sent sincère et passionné par les classiques d’autrefois, mais Zemeckis reste du côté du pastiche. Son film sonne comme un hommage sincère et appliqué à Casablanca donc, mais aussi à l’univers de Graham Greene (dont Brad Pitt lit d’ailleurs le Brighton Rocks), notamment au très beau La Fin d’une liaison, dont Neil Jordan avait tiré un film autrement plus poignant.
Brad Pitt lui-même semble étrangement statique et étranger à l’action, comme engoncé dans un personnage qu’il ne fait jamais vraiment vivre (pas aidé, c’est vrai, par un accent amerloque lorsqu’il est censé parler couramment français). Mais il y a Marion Cotillard, lumineuse et intense, comme toujours parfaitement juste. Elle est pour beaucoup dans le plaisir sincère qui réussit à poindre au milieu de la déception.
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