Les Flics ne dorment pas la nuit (The New Centurions) – de Richard Fleischer – 1972
Cinéaste mésestimé, Fleischer a pourtant beaucoup apporté aux divers genres auxquels il s’est confronté, et tout particulièrement au noir, dont il a été l’un des grands noms dès les années 40, en lui apportant une approche très réaliste, mêlée à une vision presque romantique du genre. Cette logique trouve une sorte d’aboutissement avec The New Centurions, l’un des plus beaux films consacrés à la police américaine.
Sorti à la même époque que French Connection ou Serpico, le film de Fleischer va beaucoup plus loin dans cette vision réaliste du quotidien de la police, avec des choix nettement plus radicaux à leur manière. Pas de grande enquête au long cours ici, ni de flics pourris qui gangrènent l’institution. Non, Fleischer s’intéresse d’abord aux hommes, à ces policiers en uniforme qui roulent toute la nuit pour aller à la rencontre de cette étrange faune humaine, dans les quartiers défavorisés de Los Angeles.
Des types bien, une société malade, une succession de petits moments tantôt légers, tantôt tragiques, tantôt violents. Des drogués, des tueurs, des mères irresponsables, des solitudes, des désespoirs… Et au milieu, ces hommes en bleu qui veulent faire au mieux, pour aider ce public qui ne les aime pas forcément. Fleischer filme cette société avec une acuité sidérante, grâce à laquelle le film semble aujourd’hui encore d’une incroyable actualité. Et il filme ces flics avec une empathie évidente, et une nostalgie inattendue.
Dans le rôle principal, Stacy Keach est excellent, jeune recrue idéaliste qui devient accro à la rue et à ses malades. Mais le film est aussi habité par la présence de George C. Scott, magnifique en vieux briscard qui se berce d’illusions sur sa retraite toute proche. Un homme bien, qui fait la différence entre la loi et le bien, et qui comprendra trop tard qu’il a tout sacrifié à cette vie de dévouement.
Un tel chant d’amour à la police pourrait être douteux. Il est superbe. Au sommet de son art, Fleischer s’offre quelques fulgurances de mise en scène (la poursuite dans ce tunnel qui n’en finit plus de réduire l’écran), mais privilégie les personnages (les seconds rôles sont tous formidables, parmi lesquels Erik Estrada, le futur Ponch de la série télé ChiPS). Du puR Fleischer, donc. Et du grand Fleischer.
* Le film fait partie du formidable coffret que Carlotta a consacré à Fleischer, avec deux autres évocations du Mal, dans des genres très différents : Terreur aveugle et L’Etrangleur de Rillington Place. Trois films tournés à la même époque (entre 1971 et 1972), trois facettes du talent de Fleischer, trois grands films. Et des bonus passionnants.
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