Du plomb pour l’inspecteur (Pushover) – de Richard Quine – 1954
Fred McMurray, enquêteur qui tombe amoureux de la femme qu’il ne faut pas… Le rôle rappelle furieusement celui qu’il tenait dans Assurance sur la mort, tout juste dix ans plus tôt. Il a d’ailleurs le même regard, cette obsession dont on sait qu’elle le conduit vers une issue qui lui sera fatale. Pourtant, le ton est assez radicalement différent. Dix ans après, McMurray s’est un peu empâté, et paraît plus fatigué. Cet aspect physique change tout : car on sent ce flic là au bout du rouleau, comme s’il n’attendait rien d’autre que d’être délivré du fardeau qu’il porte.
Cette impression donne au film une atmosphère atypique. D’ailleurs, si Richard Quine joue bel et bien avec les règles du film noir, c’est pour mieux les détourner. Comme dans cette première rencontre avec Kim Novak, dans un bar. Les deux personnages n’ont pas grand-chose à se dire, mais derrière leurs silences et leur apparente nonchalance, on sent immédiatement la tension sexuelle.
Et puis Kim Novak n’est pas à proprement parler une femme fatale. Loin, en tout cas, de la Barbara Stanwyck du film de Wilder. Fatale, elle le sera, bien sûr, mais à cause de l’obsession qu’elle fait naître malgré elle chez McMurray. Et entre eux, c’est un pur amour qui naît, du genre qui rachète tout et donne un sens à la vie. Au coeur de cette tragédie en marche, cet amour crée ainsi des petits cocons d’intimité assez magnifiques.
Beaux aussi : les sentiments de « l’autre » flic, qui tombe amoureux d’une femme en l’observant à travers ses jumelles, lors de ses interminables nuits de planques. Pour lui, plus jeune et plus pur, on sent qu’il y a encore un avenir. Une sorte de double de McMurray qui n’aurait pas encore laissé passer sa chance…
* DVD chez Sidonis/Calysta, avec des présentations passionnées par Bertrand Tavernier et François Guérif.
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