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Archive pour octobre, 2016

Je ne regrette rien de ma jeunesse (Waga seishun ni kuinashi) – d’Akira Kurosawa – 1946

Posté : 11 octobre, 2016 @ 8:00 dans 1940-1949, KUROSAWA Akira | Pas de commentaires »

Je ne regrette rien de ma jeunesse

Ce n’est pas encore tout à fait le Kurosawa des grands classiques, mais ce film de jeunesse est déjà l’œuvre d’un grand cinéaste. Un cinéaste d’une sensibilité extrême, aussi attentif aux destins de ses personnages qu’aux soubresauts de l’histoire : son film est l’un des premiers tournés après la défaite de 1945 de son pays, et l’histoire se déroule durant la période la plus tourmentée de l’époque récente, de 1933 à cette défaite qui signifie la liberté retrouvée.

Je ne regrette rien de ma jeunesse… Le titre est martelé comme un mantras, alors que le destin de cette jeune femme bousculée par les affres de l’histoire raconte, au contraire, toute la difficulté de se défaire de cette jeunesse si belle, et si encombrante.

La scène inaugurale, bucolique et lyrique, se termine de la manière la plus brutale qui soit, par l’irruption d’un cadavre sanglant dans un paysage idyllique où ne régnait que la joie. C’est la réalité de l’époque qui, subitement, arrache la jeune Yukie à l’insouciance de sa jeunesse.

Il lui faudra du temps pour faire son choix entre un avenir « calme et un peu ennuyeux » avec l’un de ses prétendants, ou une vie plus incertaine et aventureuse, plus intense et engagée aussi, avec celui qu’elle aime vraiment, mais vers qui elle ne se résout pas à se tourner…

Ce destin est rude, et c’est le cœur serré que l’on vit avec elle les malheurs de Yukie (magnifique Setsuko Hara). Mais ce n’est pas un mélo que filme Kurosawa, qui jamais ne s’apitoie sur ce sort et sur ce qui aurait pu advenir sans l’instauration de ce régime militaire, et sans la survenue de la guerre. Au contraire, c’est une naissance à la vie qu’il raconte, celle d’une jeune femme qui prend en main son propre destin, et celui de son pays. Un film plein d’espoir, paradoxalement…

Le Tueur s’est évadé (The Killer is loose) – de Budd Boetticher – 1956

Posté : 10 octobre, 2016 @ 8:00 dans * Films noirs (1935-1959), 1950-1959, BOETTICHER Budd | Pas de commentaires »

Le Tueur s'est évadé

Avant d’inaugurer son fameux cycle westernien avec Randolph Scott, Boetticher frappait déjà très fort avec ce thriller dont on sort franchement exsangue, après une séquence finale au suspense hallucinant. Tout le film, en fait, semble se diriger vers cette longue séquence nocturne qui semble d’une simplicité absolue : un piège à haut risque qui se referme – ou pas – sur un évadé bien décidé à tuer la femme du flic qui l’a arrêté.

Il faut dire que le flic en question (Joseph Cotten, prématurément vieilli et pas franchement impliqué) a lui-même tuer la femme de l’assassin, par mégarde, lors d’une scène nettement plus courte dont la violence sèche et brutale impressionnait déjà. Tout n’est pas parfait dans cette petite production dont certains passages en creux manquent un peu de peps. La faute, surtout, à un Cotten qui semble curieusement mal à l’aise, loin en tout cas de ses débuts spectaculaires chez Orson Welles.

Heureusement, sa femme est interprétée par Rhonda Fleming, qui ne se contente pas d’être une magnifique rouquine (même en noir et blanc), mais qui est absolument parfaite dans le rôle de la femme de flic trop exigeante, qui ne voit pas que son bonhomme fait tout pour la protéger. On la bafferait presque, mais c’est Rhonda…

Dans le rôle du tueur, Wendell Corey est lui aussi formidable. Loin de l’image habituelle des grands méchants de cinéma, il impose un personnage de grand malade un peu paumé absolument glaçant. Les éclats de violence de ce type à la gueule de comptable sont autant de décharges électriques qui donnent son ton au film, comme lors du meurtre sauvage du gardien de prison.

Et mine de rien, avec un noir et blanc propre mais sans grande profondeur, Boetticher signe un modèle de mise en scène, en tout cas dans les grands moments de tension comme cette séquence finale, dans laquelle il dilate le temps à l’extrême et concentre tout le suspense sur une unique rue d’un quartier résidentiel, paisible et familière. Du grand art.

Les Conquérants (Dodge City) – de Michael Curtiz – 1939

Posté : 9 octobre, 2016 @ 8:00 dans 1930-1939, BOND Ward, CURTIZ Michael, WESTERNS | Pas de commentaires »

Les Conquérants

En 1939, tout change pour le western, cantonné depuis le début de la décennie à de modestes productions. John Ford redonne ses lettres de noblesse au genre, et la Warner fait de Dodge City l’un de ses films prestigieux avec des moyens immenses, un réalisateur prestigieux, et des stars de premier plan, Errol Flynn et Olivia de Havilland, le couple-vedette de plusieurs grands films d’aventures de la Warner.

Michael Curtiz a donc les moyens de ses ambitions pour ce grand western épique et intime à la fois. Les moyens et visiblement une vraie liberté. Le cinéaste signe non seulement l’une de ses mises en scènes les plus impressionnantes, mais il s’offre aussi, comme de petits plaisirs gourmands, une poignée de plans superbement cadrés et éclairés, véritables tableaux filmés qui exaltent l’harmonie entre l’homme et la nature, plans qui émaillent tout le long métrage.

Un chariot surplombant une vallée baignée dans la brume ; un groupe de cavaliers dont l’image se reflète dans une rivière paisible ; un couple s’éloignant au soleil couchant… Des images fugaces, mais d’une beauté renversante, qui donnent curieusement un ton unique à ce film au superbe Technicolor. Curtiz prouve avec ce film qu’il n’est pas juste l’habile faiseur que l’on présente souvent, mais qu’il peut être un véritable auteur, qui sait créer une intimité inattendue dans n’importe quelle circonstance. C’est notamment ce qu’il fait avec ses beaux plans entre Olivia et Errol filmés de l’intérieur d’un chariot en mouvement.

Si le film est aussi réussi, c’est aussi parce qu’il trouve le parfait équilibre entre l’intime et le spectaculaire : cette hallucinante bagarre de saloon est un moment de cinéma que l’on n’est pas prêt d’oublier, comme cette impressionnante fusillade dans un wagon en feu… Et aussi parce que Curtiz ose les vraies ruptures de ton, qui lui permettent de passer avec efficacité et élégance d’une scène de quasi-comédie à la mort forcément tragique d’un enfant. Gonflé, casse-gueule, et parfaitement réussi.

L’Ultime chevauchée (Raiders of Old California) – d’Albert C. Gannaway – 1957

Posté : 8 octobre, 2016 @ 8:00 dans 1950-1959, GANNAWAY Albert C., WESTERNS | Pas de commentaires »

L'Ultime chevauchée
L’un de ces petits westerns que la Republic Pictures produisait à la chaîne parfois avec de bonnes idées, mais toujours avec un scénario réduit à l’essentiel : tout pour enchaîner les scènes d’action le plus rapidement possible. Quitte à sacrifier le rythme au profit d’un montage haché parfois édifiant. Et toujours avec des comédiens de seconde zone, d’où émergent quelques gueules.

La principale gueule, ici, c’est Lee Van Cleef, dans le rôle d’un homme de main particulièrement cruel bien sûr. Mais quand il est à l’écran, on ne voit que lui, ses yeux inquiétants, son rictus sadique. Il faut dire que face à lui, le héros est interprété par Faron Young, une petite vedette de la country qui a tenté une carrière au cinéma, en ne jouant que des rôles qui portaient son nom, et dont les qualités d’acteur et le charisme se réduisent à une manière très personnelle de remettre sa mèche rebelle sur ses cheveux gominés.

On a donc le shérif Faron Young et son juge de père qui débarquent en Californie pour faire la lumière sur les activités d’un puissant propriétaire terrien qui opprime les fermiers, et qui a construit sa richesse durant la guerre du Mexique, sans doute pas tout à fait légalement… Bref, il y aura plein de rebondissements, une attaque d’Indiens (de trois Indiens pour être précis, on est dans un budget très limité), quelques chevauchées sauvages, une poignée de fusillades, et surtout pas mal de bagarres.

Et c’est là que Gannaway sauve son film. Autant le raconteur d’histoire est médiocre, autant l’homme d’action est percutant. Quelques plans vraiment dynamiques et des situations plutôt originales… On sent soudain, dans toutes ces séquences d’action, une vraie gourmandise de cinéaste, une envie de filmer la vitesse et la brutalité qui fait plaisir à voir.

Il faut voir le tout petit Faron Young se ruer sur Lee Van Cleef avec rage. Ou le même dévaler une colline en se battant avec un Indien. Ou encore des cavaliers qui se réfugient dans une rivière souterraine, décor inattendu. Et la caméra qui suit l’action au plus près avec de beaux travellings. Ça n’en fait pas un grand western, et ça n’en fait pas oublier les mille défauts, mais ça suffit pour le rendre bien sympathique, malgré tout.

* Le DVD vient de sortir dans la collection d’Artus Films au titre très exagéré : « Les grands classiques du western ». Avec une présentation de Georges Ramaïoli, dont on ne peut que vanter l’érudition… et regretter l’absence totale de ferveur.

Le Septième Juré – de Georges Lautner – 1961

Posté : 7 octobre, 2016 @ 8:00 dans * Polars/noirs France, 1960-1969, LAUTNER Georges | Pas de commentaires »

Le septième juré

Lautner n’a pas encore connu le grand succès populaire lorsqu’il réalise Le Septième Juré (son Monocle noir a été tourné la même année). Est-ce la raison ? Voilà peut-être en tout cas le plus réussi de ses films. Le plus abouti esthétiquement en tout cas, et l’un des rares à être tenus de bout en bout, avec une vraie volonté d’imposer un style visuel et un rythme au film.

Le succès venant, Lautner aura un peu trop tendance à se reposer sur ses acteurs et ses dialogues souvent éclatants (déjà excellents ici, d’ailleurs). Mais avec cette adaptation d’un roman de Francis Didelot, il semble encore avoir l’ambition de sa jeunesse. Et dévoile ce que la suite ne confirmera pas toujours : le gars a du talent.

Dès la séquence d’ouverture, admirable flânerie sur un lac écrasé par le soleil, l’atmosphère est posée, et le malaise est là. Plus tard dans le film, une autre scène, dans un bar à la mode cette fois, créera une autre atmosphère autour des confessions troublantes d’un homme à son fils. Et puis ces soirées infinies qui réunissent les notables de la petite ville où s’est noué le drame, où la bonne humeur n’est une façade qu’on ne fait pas même mine de lustrer.

Plus qu’un film de prétoire comme le laisse entendre le titre (les scènes de tribunal ne sont d’ailleurs pas les plus convaincantes), Le Septième Juré est le portrait cruel de cette « bonne société » qui prend des arrangements confortables avec la morale et les faits, et pour qui la vérité est une notion qui ne doit surtout pas bousculer l’ordre établi.

Bernard Blier (sobre et formidable) en fera les frais, pharmacien très fréquentable choisi pour être l’un des jurés dans le procès d’un homme accusé d’un meurtre… qu’il a lui-même commis. L’idée est forte, et aurait pu donner un grand thriller, mais on est dans un tout autre registre, un véritable jeu de massacre dont à peu près personne ne sortira indemne.

Une femme dans la tourmente / Tourments (Midareru) – de Mikio Naruse – 1964

Posté : 6 octobre, 2016 @ 8:00 dans 1960-1969, NARUSE Mikio | Pas de commentaires »

Une femme dans la tourmente

Il y a toujours un bonheur immense à découvrir un cinéaste dont on sait d’emblée qu’il va nous accompagner longtemps… Je n’avais encore jamais vu de films de Naruse, et cette entrée en matière, avec une œuvre plutôt méconnue de sa filmographie, est un véritable choc. Quelle beauté, quelle émotion, et quelle pudeur dans ce portrait d’une femme qui, peu à peu mais avec cruauté, est mise aux portes de sa propre vie…

Elle est une veuve de guerre, qui vit depuis 18 ans que son mari est mort dans la maison de sa belle-famille, faisant prospérer le magasin familial avec courage et conviction. Mais quand son beau-frère revient de Tokyo après avoir plaqué son boulot, ce qu’elle croit acquis commence à vaciller.

D’abord, il y a ces commentaires qui saluent « le sacrifice » de ses 18 ans de travail, à elle qui pensait simplement être à sa place. Et puis ses belles-sœurs qui l’incitent à se remarier. Et enfin ce beau-frère plus jeune de dix ans qui lui déclare son amour…

Tout ce qui faisait sa vie vacille alors, la certitude d’être à la place qui est la sienne se transforme en doutes dérangeants, et tous les repères disparaissent. Comme un signe des temps qui changent, l’ouverture annoncée d’un nouveau supermarché dans leur petite ville menace jusqu’à l’existence de leur magasin de proximité.

Mikio Naruse accumule ces petits signes qui n’ont l’air de rien, mais qui bouleverse l’existence de Reiko, cette femme toujours jeune confrontée aussi bien à son passé qu’à son avenir. Des petits riens, vraiment, mais qui sont parfois d’une grande cruauté à l’image de cette réunion de famille toute en sourires mais qui s’apparente à une gigantesque baffe dans la gueule.

Il fallait une grande actrice pour donner corps à ces tourments. C’est Hideko Takamine, comédienne fétiche de Naruse depuis plus de vingt ans, absolument superbe, dont le regard rempli d’attentes, de détermination et de désespoir, n’est pas prêt de ne plus me hanter…

* Le film, jusqu’à présent inédit en DVD, fait partie des six longs métrages choisis par Carlotta pour accompagner sa formidable encyclopédie consacrée au cinéma japonais.

Le Shérif d’El Solito (The Hard Man) – de George Sherman – 1957

Posté : 5 octobre, 2016 @ 8:00 dans 1950-1959, SHERMAN George, WESTERNS | Pas de commentaires »

Le Shérif d'El Solito

Plutôt inspiré Sherman, pour ce petit western malin et plutôt original sur un aspect: le personnage le moins intéressant est aussi celui qui donne du rythme au film. C’est donc le shérif du titre français, et surtout le « dur » du titre original : Guy Madison, un représentant de la loi qui s’est taillé une réputation de gâchette facile. Réputation injuste, comme l’atteste une belle séquence d’ouverture brutale et sèche… sous une pluie battante.

Il n’a pas trop d’aspérité, ce personnage central, malgré les doutes qu’il laisse deviner concernant ses propres méthodes. Surtout que son interprète n’est pas exactement l’acteur le plus charismatique et le plus profond de l’histoire du western. Il en a en tout cas bien moins (d’aspérité) que les autres personnages centraux du film : le « vrai » shérif (Robert Burton) qui n’est pas à proprement parler un lâche mais qui aspire à une mort paisible, grand propriétaire (Lorne Greene) cruel et sans pitié qui perd inexorablement de sa superbe, et surtout la femme de ce dernier (Valerie French), manipulatrice cynique et fatale.

C’est plutôt rare : le moteur de l’action n’est pas la volonté de posséder plus de terres, ou d’imposer sa puissance. Non, ce qui provoque directement la violence et les drames, c’est la sexualité de la jeune femme, qui multiplie les amants, et dynamite au passage l’image de l’héroïne westernienne, alors que son destin au côté du héros semblait écrit d’avance. Un personnage assez passionnant… hélas interprété par une actrice pour le coup sans relief.

D’ailleurs, c’est bien Guy Madison qui inspire le plus George Sherman. Et plus que la psychologie pourtant pleine de promesses des personnages, c’est l’homme d’action qu’il place au cœur du film. Il semble ainsi y avoir deux Sherman : celui des décors hollywoodiens, un peu trop sage par moment, et celui des extérieurs où il utilise Madison pour donner un rythme soudainement trépidant à son film.

Les quelques duels aux revolvers sont remarquablement filmées, mais ce sont surtout les bagarres à mains nues qui impressionnent, Madison s’imposant comme un grand homme d’action, aux gestes secs et marquants, que la caméra de Sherman met parfaitement en valeur. Elle utilise aussi très bien les quelques décors naturels, comme dans ce magnifique travelling vertical qui suit Madison descendant une colline à cheval, droit vers la caméra.

Tout n’est pas de ce niveau, loin de là. Mais ce petit western jamais sorti en salles en France (et pas diffusé à la télé depuis une quarantaine d’années), mérite d’être découvert.

* Il vient de rejoindre la collection Westerns de Légende chez Sidonis/Calysta, avec une présentation de Patrick Brion.

Sens unique (No Way Out) – de Roger Donaldson – 1987

Posté : 4 octobre, 2016 @ 8:00 dans * Espionnage, * Thrillers US (1980-…), 1980-1989, COSTNER Kevin, DONALDSON Roger | Pas de commentaires »

Sens unique

En 1948, John Farrow réalisait La Grande Horloge, un modèle de thriller. Le héros, interprété par le génial Ray Milland, était un reporter chargé par son patron d’identifier l’homme que sa maîtresse fréquentait, et qui est censé l’avoir assassiné. Sans savoir que cet homme n’est autre que Milland lui-même. Un film tendu et claustrophobique, l’intrigue se déroulant entièrement dans les murs d’une rédaction de journal.

Quarante ans plus tard, Roger Donaldson reprend la même intrigue et le même parti-pris (un homme chargé de démasquer un suspect qui n’est autre que lui-même, dans un environnement clos), mais change complètement le décor. Oublié le journalisme d’investigation des années 40. Désormais, c’est au cœur du Pentagone, avec l’ombre de la guerre froide qui plane, que nous plonge Donaldson.

L’idée en vaut une autre. Et ce décor, fait de grands couloirs et de vastes salles, et où l’informatique (à la sauce 80s) est omniprésent, offre de belles perspectives en matière de suspense. Mais Donaldson n’est, décidément, pas Farrow. Et ce remake dont j’avais gardé un bon souvenir met un temps fou à se mettre en route. Comme s’il fallait absolument profiter de la présence de Sean Young, dans le rôle de la victime, sa mort semble être repoussée autant que possible… jusqu’à la mi-film en fait.

Le problème, c’est qu’avant sa mort, il n’y a pas de film. L’intrigue n’existe pas, le suspense n’a pas de raison d’être, et ne reste alors qu’une romance banale et franchement ennuyeuse, avec un Kevin Costner qui se contente d’être beau et charismatique, et une Sean Young qui minaude comme c’est pas permis. Ajoutez un Gene Hackman en grand méchant et en roue libre, et un Will Patton qui cabotine à outrance… Bref, Donaldson n’est pas, non plus, un grand directeur d’acteur.

La deuxième moitié, heureusement, est plus palpitante. Le suspense fonctionne plutôt bien. Et dès que Costner se met à courir, il donne un vrai rythme à ce thriller souvent mou. Ça suffit pour passer un bon moment. Pas, mais vraiment pas, pour oublier le chef d’œuvre de John Farrow.

14 heures (Fourteen hours) – de Henry Hathaway – 1951

Posté : 3 octobre, 2016 @ 8:00 dans 1950-1959, HATHAWAY Henry | Pas de commentaires »

14 heures

Un jeune homme menace de sauter de la corniche sur laquelle il s’est retranchée, au 15ème étage d’un hôtel. Un petit flic en uniforme est le premier à lui parler. Une étrange relation les unit bientôt, tandis que la foule se forme au pied de l’immeuble… Tout le film tourne autour de ce simple postulat, et c’est l’une des très grandes réussites d’Hathaway.

Détaché pour une fois du film de genre (polar, western, aventure), le cinéaste préfère à l’action la psychologie. C’est tout l’enjeu du film : découvrir le passé de ce jeune désespéré pour mieux comprendre ses motivations. Pour être tout à fait honnête, l’approche psychologique sonne un peu faux aujourd’hui, simpliste en tout cas, malgré la présence de Martin Gabel en psychiatre. Une sorte de synthèse freudo-hollywoodienne du complexe d’Oedipe, avec une mère plutôt ravageuse (Agnes Moorehead).

Mais ce qui sonne vraiment juste, c’est la relation qui se tisse entre le jeune homme (Richard Basehart, intense) et ce flic simple et bon (Paul Douglas, profondément attachant). C’est aussi le travail de fourmi de la police (dirigée par l’excellent Howard Da Silva), le comportement de la foule et des journalistes, et la manière dont Hathaway filme la ville, New York, à grands coups de plongées et de contre-plongées. C’est vrai que le sujet s’y prête particulièrement bien…

La séquence d’ouverture, totalement muette, est un monument de cinéma où la ville dévoile une architecture fascinante, dans un noir et blanc au grain magnifique. Un véritable tour de force aussi, par moments, l’essentiel de l’action se déroulant sur cette corniche large d’une trentaine de centimètres.

Hathaway n’y reste pas scotché, c’est vrai. Sa caméra, contrairement à son personnage principal, s’offre quelques distractions et passe du face-à-face central à plusieurs intrigues secondaires qui se nouent grâce au drame en cours : deux jeunes gens qui se rencontrent dans la foule massée au pied de l’immeuble, des chauffeurs de taxi qui tuent le temps comme ils peuvent, ou une jeune femme qui tente de se frayer un chemin pour se rendre chez son avocat…

Cette jeune femme, c’est une jeune débutante nommée Grace Kelly, déjà solaire. Au milieu de la foule, on ne voit que sa grâce et sa blondeur. Une vraie star en devenir, même si elle ne tient ici qu’un petit rôle. Pas de star ici, mais de solides acteurs formidables, et un cinéaste particulièrement inspiré, pour un film fort et émouvant.

* DVD dans la collection Hollywood Legends (Fox, ESC éditions), avec une image irréprochable. Et en bonus, une présentation courte mais passionnante par Jean-François Rauger, programmateur à la Cinémathèque française.

Mr. Holmes (id.) – de Bill Condon – 2015

Posté : 2 octobre, 2016 @ 8:00 dans 2010-2019, CONDON Bill, Sherlock Holmes | Pas de commentaires »

Mr. Holmes

Bien sûr, il y a le sens de l’observation, quasi intact, du plus célèbre des détectives, capable de dire à sa gouvernante qu’elle vient de prendre le train pour Portsmouth et qu’elle a accepté un nouveau travail. On les attend, forcément, ces déductions incroyables, et on les retrouve avec un plaisir gourmand, même s’il ne s’agit que de toutes petites choses comme dans cette scène d’ouverture, où Holmes comprend qu’un enfant s’apprête à taper sur une vitre pour effrayer une guêpe…

Des petites choses, qui tirent à Holmes un petit sourire satisfait, ou plutôt rassuré. Car ce Holmes-là n’est pas le vaniteux splendide des récits de Conan Doyle. Cette adaptation d’un roman beaucoup plus récent confronte le détective au plus terrible de ses ennemis, bien pire que Moriarty : la vieillesse, et tout son cortège de saloperies. Holmes est vieux (93 ans), et seul. Watson, Mycroft, Mme Hudson sont tous morts. Et une vieille affaire le hante, traumatisme qui l’a poussé, bien des années plus tôt, à quitter Londres pour se perdre dans la campagne anglaise.

Holmes est rongé par un sentiment de culpabilité. Pourtant, il ne sait plus pourquoi : sa mémoire lui fait défaut. Et le terrain de jeu de sa dernière enquête, c’est lui-même et son cerveau abîmé… Ian McKellen est extraordinaire dans le rôle de cet homme arrivé au bout de sa vie, qui tente désespérément de se raccrocher aux bribes de la légende qu’il fut. Un vieillard qui retrouve sa fièvre d’autrefois par bribes, entre deux accès de sénilité, et dont la cohabitation avec un gamin, fils de sa gouvernante, apporte de subits regains d’énergie.

Mr. Holmes joue habilement avec cette mémoire défaillante et cette forme inégale, en multipliant les flashbacks et cassant constamment le rythme. Bill Condon entremêle les petites intrigues et les époques, pour ce qui est le dernier voyage d’un homme habité par ses échecs et ses trop grands succès. L’enquête à proprement parler est plus psychologique que policière, mais Condon se rapproche curieusement de l’esprit des récits originaux, témoignant d’un amour sincère pour ce personnage.

Surtout, son film tourne autour de cet improbable triangle sur lequel pèse constamment l’ombre de ce que fut Sherlock Holmes : le détective lui-même, et l’équilibre qu’il peine à trouver avec sa gouvernante et le fils de cette dernière. Laura Linney rappelle qu’elle est une actrice sublime. Son interprétation tout en finesse d’une mère qui voit son enfant trop intelligent s’éloigner d’elle est bouleversante. Si le film est aussi beau, c’est peut-être surtout grâce aux acteurs…

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