La Femme sur la plage (Woman on the Beach) – de Jean Renoir – 1947
Contrairement à d’autres réfugiés français pendant l’occupation (Duvivier ou Gabin, par exemple), Jean Renoir n’a pas fait qu’un passage éclair à Hollywood : il s’y est installé longuement, prenant même la nationalité américaine. Il ne gardera pourtant pas un grand souvenir de cette période, marquée par ses difficultés à rentrer dans le moule hollywoodien.
On sent clairement ces difficultés dans Woman on the Beach, le dernier de ses films tournés sur le sol américain. Il y a bien quelques moments très beaux, comme cette tendresse soudaine qui rapproche Joan Bennett et son mari Charles Bickford au coin du feu, ou cette scène où Robert Ryan chevauche sur une plage baignée par la brume, comme dans un rêve éveillé. Mais il y a surtout une impression de maladresse, parfois presque gênante, qui se dégage de l’ensemble.
Renoir a pourtant participé au scénario (il est crédité, en tout cas). Mais l’évolution des personnages laisse par moments dubitatifs. On a en tout cas toutes les peines à s’attacher à ce triangle amoureux (pourtant interprété par de grands comédiens) qui semble annoncer un pur film noir.
Produit par la RKO, le film ressemble à effectivement à s’y méprendre à un film noir. Un anti-héros hanté par la guerre (Ryan), une femme que l’on devine fatale (Bennet), un mari aveugle (mais l’est-il vraiment ?) et gênant (Bickford)… Avec des personnages comme ceux-là, on voit venir le truc de loin. Et effectivement, Ryan va se décider à éliminer son rival. Sauf que ce n’est pas si simple…
Jouer avec les codes de ce genre si américain aurait pu inspirer Renoir. Mais le réalisateur semble constamment trop contraint, mal à l’aise avec des scènes et une atmosphère qu’on lui a sans doute imposés. Woman on the Beach est un film plutôt agréable, et qui ne manque pas d’un certain charme, par moments. Mais il était temps que Renoir se décide à quitter Hollywood, tout de même…