Le Shérif d’El Solito (The Hard Man) – de George Sherman – 1957
Plutôt inspiré Sherman, pour ce petit western malin et plutôt original sur un aspect: le personnage le moins intéressant est aussi celui qui donne du rythme au film. C’est donc le shérif du titre français, et surtout le « dur » du titre original : Guy Madison, un représentant de la loi qui s’est taillé une réputation de gâchette facile. Réputation injuste, comme l’atteste une belle séquence d’ouverture brutale et sèche… sous une pluie battante.
Il n’a pas trop d’aspérité, ce personnage central, malgré les doutes qu’il laisse deviner concernant ses propres méthodes. Surtout que son interprète n’est pas exactement l’acteur le plus charismatique et le plus profond de l’histoire du western. Il en a en tout cas bien moins (d’aspérité) que les autres personnages centraux du film : le « vrai » shérif (Robert Burton) qui n’est pas à proprement parler un lâche mais qui aspire à une mort paisible, grand propriétaire (Lorne Greene) cruel et sans pitié qui perd inexorablement de sa superbe, et surtout la femme de ce dernier (Valerie French), manipulatrice cynique et fatale.
C’est plutôt rare : le moteur de l’action n’est pas la volonté de posséder plus de terres, ou d’imposer sa puissance. Non, ce qui provoque directement la violence et les drames, c’est la sexualité de la jeune femme, qui multiplie les amants, et dynamite au passage l’image de l’héroïne westernienne, alors que son destin au côté du héros semblait écrit d’avance. Un personnage assez passionnant… hélas interprété par une actrice pour le coup sans relief.
D’ailleurs, c’est bien Guy Madison qui inspire le plus George Sherman. Et plus que la psychologie pourtant pleine de promesses des personnages, c’est l’homme d’action qu’il place au cœur du film. Il semble ainsi y avoir deux Sherman : celui des décors hollywoodiens, un peu trop sage par moment, et celui des extérieurs où il utilise Madison pour donner un rythme soudainement trépidant à son film.
Les quelques duels aux revolvers sont remarquablement filmées, mais ce sont surtout les bagarres à mains nues qui impressionnent, Madison s’imposant comme un grand homme d’action, aux gestes secs et marquants, que la caméra de Sherman met parfaitement en valeur. Elle utilise aussi très bien les quelques décors naturels, comme dans ce magnifique travelling vertical qui suit Madison descendant une colline à cheval, droit vers la caméra.
Tout n’est pas de ce niveau, loin de là. Mais ce petit western jamais sorti en salles en France (et pas diffusé à la télé depuis une quarantaine d’années), mérite d’être découvert.
* Il vient de rejoindre la collection Westerns de Légende chez Sidonis/Calysta, avec une présentation de Patrick Brion.
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