Cheval de guerre (War Horse) – de Steven Spielberg – 2011
Il n’y avait que Spielberg pour réussir un tel film : une fresque sur fond de première guerre mondiale, racontée à travers le destin d’un cheval. Et pour éviter d’en faire une bluette sirupeuse, ou une petite chose réservée à un public très jeune. Non, Avec Cheval de Guerre, Spielberg confirme que, même s’il a largement contribué à créer le Hollywood actuel des blockbusters, il reste le principal héritier des grands cinéastes classiques comme John Ford ou William Wellman.
Et il ne triche pas, Spielberg. De la petite ferme irlandaise où il est dressé par un adolescent plein de fougue, à ses exploits dantesques dans les tranchées de la Somme, c’est bien le parcours du cheval qu’il suit : ses premiers pas de cheval de trait, son départ pour le front, sa participation à une charge meurtrière, sa récupération par les Allemands, sa rencontre avec une jeune fille et son grand-père, ses « travaux forcés », son évasion sublime, et son échouage dans le no man’s land où, le temps d’un soir, il sera l’objet d’une trêve aussi belle qu’éphémère entre les deux camps…
C’est le Spielberg des années 80 que l’on retrouve en quelque sorte ici : un Spielberg qui cherche l’innocence dans les pires situations. Dans cette époque terrifiante, le cheval aura une constante : il dévoilera le meilleur de tous ceux qu’il côtoiera, jeunes ou vieux, Français, Irlandais, Américains ou Allemands, soldats ou civils. Sans naïveté, mais avec une sensibilité extrême, et surtout un sens esthétique rare.
Car si le film est aussi beau, c’est avant tout parce qu’il est parsemé d’images d’une beauté sidérante : le labour du champ pierreux sous la pluie, la course folle à travers les tranchées, la réconciliation dans le no man’s land à la tombée de la nuit, les retrouvailles sous la neige, ou le retour au pays dans un clair obscur que n’aurait pas renié John Ford. Du grand cinéma classique.