Lutte sans merci (13 West Street) – de Phillip Leacock – 1962
Vingt ans après Tueur à gages, il a pris cher Alan Ladd, prématurément vieilli et bouffi, loin du charme animal et dangereux de ses grandes années. Sa carrière, d’ailleurs, est en plein déclin lorsqu’il tourne ce thriller qu’il produit lui-même, comme une ultime chance de retrouver les sommets. Le résultat est loin d’être à la hauteur : Lutte sans merci est un « vigilante movie » poussif et visuellement assez laid, qui manque cruellement de rythme.
La faute à un réalisateur guère inspiré, parce que le scénario, qui préfigure des tas de films à venir basés sur l’idée de l’autojustice (pas souvent formidables, du fameux Justicier dans la ville de Bronson au pénible A vif avec Jodie Foster), n’est pas si mal. Plus que l’autodéfense, c’est vraiment le traumatisme de la violence qui est au cœur du film. Et Ladd incarne parfaitement cette idée d’un homme normal et sans histoire, incapable de tourner la page après avoir été victime d’une agression gratuite et sauvage.
Un scénario qui ne joue pas la carte de la surenchère, préférant miser sur une atmosphère troublante et paranoïaque. Il y a bien un méchant, finalement plus pathétique que diabolique, mais le film met surtout en évidence les petits défauts, les mesquineries et les imperfections de chacun : les coupables, les victimes, et même la police.
Loin des clichés du superflic ou, au contraire, du policier incompétent, Rod Steiger est lui aussi remarquable. A priori, un duo Ladd-Steiger pouvait faire craindre le pire : face à Ladd le taciturne, Steiger l’exubérant aurait pu assommer le film. Il n’en est rien : inhabituellement sobre, l’acteur est absolument parfait.
Malgré tout ça, le film ennuie un peu, et laisse un goût d’inachevé. Trop polissée, trop anonyme, la mise en scène ne convainc jamais vraiment. Dommage.
* DVD dans la collection « Film noir, femme en danger » de Sidonis/Calysta, avec des présentations de Patrick Brion et François Guérif.
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