La Dernière Caravane (The Last Wagon) – de Delmer Daves – 1956
Daves est un cinéaste génial, et le western lui va comme un gant. Cela saute aux yeux dès les premières minutes de ce Last Wagon, nouveau chef d’oeuvre à mettre au crédit de l’auteur de La Flèche brisée et de 3h10 pour Yuma. En une série de plans sans dialogues, deux constats se font…
D’abord, Daves utilise merveilleusement le Cinemascope dans ce film tourné exclusivement en décors naturels (à l’exception d’une courte séquence de tribunal, à la toute fin du film). Privilégiant les plans larges qui placent l’homme au cœur de la nature gigantesque, et les discrets mouvements de caméras qui dramatisent cet environnement à la fois splendide et plein de dangers, Daves fait de chaque image un tableau grandiose et dramatique, à couper le souffle.
Dans ces premières minutes, ce qui frappe aussi, c’est la manière dont le personnage de Richard Widmark est introduit : après avoir abattu un homme sans la moindre sommation, le voilà qui prend la fuite à pied, poursuivi par d’autres hommes qu’il tuera à leur tour avec froideur. Drôle de « héros » westernien, donc, qui tue de sang froid et court à travers les grands espaces déserts…
Cinéaste cultivé et respectueux du spectateur, Daves ne mâche pas le travail à ce dernier. Widmark est-il un salaud ou un type bien ? Les premiers indices font nettement pencher vers la première hypothèse, mais qui sait… Finalement arrêté, enchaîné à la roue d’un chariot, témoin du massacre de colons par les Apaches (massacre dont on ne verra rien), le voilà seul avec trois jeunes femmes, un gamin, et deux hommes à peine sortis de l’enfance, en plein territoire indien. De quoi mettre à l’épreuve les vraies natures des uns et des autres…
The Last Wagon est un film spectaculaire… qui évite consciencieusement les effets spectaculaires. C’est moins sur la violence, finalement rare à l’image, que sur l’hostilité et la grandeur de l’environnement, que Daves base l’extrême tension du film. Une tension que le regard clair et impénétrable de Widmark, formidable, sert parfaitement.
Il est presque de toutes les scènes, grand personnage « davesien » dans la droite lignée du James Stewart de La Flèche brisée : un blanc élevé par les Comanches qui se révèle à lui seul un symbole d’ouverture et d’antiracisme. Son interprétation intense et toute en retenue fait oublier les seconds rôles un peu moins convaincants. Felicia Farr en tête, en amoureuse transie qui ne laisse pas grand-place à la nuance.
Un détail… The Last Wagon est un très grand western, l’un de ces films qui donnent ses lettres de noblesse au Cinemascope, et l’un des chefs d’œuvre de son auteur.
* DVD dans la collection « Westerns de Légende » chez Sidonis/Calysta.
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