Play it again, Sam

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Archive pour janvier, 2016

Mark Dixon détective (Where the Sidewalk ends) – d’Otto Preminger – 1950

Posté : 18 janvier, 2016 @ 1:52 dans * Films noirs (1935-1959), 1950-1959, PREMINGER Otto, TIERNEY Gene | Pas de commentaires »

Mark Dixon Detective

Voilà un film qui peut sans problème prétendre à une place au panthéon des pires traductions de titres. Il est pourtant magnifique, ce titre en VO. « Là où le trottoir s’arrête », une destination que le très beau générique souligne sans détour : le trottoir s’arrête… dans le caniveau. Là même où les méthodes et le lourd passé du flic Mark Dixon le dirige immanquablement.

Le titre français n’a évidemment pas le centième de la puissance d’évocation du titre original. Il n’est pas totalement idiot pour autant : ce n’est pas un polar que signe Preminger, mais le portrait d’un homme, un flic, emprisonné dans ses mensonges et ses habitudes, et qui tente un peu tardivement de s’imposer comme le policier qu’il est, et non comme le fils de truand qu’il se sent depuis toujours.

Comme dans Laura, film culte de Preminger qui réunissait déjà Dana Andrews et Gene Tirney, tout le film tourne autour d’une obsession : celle pour Mark Dixon d’échapper à son destin. Mais la comparaison, forcément incontournable, s’arrête à peu près là. Dans le ton, dans la forme, Preminger fait ici des choix radicalement différents, et effectivement assez radicaux.

Visuellement d’abord : avec ce noir et blanc au grain impressionnant, Preminger semble nous coller directement sur le macadam, au contact des aspects les moins glamours de la ville. Dans la mécanique implacable de cette plongée au cœur de la violence aussi, et dans la manière de rendre cette violence réellement brutale : dès les premières scènes, on sait que le moindre coup peut être mortel. La violence n’a, ici, strictement rien de ludique.

En anti-héros habité par la rage, Dana Andrews est simplement extraordinaire. Il est de toutes les scènes, peu bavards, et impassible en apparrence. Mais l’acteur sait jouer comme personne de son regard et de ses petits riens – une machoire qui se crispe, des lèvres qui s’entrouvrent, un regard qui se fixe – qui dévoilent le doutes, la colère ou la délivrance. Un contrepoint parfait à la douce et fascinante Gene Tierney, qui joue un peu les faire-valoir, mais dont la présence à l’écran a quelque chose de purement magique.

Au moins autant que Laura, mais dans un registre différent, Mark Dixon détective est un chef d’œuvre absolu. Peut-être le sommet de la (riche) collaboration entre Andrews et Preminger. Peut-être leur plus grand film à tous les deux.

Le Solitaire des Rocheuses (The Lone Hand) – de George Sherman – 1953

Posté : 17 janvier, 2016 @ 8:00 dans 1950-1959, SHERMAN George, WESTERNS | Pas de commentaires »

Le Solitaire des rocheuses

Dans la lignée de L’Homme des Vallées perdues, succès colossal cette année-là, les westerns avec enfants sont devenus quasiment un sous-genre très en vogue. En témoigne ce Lone Hand, totalement inédit en France jusqu’à présent. Une curiosité, donc, que l’on doit au très prolifique George Sherman, cinéaste modeste et souvent efficace qui, à défaut d’avoir un univers très marqué, connaît parfaitement son métier. Un petit artisan comme on les aime.

Le film commence avec une voix off (celle du gamin) qui laisse présager le pire. Le gamin, donc, qui raconte que le type à côté de lui, c’est son père (ah ?). C’est aussi Joel McCrea, toujours excellent mais qui, ici, fait ce qu’il peut avec un personnage pas formidablement écrit. C’est la limite du film : le scénario, qui cherche l’originalité et le mystère, mais qui ne trouve que l’approximation et les effets faciles.

L’idée est pourtant assez originale : faire du héros un pauvre fermier qui arrive avec son fils dans une petite ville où il s’installe, avant de céder aux sirènes de l’argent facile et de se mettre à attaquer des banques et des dilligences avec un gang redoutable. Sauf que les rebondissements sont hyper téléphonés et qu’on sait d’avance comment tout ça va se terminer.

Pas désagréable pour autant, ce petit western qui ne marque pas le genre, mais que Sherman mène à un rythme parfait, en ancrant ses personnages dans des paysages grandioses : la nature est omniprésente, et c’est elle le personnage le plus passionnant et le plus authentique…

* Le film, totalement inédit jusqu’à présent, donc, vient d’enrichir la collection Westerns de Légende de Sidonis/Calysta. Avec une présentation par Patrick Brion.

L’Homme aux colts d’or (Warlock) – d’Edward Dmytryk – 1959

Posté : 16 janvier, 2016 @ 8:00 dans 1950-1959, DMYTRYK Edward, WESTERNS | Pas de commentaires »

L'Homme aux colts d'or

Voilà un western absolument formidable, et superbement réalisé par un Dmytryk très inspiré, qui peut compter sur un chef opérateur formidable (Joseph McDonald, chef op de La Poursuite infernale ou de Niagara), à qui on doit une poignée de plans à couper le souffle, comme cette silhouette (de Henry Fonda) qui se dessine dans une nuit bleue avec les flammes qui commencent à dévorer l’écran.

Mais c’est surtout le scénario qui impressionne par sa complexité, inhabituelle dans le genre. Et par la richesse des personnages et des relations qui se tissent. Les personnages masculins en tout cas, parce que les deux personnages féminins sont à la limite de la caricature : la douce Dolores Michaels et la piquante Dorothy Malone n’y peuvent pas grand-chose.

Côté hommes, on a droit à un superbe trio d’acteurs. Richard Widmark en bandit qui passe du bon côté de la loi, sans doute un peu trop vieux pour le rôle mais toujours d’une justesse remarquable. Henry Fonda en légende vivante, intense et charismatique comme jamais. Et Anthony Quinn en mystérieux sidekick, dans l’un de ses grands rôles : l’un de ces films pas si nombreux où le réalisateur, et la nature de son personnage, ont su canaliser son énergie débordante, refréner ses penchants pour le cabotinage, et libérer son impressionnante présence. Ils ne sont pas si nombreux à avoir réussi un tel exploit (on pense à Allan Dwan avec Le Bord de la Rivière).

Avec ce film à gros budget et en Cinemascope, Dmytryk s’amuse à prendre le contre-pied des poncifs du western, et à tromper constamment l’attente des spectateurs. Les duels attendus ne se passent jamais comme on le pense, et le cinéaste se permet même de priver Fonda de la grande confrontation annoncée.

Le film est aussi une belle réflexion sur la violence et ses effets, opposant l’auto-justice à la loi, peut-être moins efficace, mais qui seule peut ramener la paix et assurer l’avenir de la société. Là encore, c’est une morale qui est loin d’être courante dans le western.

* Le film fait partie de la collection « Western de Légende », et figure dans l’impressionnant coffret de 30 westerns (avec encyclopédie en deux volumes consacrée au genre par Patrick Brion) que vient d’éditer Sidonis/Calysta).

Sous le lampadaire (Unter der Laterne) – de Gerhard Lamprecht – 1928

Posté : 15 janvier, 2016 @ 8:00 dans 1920-1929, FILMS MUETS, LAMPRECHT Gerhard | Pas de commentaires »

Sous le lampadaire

Splendide mélo que signe Gerhard Lamprecht, cinéaste oublié mais très grand de la période muette du cinéma allemand. La plus belle, donc. Un mélo en apparence assez classique : c’est la trajectoire tristement banale dans le genre d’une jeune femme, Else (Lissy Arna) entraînée dans une inexorable descente aux enfers. Avec tous les excès du mélodrame : rien ne lui sera épargné.

C’est surtout le portrait d’une société terrifiante pour une femme seule et sans ressource. Lamprecht filme la ville comme une suite de pièges où le moindre bras qui se tend est comme un étau qui se resserre, où le moindre passage obscur devient un tunnel sans fin, où la triste héroïne se débat en pure perte, sans possibilité de sortir de ces murs omniprésents et de plus en plus oppressants.

La dernière partie va très loin dans le mélo le plus plombant, mais tout commence pourtant d’une manière très lumineuse. Toute la première partie du film est emmenée sur un rythme trépidant, avec une envie de vivre et la joie communicative d’Else et de ses deux « anges gardiens », son fiancé Hans et leur ami Max. Avec une immense délicatesse, aussi. Mais la légèreté des premiers temps disparaît peu à peu. Lamprecht réussit à modifier constamment l’atmosphère de son film, la rendant plus lourde, toujours plus lourde. Car ce qu’il veut faire ressentir dans ce film, c’est la disparition de l’innocence, la mort des illusions. Pas gai, non…

Superbement filmée, cette histoire tragique confirme le talent de Lamprecht, cinéaste visuel qui illustre parfaitement le degré de perfection qu’avait atteint le cinéma à la fin du muet. Tout dans ses images fait sens. Le moindre geste, le moindre objet. Loin des plans généraux qui étaient la norme quelques années plus tôt, lui semble ne s’intéresser aux détails: une main qui se tend lentement pour éteindre une bougie, une affiche que l’on décroche… L’émotion, la complexité des personnages : tout passe par l’image, Lamprecht n’utilisant les cartons qu’avec parcimonie.

Cette logique atteint un systématisme étonnante et fascinant lors de la parenthèse « luxueuse » de la pauvre héroïne, qui se retrouve en couple avec un dandy escroc : durant de longues minutes, pas le moindre plan large, plus le moindre visage, juste une valse de vêtements, de bijoux, des gros plans sur des pieds croisés, sur des mains abandonnées… Simplement génial.

Le Rêve de Cassandre (Cassandra’s Dream) – de Woody Allen – 2007

Posté : 14 janvier, 2016 @ 8:00 dans * Thrillers US (1980-…), 2000-2009, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Le Rêve de Cassandre

Après Match Point et Scoop, Woody Allen clôt une sorte de trilogie criminelle anglaise. « Sorte », parce que autant les deux précédents présentaient une vraie parenté, autant celui-ci s’en démarque par un ton inhabituellement sombre pour le cinéaste, qui signe un authentique film noir, sans la légèreté apparente et l’aspect lumineux de la plupart de ses « films criminels ».

Le film permet à Woody d’explorer des rivages jusqu’alors inconnus. Notamment en installant une atmosphère extrêmement dure, avec une lumière et un ciel londoniens qui semblent constamment peser sur les personnages. Mais aussi en quittant la bonne société pour un quartier populaire de Londres, où vivent deux frères avec leurs parents vieillissants, évoquant à longueur de journée la réussite d’un oncle parti faire fortune au bout du monde.

Ces deux frères sont des nouveaux venus dans le cinéma d’Allen : Ewan McGregor et Colin Farrell, que Woody Allen filme le plus souvent côte à côte, partageant l’écran avec une complicité fraternelle absolument formidable. Deux frères qui, un peu par sens de la famille, beaucoup pour s’assurer un meilleur avenir, acceptent de tuer un inconnu…

Des personnages sans histoire qui décident de commettre un crime. Le thème a déjà été et sera encore exploré par le cinéaste. Mais cette fois, aucune ironie, aucun semblant de comédie… Juste le poids du destin, et celui des rêves brisés, pour un film particulièrement intense, où Woody Allen joue avec sadisme avec nos émotions. Quatre moments, en apparence simple, atteignent ainsi des sommets…

Le premier est un simple plan, en apparence banal : un panoramique suivant le premier départ du bateau acheté par les deux frères, et qui submerge le spectateur d’une vague de bien-être, comme si l’avenir était tout tracé.

Le deuxième est tout simple, lui aussi : les parents des frères observant leurs enfants par la fenêtre. Lui d’habitude taiseux annonçant qu’il avait encore rêvé des garçons. Elle soudain attentive à son inquiétude… L’image banale d’un couple dans la pénombre d’une cuisine, tendre et cruellement conscient de l’avenir.

Et puis, après une série de séquences où le crime est constamment repoussé, où le grotesque flirte avec le suspense, deux coups de feu qui claquent dans la nuit, hors champs. Littéralement glaçant. Là, Woody Allen se met au niveau des plus grands spécialistes du noir : durant de longues minutes, il a fait plané le doute, jouant avec la tension et les espoirs de ses personnages et des spectateurs, étirant au maximum cette angoissante attente. Jusqu’à ce dénouement explosif qui semble raisonner de longues minutes.

Enfin, après cette douloureuse descente aux enfers, et alors que le fantôme de Match Point (et du futur L’Homme irrationnel) plane sur le personnage « fort » d’Ewan McGregor, alors que l’engrenage de la violence le pousse aux portes de l’horreur absolue, cette canette soudain brisée. Et les deux frères qui acceptent leur destin dans la rage…

Le Rêve de Cassandre, déjà oublié, est pourtant l’un des grands films de Woody Allen de ces dernières années. Un film destabilisant, certes, dénué du charme léger et de l’ironie de ses précédentes réussites. Mais aussi l’un de ses plus intenses.

Charlot pompier (The Fireman) – de Charles Chaplin – 1916

Posté : 13 janvier, 2016 @ 9:00 dans 1895-1919, CHAPLIN Charles, COURTS MÉTRAGES, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Charlot pompier

Titre alternatif (VF) : Le Pompier

Titres alternatifs (VO) : A Gallant Fireman ; The Fiery Circle

Pour son deuxième film à la Mutual, Chaplin reste dans le slapstick pur, avec une comédie au rythme trépidant, l’un de ces films entièrement basés sur le métier de Charlot. Pompier, donc.

Son personnage passe de l’hyperaction à l’indifférence, de la mesquinerie à l’héroïsme, sans logique apparente. Normal : là encore, seul le gag et son effet intéressent un Chaplin entièrement tourné vers le mouvement. Le réalisateur s’offre d’ailleurs un beau plan assez impressionnant dans une voiture à cheval lancée à toute vitesse. Quant à l’acteur, il a droit à une cascade digne du Harold Lloyd de Safety Last : l’escalade sans trucage d’une façade d’immeuble haute de trois étages.

Pour le reste, on est clairement en terrain connu, avec Edna Purviance en belle à secourir et Eric Campbell en brute, avec les coups de pied aux fesses et les personnages maculés de nourriture. Mais la comédie fonctionne parfaitement, avec quelques belles trouvailles, comme ces chevaux attelés en marche arrière grâce à la pellicule projetée à l’envers.

The Fireman s’inscrit clairement dans la lignée de ses premières comédies, mais la maîtrise de Chaplin a fait un bond de géant depuis l’époque de la Keystone, à peine deux ans plus tôt.

Charlot chef de rayon (The Floorwalker) – de Charles Chaplin – 1916

Posté : 13 janvier, 2016 @ 8:00 dans 1895-1919, CHAPLIN Charles, COURTS MÉTRAGES, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Charlot chef de rayon

Titre alternatif (VF) : Le Chef de rayon

Titre alternatif (VO) : Shop !

Chaplin fait ses premiers pas à la Mutual avec ce court métrage plutôt classique sur le fond : un décor fort dont il tire tous les ressors comiques imaginables. En l’occurrence un grand magasin. Une formule qui lui a souvent réussi, et qui lui permet de prendre ses marques dans ce nouveau studio où sa liberté créatrice sera plus grande encore qu’à la Essanay ou, plus tôt, à la Keystone.

Un film assez classique, donc, et dénué de la fibre sociale et de l’émotion dont il a déjà commencé à teinter son cinéma : on est ici dans la comédie la plus pure, avec courses poursuites, coups de pied dans les fesses, catastrophes qui s’enchaînent… Du slapstick, du vrai. Mais tout ça est mené à un rythme qui ne mollit pas une seule seconde. Les gags s’enchaînent, et Chaplin lui-même semble lancé dans un mouvement ébouriffant, jouant notamment avec l’omniprésent escalator, qui donne quelques scènes irrésistibles.

L’intrigue est anecdotique : les deux patrons du magasin ont décidé de se faire la malle avec l’argent de la caisse. Mais l’idée originale est d’avoir fait de l’un de ces escrocs le quasi-sosie de Charlot. Leur rencontre est particulièrement drôle, géniale variation sur le fameux thème du faux miroir, dont Max Linder, son maître revendiqué, fera l’une des meilleures adaptations dans 7 ans de malheur.

Ce film permet aussi à Chaplin de découvrir l’un de ses méchants préférés : Eric Campbell, qui sera de presque tous ses courts métrages à la Mutual. Jusqu’à sa mort prématurée en 1917.

Les Avatars de Charlot (Triple Trouble) – de Charles Chaplin et Leo White – 1915-1918

Posté : 12 janvier, 2016 @ 9:00 dans 1895-1919, CHAPLIN Charles, COURTS MÉTRAGES, FILMS MUETS, WHITE Leo | Pas de commentaires »

Les Avatars de Charlot

Titre alternatif (VF) : Charlot chemineau

Début 1916, Chaplin a fait ses adieux à la Essanay. Mais pour les dirigeants de cette dernière, voir partir la poule aux oeufs d’or a visiblement été difficile à accepter. A peine la star avait-elle franchi la porte qu’ils remontaient et dénaturaient l’un de ses derniers films (A Burlesque on Carmen). Un peu plus de deux ans plus tard, la Essanay va même jusqu’à sortir sur les écrans un « nouveau film » de Charlot…

Mais Triple Trouble est un pur produit marketing, un montage un rien foutraque mais finalement pas désagréable de plusieurs séquences qui n’avaient rien à voir entre elles : quelques scènes tirées de Work, l’un des courts métrages tournés en 1915, des images rescapés de Life, le projet de long métrage abandonné de Chaplin, ainsi qu’une poignée de plans et surtout une longue séquence coupée de Police, le dernier film tourné pour la Essanay.

C’est cette dernière séquence qui fait tout l’intérêt de Triple Trouble : il s’agit d’une scène se déroulant dans l’asile de nuit dont Charlot se fait renvoyer dans Police tel qu’on le connaît, mais où il devait initialement retourner. Chaplin avait en tout cas tourné une longue séquence dans cet asile, qui avait finalement été abandonnée dans le montage définitif.

Pour assurer une sorte de continuité entre ces éléments disparates, le réalisateur Leo White a été chargé de tourner quelques plans de raccords, en faisant appel à quelques acteurs présents dans Work ou Police. En résulte une curieuse historique de savant, de bombre nouvelle génération, d’espionnage et de vol. Un pur prétexte.

Charlot cambrioleur (Police) – de Charles Chaplin – 1916

Posté : 12 janvier, 2016 @ 8:00 dans 1895-1919, CHAPLIN Charles, COURTS MÉTRAGES, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Charlot cambrioleur

Titres alternatifs (VO) : Charlie the burglar ; Charlie in the police ; The Housebreaker

C’est le Chaplin des grands chefs d’œuvres qui se profile avec Police, dernier film tourné par la star pour la Essanay. Dès la séquence d’ouverture, on sent que, comme dans tous les grands films qui vont suivre, le rire va être teinté de gravité, et que la comédie est ancrée dans une réalité sociale forte.

Et puis le film confirme l’impression laissée par Burlesque on Carmen, tourné quelques semaines plus tôt : Chaplin le cinéaste s’impose de plus en plus devant Chaplin le gagman. Visuellement, Police est plein de belles trouvailles, de plans très construits, inédits jusqu’alors. Le plus marquant : les ombres de Charlot et de son comparse cambrioleur qui se dessinent sur un mur, et qui nous font deviner la nervosité du personnage qui joue une nouvelle fois avec son chapeau.

Chaplin peaufine encore son vagabond, donnant une importance grandissante aux accessoires incontournables : ce fameux chapeau qu’il fait rouler sur son bras, image devenue mythique ; et cette canne qui semble par moments avoir sa vie propre, inépuisable source de gags.

Au-delà des gags, Police est surtout un modèle de narration, d’une inventivité de chaque instant. Chaplin ne se contente plus d’enchaîner les effets comiques, il construit son film, dans une sorte de mouvement perpétuel très inspiré.

Chaplin clôt sa période Essanay avec une petite merveille, qui annonce sur le fond et sur la forme ce qui fera la grandeur de son cinéma durant les années et les décennies à venir.

Charlot joue Carmen (Charlie Chaplin’s Burlesque on Carmen) – de Charles Chaplin – 1916

Posté : 11 janvier, 2016 @ 9:00 dans 1895-1919, CHAPLIN Charles, COURTS MÉTRAGES, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Charlot joue Carmen

Titres alternatifs (VO) : A Burlesque on Carmen ; Carmen

J’ai toujours trouvé cette parodie de Carmen (le film de Cecil B. De Mille sorti l’année précédente) poussive et ennuyeuse, sorte d’exception malheureuse dans la filmographie de Chaplin. J’avais tort. A revoir le film joliment restauré, et dans le montage voulu par Chaplin, c’est l’ambition artistique du cinéaste, et la réussite de ce court métrage effectivement à part dans son oeuvre, qui frappent.

Lorsque le film sort en salles (en avril 1916), Chaplin a déjà quitté la Essanay pour la Mutual. Burlesque on Carmen est alors presque deux fois plus long que le montage voulu par Chaplin : son ancien studio a décidé de ralonger le film de nouvelles scènes tournées sans son autorisation, et renforçant l’aspect comique. Une trahison qui se terminera en procès, que Chaplin perdra, mais qui renforcera sa volonté d’être son propre maître.

La version « director’s cut » de deux bobines est une merveille, dans laquelle Chaplin montre clairement sa volonté d’explorer d’autres aspects du cinéma, et de ne pas se cantonner dans le burlesque. Le titre l’annonce clairement : on est bel et bien dans la comédie burlesque, et Chaplin détourne joyeusement et avec son habituel génie comique les figures les plus marquantes du film de De Mille.

Mais la mise en scène se fait plus audacieuse, avec travellings et jeux sur la lumière, quasi inexistants jusque là dans son cinéma. Dans les dernières scènes, Chaplin ose même flirter avec la tragédie. Lui qui a déjà commencé à mêler rire et émotion dans plusieurs courts métrages s’aventure pour la première fois dans un cinéma plus dramatique, laissant deviner, derrière la moustache rassurante de Charlot, la sensibilité d’un acteur qui aura toujours besoin du masque du clown pour dévoiler sa face tragique.

Mais on est encore bien loin des Feux de la rampe. Charlot est toujours bien vivace, et malgré les tentations de tragédien, tout se termine avec le sourire, dans une pirouette finale rigolarde et pleine de vie.

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