Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour décembre, 2015

Jackie Brown (id.) – de Quentin Tarantino – 1997

Posté : 9 décembre, 2015 @ 2:00 dans * Thrillers US (1980-…), 1990-1999, DE NIRO Robert, TARANTINO Quentin | Pas de commentaires »

Jacky Brown

Entre Pulp Fiction et Jackie Brown, il y a plus d’un lien. D’un film à l’autre, Tarantino garde son goût pour les personnages barrés et verbeux, pour les dialogues interminables et quasi-absurdes, ou encore pour les chansons oubliées du folklore américain. Mais la reconnaissance immense obtenue avec son précédent film semble avoir libéré le cinéaste, qui s’aventure pour la première fois vers une narration à peu près classique.

Pour Jackie Brown, Tarantino garde un principe de chapitrage,qui rappelle qu’il s’agit de l’adaptation d’un roman (celui d’Elmore Leonard, co-producteur du film). Mais contrairement à Pulp Fiction, le film est d’une remarquable linéarité, à une exception près : la scène cruciale de l’échange, répétée à trois reprises avec des points de vue différents. Un procédé particulièrement efficace, mais finalement assez classique.

Mais, surprise, c’est lorsqu’il révèle une vraie sensibilité (honnêtement, pas flagrante dans ses deux premiers films) que Tarantino est ici le plus passionnant. Des revenants marqués par leur passé, le cinéaste en avait déjà filmé auparavant. Mais cette fois, il utilise le statut de Pam Grier et Robert Forster pour faire de leurs personnages des êtres moins marqués par leur passé que par leur avenir, et par la difficulté de se voir offrir une nouvelle chance.

Si Forster est remarquable en vieil ours solitaire, Pam Grier, l’ex reine de la blaxploitation, est sublime, bouleversante en hôtesse de l’air effrayée par son manque de perspective, à 44 ans. Il y a quelque chose de déchirant dans ce portrait sensible d’une femme à la croisée des chemins, qui transforme le piège mortel dans lequel elle se retrouve entraînée, en ultime chance de se construire un avenir.

Jackie Brown est du pur Tarantino, avec tout ce qu’on peut lui reprocher, en particulier des scènes trop longues basées uniquement sur les dialogues « à la Tarantino », un peu vaines et agaçantes. Mais on y retrouve surtout tout ce qui fait la richesse de son cinéma, et le plaisir simple que l’on y prend : son sens du récit, sa capacité à créer de grands moments de cinéma à partir de pas grand-chose (rien que le premier plan, fascinant travelling sur le profil de Pam Grier), et sa manière de prendre son temps pour nous introduire au plus près de ses personnages.

Et le directeur d’acteurs est exceptionnel. Pam Grier trouve là le rôle de sa vie, Robert Forster aussi sans doute. Tous sont formidables : Samuel Jackson en trafiquant parano, Michael Keaton en flic intraitable, Bridget Fonda en droguée téléphage, et surtout Robert De Niro, extraordinaire (et d’une sobriété rare) en ex-taulard taiseux et bas du fond, dont la subite explosion de violence, absurde, terrible et hilarante, est l’un des sommets de ce Tarantino là.

Dr Jekyll et Mr Hyde (Dr. Jekyll and Mr. Hyde) – de Victor Fleming – 1941

Posté : 8 décembre, 2015 @ 2:31 dans 1940-1949, FANTASTIQUE/SF, FLEMING Victor | Pas de commentaires »

Dr Jekyll et Mr Hyde

Ce n’est pas la première adaptation du roman de Stevenson, loin de là : Hollywood s’est intéressé dès 1913 à ce classique du fantastique victorien. Mais celle-ci est sans doute la plus ambitieuse. La présence de Victor Fleming en est la preuve : les précédents films du cinéaste sont Le Magicien d’Oz et surtout Autant en emporte le vent… Bref : Fleming est LE réalisateur le plus important du moment, celui à qui on confie les productions les plus luxueuses.

Pourtant, Dr Jekyll est loin des standards hollywoodiens, des belles valeurs prônées généralement par la machine à rêve. La manière dont le film confronte le Mal au Bien, la terrible violence des rapports humains, ou les rapports des hommes avec les femmes… Dans tous ces aspects, on est loin, très loin du politiquement correct.

Le sujet même du film (et du livre bien sûr) est audacieux : chacun de nous possède une part d’ombre, la capacité de faire le Mal. Et c’est tout le « bienfait » de cette potion concoctée par le bon Dr. Jekyll : révéler la nature du Mal si profondèment enfoui en lui. Et cette nature est terrifiante. Hyde n’est pas un simple criminel : c’est un être dénué de toute empathie, sadique et dominateur. Ses face-à-face avec Ingrid Bergman, victime incapable de se défaire de son emprise, sont réellement glaçants.

C’est de l’actrice que vient l’une des grandes idées du film. En toute logique, les producteurs avaient prévu de lui confier le rôle de la douce fiancée du bon docteur, jeune femme de la bonne société innocente et romantique à l’extrême. A Lana Turner, habituée aux rôles plus âpres, celui de la serveuse des mauvais quartiers qui aiment s’amuser avec les hommes… Mais Bergman voulait casser son image et, miracle, a obtenu que les rôles soient inversés.

Ce n’est pas qu’elle joue la « mauvaise fille » : il y a peut-être moins d’innocence, mais autant de bonté chez elle que chez la douce Lana Turner. Mais ce double contre-emploi souligne avec force la puissance de la destinée, l’importance d’être bien né. Pas si courant, et loin du supposé manichéisme hollywoodien.

Les acteurs sont formidables. Lana Turner n’a pas grand-chose à jouer à part la pureté et l’innocence, certes, mais elle est absolument parfaite. Et Ingrid Bergman est bouleversante en jeune femme tragique marquée par le destin. Quant à Spencer Tracy, omniprésent, il est simplement immense, aussi convainquant dans la sobriété de Jekyll que dans les excès de Hyde. La qualité du maquillage et des effets spéciaux ne fait que servir son jeu.

Et visuellement, le film est une splendeur, tourné dans un noir et blanc aux ombres profondes, comme cette séquence nocturne dans le parc, où Jekyll semble s’enfoncer constamment dans une brume profonde. La première scène de la transformation est également exceptionnelle. Durant de longues séquences, la caméra se glisse dans les coins les plus improbables de l’atelier pour ne filmer que des ombres, des reflets ou des silhouettes, avant de dévoiler peu à peu le visage monstrueux de Hyde : à travers un verre déformant, puis la buée d’un miroir. La révélation est saisissante…

Inspecteur Lavardin – de Claude Chabrol – 1986

Posté : 7 décembre, 2015 @ 2:08 dans * Polars/noirs France, 1980-1989, CHABROL Claude | Pas de commentaires »

Inspecteur Lavardin

Une suite dans la filmo de Chabrol ? Le fait est quasiment unique (il avait réalisé deux épisodes du Tigre dans les années 60 : Le Tigre aime la chair fraîche et Le Tigre se parfume à la dynamite), et on pourrait se dire que le cinéaste se plie aux lois du marché pour le coup… Mais Inspecteur Lavardin, semble plutôt répondre à une pure gourmandise, et au besoin de renouer avec les racines du cinéaste.

Tourné dans la foulée de Poulet au vinaigre, le film permet de retrouver ce flic faussement débonnaire incarné avec délectation par un Jean Poiret aussi séducteur qu’inquiétant. Un personnage qui a tellement plus à Chabrol (et au public) qu’il en tirera même une mini-série télé de quatre épisodes, toujours interprétée par Poiret sur le même ton.

C’est donc un retour aux sources pour le cinéaste, qui retrouve, à travers ce personnage tellement libre qu’il en devient cynique, son mordant vis-à-vis de la fameuse bourgeoisie de province, de ses codes et de son hypocrisie. Et la charge est sévère. Au point de paraître bien maladroite, quasi caricaturale, dans la première partie du film. Mais Chabrol finit par installer une atmosphère très… chabrolienne, dans ce microcosme rongé par les secrets et les mensonges.

Lavardin serait-il un alter ego de Chabrol ? On sent bien que le réalisateur se reconnaît dans ce personnage dont l’apparrente légèreté dissimule à peine la détestation de ce monde de mensonge et d’hypocrisie. Jusqu’à un face-à-face réjouissant et tendu avec un Jean-Luc Bidau parfait en faux-cul au bras long.

C’est aussi un retour aux sources parce que Chabrol retrouve deux acteurs qui ont marqué ses débuts, à l’éclosion de la Nouvelle Vague : Jean-Claude Brialy et Bernadette Lafont, en troublante émanation du passé. On retrouve aussi son goût (et celui de Lavardin) pour la bonne chair, et sa propension à aborder les sujets légers avec gravité, et les sujets sérieux avec dérision. A moins que ce ne soit le contraire…

LIVRE : Maurice Tourneur, réalisateur sans frontières – de Christine Leteux – 2015

Posté : 4 décembre, 2015 @ 3:11 dans LIVRES, TOURNEUR Maurice | Pas de commentaires »

Maurice Tourneur LIVRE

Maurice Tourneur a été l’un des cinéastes les plus importants d’Hollywood, au tournant de 1920. Maurice Tourneur est aussi l’un des grands cinéastes français les plus méconnus aujourd’hui. Un double-constat qui méritait bien une biographie, que signe avec passion et érudition Christine Leteux, déjà traductrice de La Parade est passée (le bel hommage de Kevin Brownlow au cinéma muet) et créatrice d’un blog passionnant consacré au muet et au début du parlant (Ann Harding’s treasures).

La forme est classique : de l’enfance parisienne de Maurice Tourneur à ses dernières années, le récit est strictement chronologique, et tourne majoritairement autour de la filmographie du cinéaste. Mais à travers ce parcours hors du commun, c’est tout un pan de l’histoire du cinéma qui revit au fil des pages (plus de 500, qui se dévorent avec passion et gourmandise).

La jeunesse de Maurice à Paris où, apprenti peintre, il pose pour Puvis de Chavanne. Ses débuts sur scène où il se fait un nom comme metteur en scène. Son départ pour Hollywood en 1914, les critiques qui ont suivi en France où certains lui ont violemment reproché de s’enrichir pendant que ses compatriotes se font tuer au front. Ses années de gloire où il dirige Mary Pickford et devient l’un des cinéastes les plus admirés d’Hollywood. Son retour en France au début du parlant, son parcours chaotique, son implication au sein de la firme Continental durant l’Occupation où il réalisera l’un des grands classiques du fantastique français (La Main du Diable)…

C’est l’homme aussi qui se dessine : ses comportement discutés durant les deux guerres, les femmes de sa vie, les frustrations du cinéaste privé de caméra à son retour en France puis dans ses dernières années, ou encore ses rapports tendres avec son fils Jacques. Devenu lui-même un grand cinéaste à Hollywood, sa réussite ravivera les regrets de Maurice, qui gardera jusqu’à la fin la nostalgie de ses années américaines, celles de la flamboyance et de la liberté.

* Maurice Tourneur, réalisateur sans frontières, de Christine Leteux, est publié dans la collection La Muse Celluloïd de La Tour Verte.

L’Indésirable (A tolonc) – de Michael Curtiz (Mihaly Kertesz) – 1915

Posté : 3 décembre, 2015 @ 5:30 dans 1895-1919, CURTIZ Michael, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

L'Indésirable

Michael Curtiz se fait encore appeler Mihaly Kertesz lorsqu’il réalise cette adaptation d’une pièce hongroise à succès de 1880, signée Ede Toth. Une vraie curiosité : la plupart des films de sa période hongroise ont disparu, une période qui s’achève en 1919, lorsque le réalisateur s’exile en Autriche. En attendant bien sûr sa grande période hollywoodienne, à partir de 1926.

Malgré l’utilisation de nombreux décors naturels, il y a quelque chose de très théâtral dans ce film dont la maîtrise technique du grand Curtiz est encore à peu près totalement absente. La caméra est systématiquement fixe et filme la scène de manière frontale, typique du cinéma des origines. Le jeu de la plupart des comédiens (grands noms de la scène hongroise) a également ce côté excessif et maniéré que l’on retrouvait beaucoup dans les premières années du cinéma.

Pourtant, il y a du rythme et de la vie dans ce pur mélodrame tire-larme, un habile travail sur le montage et une manière de mettre en scène l’action avec une grande efficacité. Quelques beaux jeux de lumière aussi, comme lorsqu’une porte s’ouvre et laisse entrer une lumière vive à l’écran, ou lors des longues marches dans la nature, entre la ville et le village, les deux pôles de cette histoire.

L’histoire, justement, y va franco côté pathos. Le film commence sur le lit de mort d’un homme qui, avant de passer de vie à trépas, avoue à sa fille qu’il n’est pas son vrai père : sa mère, qu’elle ne connaît pas, à tuer son père violent lorsqu’elle était encore gamine, et pourrit depuis en prison, à moins qu’elle ne soit morte.

Et voilà la jeune femme seule au monde, qui se fait embaucher comme servante dans une maison bourgeoise, avec le fils de famille qui tombe amoureux d’elle, et le père qui lui fait du gringue. Et pendant ce temps, la mère, toujours vivante, libérée après quinze ans de prison, et rêvant de retrouver sa fille…

Le ton est ouvertement tragique, mais avec quelques éléments de comédie qui viennent aérer ce drame franchement plombant. C’est ce mélange des genres qui séduit le plus dans ce film, comme les nombreux changements de rythme, et les passages constants entre des intérieurs un peu étouffants, et des extérieurs de toute beauté.

Un film de jeunesse, certes, loin de ses grandes réussites à venir… Mais L’Indésirable, longtemps disparu et retrouvé miraculeusement très récemment, est bien plus qu’une simple curiosité.

The Major (Maïor) – de Youri Bykov – 2013

Posté : 3 décembre, 2015 @ 3:04 dans * Polars européens, 2010-2019, BYKOV Youri | Pas de commentaires »

The Major

Elle n’est pas gaie, cette Russie au cœur de The Major : un pays glacial et sans joie, peuplé d’êtres tristes vivants dans des villes ouvrières sans charme et recouvertes d’une épaisse couche de neige. C’est dans ce décor que le film commence, par un faits divers tragiquement banal : un automobiliste qui roule trop vite pour retrouver sa femme sur le point d’accoucher, un enfant qui traverse la route, la neige qui interdit tout arrêt brusque…

A partir de ce terrible accident, Youri Bykov nous plonge dans la violence et la corruption de son pays. Il se trouve que l’automobiliste impliqué est un capitaine de police, et que pour le couvrir, ses collègues et supérieurs sont prêts à tout : mensonge, intimidation, meurtre même… Et au vu et au su de tous, qui plus est, et c’est là que le film de Bykov est le plus perturbant : lorsqu’il décrit cette loi du silence, ce poids si inhumain et imparable du pouvoir.

Pour son film (son deuxième long métrage), Youri Bykov choisit des tons quasi monochromes, sans la moindre couleur vive si ce n’est celle du sang qui tache la neige. Et ce n’est pas un hasard : dans ce pays où les citoyens se heurtent à la toute puissante des « officiels », l’espoir est une notion bien étrangère… Et le soudain réveil de conscience de notre « héros » n’y changera pas grand-chose.

D’une noirceur abyssale, le film est aussi passionnant que dérangeant. Il permet surtout de révéler l’incroyable talent de Youri Bykov, l’auteur, l’âme et l’incarnation de ce faux film noir construit comme un western tragique. Dans le rôle du cow-boy qui tente de se racheter une conduite, Denis Shvedov est parfait. Mais c’est Youri Bykov lui-même qui dévore l’écran dans le rôle du flic chargé des basses œuvres : un sale type, certes, mais dévoré par la lassitude, l’écœurement, et même la peur de se confronter lui-même à la violence.

Sa présence à l’écran et la profondeur qu’il apporte à ce personnage d’ordure absolue sont assez sidérantes. Acteur, réalisateur, scénariste, monteur du film, Youri Bykov est aussi le compositeur d’une musique totalement envoûtante qui fait beaucoup pour l’atmosphère unique du film. Un talent éclectique pour un film électrique… Youri Bykov est un cinéaste à suivre.

* DVD édité chez Luminor / Arcadès, avec peu de bonus : la seule bande annonce, et la présence du dossier de presse papier, avec notamment une interview de Youri Bykov.

Body Double (id.) – de Brian De Palma – 1984

Posté : 2 décembre, 2015 @ 1:16 dans * Thrillers US (1980-…), 1980-1989, DE PALMA Brian | Pas de commentaires »

Body Double

Sale journée pour l’acteur Jake Scully qui, en quelques heures, perd le petit boulot qu’il avait déniché, surprend sa femme au lit avec un autre, se retrouve à la rue sans savoir où aller, et tombe sur un type un peu louche qui lui propose de dormir dans un appartement de rêve avec vue plongeante sur une voisine qui lui offre un strip-tease chaque soir. Oui, ça sent le sale coup à plein nez…

Body Double est une étape importante dans la carrière de Brian De Palma : ce chef d’œuvre est le dernier de ses films purement hitchcockiens, ces films qui ont marqué sa filmographie entre les années 70 et le début des années 80 (Pulsions, Obsession…).

Comme s’il savait déjà qu’il n’y reviendrait plus sous cette forme, De Palma multiplie les références à son maître. Fenêtre sur cour bien sûr, pour l’argument de base, mais aussi et surtout Sueurs froides : moins pour la claustrophobie qui renvoie au vertige de James Stewart et qui paraît finalement assez anecdotique, que pour le motif de l’obsession qui trouble la perception, et pour ce jeu perpétuel sur les faux-semblants.

L’action se passe à Los Angeles, parce que la production cinématographique sert de toile de fond troublante à ce thriller virtuose. Mais on jurerait par moment que l’on est à San Francisco, tant l’atmosphère du film évoque le chef d’œuvre d’Hitchcock, en particulier lors de la longue séquence de la filature.

On pourrait ainsi évoquer longuement les références à Hitchcock, jusqu’à la présence de Melanie Griffith (fille de Tippi Hedren, l’héroïne des Oiseaux et de Marnie), et à la séquence de la douche qui clôt le film, avec intervention d’une doublure… comme dans Psychose.

Mais ce qui frappe surtout, c’est de voir à quel point De Palma s’approprie pleinement un film qui n’est pourtant que références, et à quel point il se dirige vers un pur cinéma de l’image. Car aussi machiavélique semble-t-elle, l’intrigue est finalement étonnamment simple, presque un prétexte à multiplier les moments de suspense durant lesquels le temps semble suspendu, étiré à l’envi.

Finalement, la comparaison la plus frappante avec le cinéma d’Hitchcock repose peut-être sur l’impressionnante maîtrise dont fait preuve De Palma, qui joue avec sa caméra (avec de longs et sublimes plans qui embrassent littéralement les personnages) et avec le spectateur avec le même plaisir gourmand. Son film se déroule dans le monde du cinéma ? Ce n’est pas un hasard: il ne parle que de la position du spectateur, et du plaisir de manipuler son monde. Troublant, et totalement jouissif.

* L’excellentissime éditeur Carlotta a choisi ce chef d’œuvre de Brian De Palma pour inaugurer sa nouvelle collection luxueuse : un DVD et un blue ray aux bonus passionnants (comme toujours chez cet éditeur), et accompagné d’un livre écrit par Susan Dworkin, qui évoque sur près de 200 pages la genèse du film, dont elle a pu suivre le tournage en 1984.

In another country (Da-reun na-ra-e-suh) – de Hong Sang-soo – 2012

Posté : 1 décembre, 2015 @ 6:41 dans 2010-2019, HONG Sang-soo | Pas de commentaires »

In another country

Une jeune Coréenne imagine trois histoires dont le personnage principal est à chaque fois une Française échouée dans une station balnéaire de Corée du Sud… Le prétexte à un film à sketch à l’ancienne? Pas si simple : même lieu, mêmes comédiens, situations analogues, et Isabelle Huppert au cœur de ce triptyque dans la peau de Anne, tantôt comédienne sur le point de retourner en France, tantôt femme de milliardaire attendant son amant, tantôt femme trompée cherchant un nouveau souffle…

Chacune de ces histoires serait totalement anecdotique, si toutes trois ne se répondaient pas et ne se complétaient pas d’une manière aussi envoûtante. Hong Sang-soo réussit là quelque chose de très beau : à travers ces trois fictions indépendantes, il parvient à créer une sorte de vérité profonde, comme si les trois « sketchs » étaient les couleurs primaires d’un procédé trichrome.

Les personnages changent à chaque fois, et particulièrement celui d’Isabelle Huppert. Mais ces petites histoires s’enrichissent les unes les autres. Un peu comme si le Alain Resnais de Smoking/No smoking rencontrait le Harold Ramis d’Un jour sans fin. Une alliance inattendue que le cinéaste coréen transforme en une fascinante expérience de cinéma.

Visuellement pourtant, le réalisateur choisit le dépouillement, avec des images souvent trop exposées, aucun gros plan, un rythme lent et des décors naturels familiers et anti-spectaculaires au possible : l’action se déroule en effet dans un cottage de vacances, aux abords de sanitaires, ou sur une plage déserte et froide… Pas vraiment glamour.

L’omniprésence d’Isabelle Huppert est le vrai sujet du film : sa beauté et sa grâce si purement cinématographiques, en contradiction avec tout ce qui l’entoure. Un contraste qui souligne cette notion de déracinement que l’on retrouve jusque dans le titre. Là aussi, Hong Sang-soo excelle : dans la manière qu’il a de filmer l’étranger, la barrière de la langue, et les attitudes différentes que l’on peut avoir en terre étrangère.

Ce triple portrait d’une femme qui se cherche, loin de ses racines et de sa culture, est parfois déroutant. Mais c’est un très beau film, simple et envoûtant.

12
 

Kiefer Sutherland Filmographie |
LE PIANO un film de Lévon ... |
Twilight, The vampire diari... |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | CABINE OF THE DEAD
| film streaming
| inderalfr