Indiana Jones et le Temple maudit (Indiana Jones and the Temple of Doom) – de Steven Spielberg – 1984
Après avoir créé un mythe, encore fallait-il le faire vivre… Pour cette première suite après le « miracle » de … l’Arche perdue, le tandem Spielberg-Lucas n’a pas choisi entre la fantaisie la plus légère et la violence la plus sombre : le Temple maudit est un pur film d’aventures avec son lot d’action échevelée et l’humour irrésistible du personnage ; c’est aussi, et de loin, l’épisode le plus noir, le plus dérangeant et le plus gore de la saga.
Le cocktail est curieux, parfois un peu indigeste, comme si Lucas et Spielberg avaient chacun voulu apposer leur signature, sans que les deux comparses n’arrivent à trouver une vision commune. D’ailleurs, le réalisateur ne cachera pas que ce deuxième « Indy » lui a quelque peu échappé, et regrettera ouvertement de ne pas en avoir fait un pur divertissement comme les autres films de la série.
La peur et le rire sont parfaitement imbriqués cela dit, mais s’ajoute à ce savoureux mélange des séquences limite gores (le cœur arraché, en particulier), et un aspect grand-guignol qui a plutôt mal vieilli. Comme les gags à répétition autour de l’étrange nourriture que les personnages sont obligés d’ingurgiter…
Mais Spielberg, réalisateur, nous offre de beaux, de grands moments de cinéma : de superbes images qui mettent en valeur les splendides décors naturels, et qui évoquent joliment les grands films d’aventure des années 50 du style Mogambo. On sait qu’Indiana Jones est né de l’amour des deux amis pour le vieux cinéma de genre hollywoodien. Avec ce deuxième opus, Spielberg et Lucas confirment cette approche cinéphile.
Dans la séquence d’ouverture, qui prend le contre-pied total du premier film, Spielberg semble même s’offrir un grand plaisir en évoquant à la fois la comédie musicale, le film noir, le film d’aventures… et la saga James Bond, dont Spielberg rêvait de réaliser un épisode au début des années 80.
Après ces vingt premières minutes complètement folles, le film continue à se démarquer des Aventuriers… : alors que, dans le précédent film, Indy était lancé dans une sorte de voyage perpétuel, cette « suite » (dont l’action se déroule curieusement en 1935, un an avant celle du premier film) renonce aux voyages : la quasi-totalité du film se déroule en effet à l’intérieur même d’une montagne, loin donc des grands espaces auxquels on avait déjà attaché le héros le plus mythique de la décennie.
Dans le rayon des surprises, il y a aussi les « sidekicks » d’Indy, qui confirme son caractère d’aventurier un rien goujat et irresponsable, puisqu’il entraîne dans ses aventures une belle blonde tête à claque (Kate Capshaw, qui allait devenir Mme Spielberg) et un gamin débrouillard (le petit Asiatique qu’on reverra dans Les Goonies), sources intarissables de comédie.
Mais le plus drôle, et le plus intense à la fois, c’est Harrison Ford, une nouvelle fois génial dans le rôle de sa vie. Aussi à l’aise dans l’action pure que dans la comédie, Ford est formidable lorsqu’il donne à son archéologue des airs outrés ou lorsqu’il affiche son petit sourire satisfait. Même dans un film bancal et inégal comme celui-là, le plaisir de le voir enfiler les frusques d’Indiana Jones est immense, et rare.
* Voir aussi : Les Aventuriers de l’Arche perdue, Indiana Jones et la Dernière Croisade, Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal et Indiana Jones et le cadran de la destinée.