Un Tramway nommé Désir (A Streetcar named Desire) – de Elia Kazan – 1951
Le film étendard de la méthode Actor’s Studio : celui qui a inspiré des dizaines de réalisateurs et d’acteurs, et qui a fait de Marlon Brando une immense star. Il faut dire que ses apparitions dans Un tramway nommé Désir imposent d’emblée la bestialité et la puissance impressionnante de ce comédien excessif et génial.
Le « désir » qui conduit directement à la station cimetière, comme le dit trop explicitement une tirade au début du film, c’est lui, Brando. Sa présence animale, ses postures hyper sexuées, son corps constamment en sueur, sont autant d’anomalies dans l’univers mental de Blanche Dubois, cette femme abîmée qui se fantasme en jeune fille pure et bien comme il faut, mais dont le passé n’est qu’une série d’épreuves qui n’ont laissé que des ruines dans son esprit…
Le rôle de Blanche a valu à Vivien Leigh son deuxième Oscar. Elle en fait pourtant des tonnes, elle qui fut si sobre et bouleversante dans Waterloo Bridge. Mais l’excès de son jeu colle parfaitement au ton que Kazan donne à son film : rien n’est raisonnable dans cette Nouvelle Orléans de studio. Son but n’est pas de signer une oeuvre réaliste, mais d’illustrer le cheminement inexorable de Blanche vers la folie.
Esthétiquement, le film est ainsi une splendeur. Sans prendre la peine d’effacer la construction théâtrale du texte de Tennessee Williams (que Brando avait joué sur scène sous la direction de Kazan, déjà), le cinéaste stylise la misère, la violence, la crudité. Le superbe noir et blanc illustre merveilleusement le contraste entre la réalité et ce que Blanche en perçoit.
Comme l’amour raisonné de Karl Malden contraste avec l’abandon désespéré de Vivien Leigh, et la douceur apparente de Kim Hunter contraste avec la fureur de Brando. Entre ces deux-là, la passion est physique et sexuelle. Brutale et absolue. Et on n’est pas prêts d’oublier ce hurlement à peine humain de Brando : « Steeeeelllaaaaaa !!!! » Et l’étreinte incroyable qui suit.
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