Le Doulos – de Jean-Pierre Meville – 1962
« Salut les hommes, et tant pis si je me trompe. » Cela sonne presque comme du Audiard, mais c’est à Melville qu’on doit cette réplique mythique, et c’est Serge Reggiani, raide et mutique, qui la prononce en entrant dans la cellule où va se nouer définitivement son destin, sans qu’il le réalise lui-même avant qu’il soit trop tard.
Le Doulos porte déjà en germe tout ce qui fera la grandeur des grandes œuvres noires et de plus en plus dépouillées du cinéaste, du Deuxième Souffle à Un Flic. Plus il abordera le polar (ou le film de gangster), plus il approchera l’épure, jusqu’à frôler l’abstraction, avec des personnages de plus fermés et silencieux. Et toujours avec cet extraordinaire sens de la mise en scène, et du mouvement dans le cadre.
Il y a déjà tout cela dans Le Doulos : une manière unique de filmer des décors dont on est bien incapable de dire s’ils sont naturels ou de studios ; une tension de chaque instant qui naît des silences ou des non-dits derrière des dialogues viriles ; un sens de l’honneur et une amitié virile où les femmes n’ont pas leur place…
Mais Le Doulos n’a pas encore la simplicité des grands films à venir. Il repose sur des procédés qu’il banira à peu près systématiquement à l’avenir, basant notamment son récit sur des faux semblants, et un mensonge par ommission qui pèse sur la perception que l’on a du personnage du « doulos » (a.k.a. la balance) joué par Jean-Paul Belmondo, dans la période la plus passionnante de sa carrière.
Très originale aussi, la manière dont le point de vue central passe de Serge Reggianni, braqueur fraichement sorti de prison et bien décidé à se venger, à Belmondo, impassible et intense. Une construction qui donne au Doulos une dimension unique dans l’œuvre melvilienne. Bien plus qu’une ébauche : une passionnante étape dans l’élaboration de son style unique.
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