Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour le 12 décembre, 2014

Joies matrimoniales / M. et Mme Smith (Mr. and Mrs. Smith) – d’Alfred Hitchcock – 1941

Posté : 12 décembre, 2014 @ 3:31 dans 1940-1949, HITCHCOCK Alfred | Pas de commentaires »

Joies matrimoniales

En évoquant Mr and Mrs Smith dans ses entretiens avec François Truffaut, Hitchcock disait qu’il n’avait tourné le film que par amitié pour Carole Lombard : « Comme je ne comprenais pas le genre de personnages qu’on montrait dans ce film, je photographiais les scènes telles qu’elles étaient écrites. » Autant dire loin de la méthode habituelle du maître du suspense, dont le scénario n’est généralement qu’une base de l’écriture visuelle du film.

De fait, Mr. and Mrs Smith est une exception dans la filmographie si cohérente d’Hitchcock : sa seule vraie « comédie américaine », un genre dont il ne disputera pas la domination à Howard Hawks ou Preston Sturges… Pas que le film soit un ratage complet, non. S’il était réalisé par un autre qu’Hitchcock, on saluerait la vivacité de l’histoire et l’originalité des personnages, couple qui a décidé de ne jamais quitté la pièce où ils se trouvent après une dispute dans s’être réconciliés (ce qui peut prendre des jours), et qui réalise que, suite à un improbable problème administratif, ils ne sont pas vraiment mariés.

C’est vrai qu’on ne s’ennuie pas une seconde, qu’on sourit souvent avec un vrai plaisir, que Robert Montgomery est parfait en faut flegmatique et vrai amoureux transi, et que Carole Lombard est délicieusement insupportable. Et ne vous y méprenez pas : Mr. et Mrs Smith est une belle comédie, très inventive et sans le moindre temps mort. Mais on a tellement l’habitude d’utiliser des superlatifs avec Hitchcock qu’on est  un peu frustré ici. Il manque à cette comédie la folie que savait donner au genre le Hawks de La Dame du Vendredi, ou le Lubitsch de Jeux dangereux.

Le Récif de corail – de Maurice Gleize – 1938

Posté : 12 décembre, 2014 @ 3:27 dans 1930-1939, GABIN Jean, GLEIZE Maurice | Pas de commentaires »

Le récif de corail

Dans les deux ou trois ans qui ont précédé la guerre, Jean Gabin a tourné avec les plus grands cinéastes, enchaînant quelques-uns des plus grands chefs d’oeuvre du cinéma français : Pépé le Moko de Duvivier, Gueule d’amour de Grémillon, La Grande Illusion et La Bête humaine de Renoir, Le Quai des brumes et Le Jour se lève de Carné ! Une liste hallucinante au milieu de laquelle il faut rajouter ce Récif de corail dont je n’avais jamais entendu parler, réalisé par un Maurice Gleize dont j’avoue ne rien connaître.

Un faux pas dans cette série magique ? Certainement pas, parce que malgré ses quelques défauts, et même si le film ne bénéficie pas d’une atmosphère aussi exceptionnelle d’un Quai des brumes par exemple, on aurait tort de sous-estimer ce Récif de corail, qui offre à Gabin l’un de ces personnages marqués par le destin et condamnés par la société qu’il enchaînait à l’époque.

Adapté (par Charls Spaak) d’un roman de Jean Martet, Le Récif de corail empreinte à une longue tradition de fictions françaises, que ce soit romanesque ou cinématographique : le film évoque tour à tour Les Misérables (pour le personnage du flic coriace, interprété par un Pierre Renoir assez inoubliable, silhouette inquiétante avec son long ciré noir) ou Le Hussard sur le toit (pour la séquence de l’épidémie), et s’inspire du fameux réalisme poétique très prisé par le cinéma français d’alors.

Gabin est un homme dont on ne sait rien, si ce n’est qu’il cherche à quitter secrètement l’Australie, où il a tué un homme. S’engageant sur un bateau, il sert de bouc-emissaire à des traficants, rencontre un ermite qui l’invite à le rejoindre sur son île paradisiaque, frôle le Mexique avant de retourner malgré lui en Australie où il échoue dans une région touchée par une épidémie mortelle, où il rencontre un belle jeune femme qui vit loin de la civilisation, fuyant un mystérieux passé…

On le voit, l’histoire ne lésine pas sur les rebondissements et les coups du destin. Trop, sans doute : les multiples épisodes ne donnent guère le temps de se poser. Et le personnage féminin, interprété par Michèle Morgan (l’occasion de reformer le couple déjà mythique du Quai des brumes), manque cruellement d’épaisseur. Mais il ne faut pas bouder son plaisir : Le Récif de Corail est un film d’aventures vif et plein de surprises, qui met en scène des personnages marqués par le destin, mais avec une bienveillance et un optimisme rares à cette époque.

De rouille et d’os – de Jacques Audiard – 2012

Posté : 12 décembre, 2014 @ 3:20 dans 2010-2019, AUDIARD Jacques | 1 commentaire »

De rouille et d'os

Deux éclopés renaissent à la vie grâce à leur rencontre. Lui vit de petits boulots et de combats clandestins, et doit s’occuper de son fils de 5 ans dont il ne connaît à peu près rien. Elle est une dresseuse d’orque qu’un tragique accident prive de ses jambes… Le sujet est casse-gueule, promettant de belles envolées lyriques et de grandes scènes tire-larmes… Jacques Audiard en tire un chef d’oeuvre à la fois brut et délicat, sans artifice et d’une beauté sidérante.

Audiard filme Marion Cotillard amputée de ses jambes comme la regarde le personnage joué par Matthias Schoenaerts : avec naturel, sans s’appitoyer et sans s’apesantir. Comme si ce handicap n’était qu’un accident de la vie, et pas une fin en soi. Confiant en son sujet (tiré d’un roman de Craig Davidson), Audiard n’évite aucune des scènes attendues. Mais il les filme avec une sobriété radicale, pas comme « les grands moments à ne pas rater ».

Cette simplicité renforce la beauté de la rencontre. Elle rend aussi certaines scènes particulièrement éprouvantes. Parce qu’on le sait proche mais que la vie semble se dérouler normalement, l’imminence de l’accident en devient quasiment insupportable. Et pour filmer Marion Cotillard découvrant l’absence de ses jambes, il filme la chambre d’hôpital en plan large, sans artifice, retardant le moment de la découverte. Pas besoin de souligner quoi que ce soit, Audiard se place, avec pudeur, à la place du spectateur.

Si le film est aussi beau, c’est que ses deux personnages principaux sont passionnants, et parce qu’ils sont interprétés par deux comédiens en état de grâce. Schoenaerts, une découverte, et Marion Cotillard, qui n’a peut-être jamais été aussi bien que dans ce rôle difficile et franchement piège. Une femme perdue, clouée dans un fauteuil, fermée à la vie, qui se relève grâce à la rencontre avec ce type frustre et bestial qui la traite comme une femme, et non comme un freak.

Mais lui aussi a besoin d’être sauvé. Comme elle est prisonnière d’un corps estropié, lui est perdu dans un corps trop plein d’une énergie dont il ne sait que faire. Un type perdu, prêt à abandonner la partie. Il faut le voir durant un combat particulièrement violent, à terre, acceptant les coups avec fatalité, reprendre soudain le dessus et se redresser parce que son regard est tombé sur Stéphanie (Marion Cotillard), debout sur ses prothèses, boosté par sa volonté à elle.

C’est à une double renaissance que l’on assiste. Ces deux êtres paumés et paniqués par la vie qui les attendait, se trouvent et se reconstruisent. Pas si facile, pour ces deux écorchés, qui devront affronter leurs propres démons. Pour lui surtout, peut-être le plus largué des deux, qui devra accepter son amour pour elle, et son rôle de père, ce qu’il fera avec une rage déchirante (et avec ses poings), avant de s’ouvrir enfin dans une scène d’une simplicté et d’une beauté absolument sublimes…

Crise (Krisis) – de Ingmar Bergman – 1946

Posté : 12 décembre, 2014 @ 2:55 dans 1940-1949, BERGMAN Ingmar | Pas de commentaires »

Crise

Premier film de Bergman réalisateur et déjà, on remarque l’importance extrême des visages, et quelques gros plans évocateurs qui en disent plus que de longs dialogues. On trouve aussi des thèmes qui reviendront dans tout le cinéma bergmanien : le film, poignant, parle de la difficulté de communiquer, de la nostalgie de ce qui n’est plus, et de la peur abyssale de la solitude. La peur, aussi, de n’aimer les autres que pour soi-même, et pas par pur altruisme.

Bergman installe son histoire dans un petit village comme hors du temps. Une voix off dit bien que rien ne vient jamais altérer cette vie tranquille et sans aspérité : ni commerce, ni train, ni rien… Tout juste un bus qui, ce jour-là, amène le tumulte de la grande ville : une femme entre deux âges qui vient reprendre la fille qu’elle n’a pas élevée, préférant la confier à une vieille fille.

Ce sont trois femmes à la croisée des chemins, et trois femmes terrorisées par l’avenir. La jeune fille anxieuse de devenir une femme, la mère adoptive malade (même physiquement) à l’idée de vieillir seule, et la mère biologique qui ne récupère sa fille que parce qu’elle a fait le même constat, consciente que sa vie de séduction et d’aventures est derrière elle.

Entre ces trois-là, malgré les longues discussions, il y a toujours quelque chose de non-dit, une incapacité à se livrer totalement. Quelques effusions presque arrachées quand même, suffisamment pour qu’on devine ce que cachent ces visages un peu fermés.

Bergman avait déjà fait ses preuves en tant que scénariste. Il révèle déjà une vraie vision de cinéaste, utilisant des figures qui reviendront tout au long de sa carrière : ses fameux dialogues cadrés avec un visage de face et l’autre de profil, les deux semblant fixer le vide. Et déjà, même si on est loin du dépouillement de ses grands films à venir, c’est quand il se concentre sur ces visages que l’émotion est la plus forte.

Cette belle oeuvre de jeunesse est déjà hantée par tout ce qui fera la grandeur du cinéma bergmanien, et par tous ses grands thèmes, de la hantise du temps qui passe à l’incommunicabilité entre les êtres, même les plus proches.

Escrocs mais pas trop (Small Time Crooks) – de Woody Allen – 2000

Posté : 12 décembre, 2014 @ 2:52 dans 2000-2009, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Escrocs mais pas trop

Ce Small Time Crooks n’est sur le papier qu’une petite fantaisie sans grande envergure. Et c’est effectivement un Allen très mineur. Médiocre, même, dans la première demi-heure, parodie lourdingue et pas vraiment drôle du film de braquage, histoire d’une bande de pieds nickelés qui veulent creuser un tunner pour pénétrer dans le coffre d’une banque.

« - Danny n’est pas stupide parce qu’il conduit un camion.
- Non, Danny est stupide parce qu’il a un QI d’idiot »

C’est la première fois qu’on a cette impression, mais Woody lui-même semble ne pas vraiment y croire, comme s’il faisait son film uniquement parce qu’il fallait bien tenir le rythme d’un long métrage par an. Franchement, fallait pas.

Le personnage qu’il interprète n’est pas tout à fait le névrosé libre et cynique que l’on aime : un escroc un peu idiot et un peu ridicule, à qui Woody Allen scénariste fait jouer le faire-valoir de Tracey Ullman, qui a droit aux meilleures répliques alleniennes.

« - Qu’est-ce que tu dirais si je t’annonçais que tu es mariée à un vrai génie ?
- Je dirais que je dois être bigame. »

L’histoire de gangsters n’intéresse visiblement pas le cinéaste, qui l’expédie en une petite scène un peu baclée pour passer à autre chose, un peu plus consistant. Pour servir de couverture à leur opération, les apprentis creuseurs de tunnel ont ouvert une boutique de cookies, qui marche du feu de dieu, et finit par faire d’eux des millionnaires.

Et là, au bout d’une bonne demi-heure, on voit enfin ce qui a intéressé Woody Allen : la possibilité de plonger ses bras cassés dans un univers très chic qui n’est pas le leur. C’est parfois un peu lourd, parfois amusant, souvent très en deça de ce que le réalisateur a l’habitude de faire (jusque dans son précédent film, Accords et désaccords, pourtant très inspiré).

Il y a quand même quelques bons moments : Hugh Grant jouant les professeurs Higgins avec Tracey Hullman – Miss Doolittle et son balourd de mari (Woody). La visite du musée, surtout, est très drôle : « Je ne veux pas aller dans les musées, ça me fout la trouille toutes ces vierges. »

Finalement, ce qui frappe le plus, c’est la tendresse qui se dégage de la dernière partie, de la part d’un Woody Allen qui semble tout d’un coup assagi, voir fatigué. Juste désireux de retrouver celle qu’il aime, soudain débarrassé de sa libido envahissante. Tendre et un rien nostalgique.

 

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