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Archive pour le 10 décembre, 2014

La Rose noire (The Black Rose) – de Henry Hathaway – 1950

Posté : 10 décembre, 2014 @ 3:06 dans 1950-1959, HATHAWAY Henry | Pas de commentaires »

La Rose noire

Curieux film qui commence dans l’Angleterre livrée à une lutte fratricide entre Normands et Saxons, avec l’histoire assez classique d’un jeune seigneur qui se rebelle contre un roi (Michael Rennie, décidément très présent dans les films de la Fox de cette époque) qu’il ne reconnaît pas.

Mais au bout d’une demi-heure, le ton change, et le décor aussi. Le jeune seigneur (Tyrone Power) part à l’autre bout du monde pour découvrir le « Cathay » (la Chine). On est alors dans un grand film d’aventures exotiques. Sur sa route, le jeune Saxon croise la route d’une jeune Anglaise (Cécile Aubry, étrange et un peu agaçante dans son seul rôle hollywoodien), du terrible Khan (Orson Welles dans sa veine « plus je me maquille, moins je force mon talent »), de la Grande Muraille, des tentes dans le désert et des grands palais asiatiques…

On reste par moments un peu dubitatifs face au destin de cet homme. Mais le talent d’Hathaway est bien là, qui transforme quelques séquences a priori anecdotiques en beaux moments de cinéma, en particulier les passages les plus « virils » : l’épreuve de la corde ou celle du tir à l’arc notamment. On le sent nettement moins passionné par la romance, qui paraît hors sujet.

Idem pour la psychologie du personnage principal. Son voyage à travers le monde est surtout pour lui le moyen d’aller vers la paix intérieure et la réconciliation. Mais ce voyage psychologique intéresse bien moins Hathaway que le souffle de l’aventure.

• Le film d’Hathaway vient d’être édité parmi neuf autres productions de la Fox, dans la collection Hollywood Legends.

Accords et désaccords (Sweet and Lowdown) – de Woody Allen – 1999

Posté : 10 décembre, 2014 @ 3:03 dans 1990-1999, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Accords et désaccords

L’hommage de Woody Allen, lui-même clarinettiste, à la musique qu’il a toujours aimé : le jazz. Un film plein de musique, donc, et dont le personnage principal est un musicien désaxé et névrosé. Un looser égocentrique, odieux et génial, tel que le présente Woody lui-même, qui apparaît dans son propre rôle, racontant avec quelques « témoins » et spécialistes les grandes heures du musicien. Un sale type, sous bien des aspects, mais dont les pires défauts cachent une sensibilité et un mal-être touchants.

Sean Penn est parfait dans le rôle d’Emmet Ray, un être suffisant capable des pires comportements et assumant ses excès comme étant la rançon du génie, mais dont la carapace se fend face à « l’idiote muette », craquante Samantha Morton, jeune femme si banale qui lui révèle sa propre part d’enfance.

Emmet Ray est aussi un homme grotesque, qui passe ses moments libres à abattre des rats dans les décharges ou à observer les trains qui passent. Risible, lorsqu’il réalise son « rêve » : apparaître sur scène à cheval sur une lune… Woody Allen le filme tel qu’il est, mais porte sur lui un regard certes sévère, mais aussi attendri. Car il y a de l’or dans les doigts de ce type : quelle beauté lorsqu’il a la guitare à la main.

Woody Allen n’épargne rien à ce type franchement détestable, mais il révèle son humanité à fleur de peau. Et il se reconnaît en lui (même si Sean Penn prend le contre-pied de Kenneth Branagh qui, dans Celebrity, était une sorte de double rajeuni de Woody) : ce n’est pas un hasard si son environnement nous est si familier, entre la maison sous le grand-huit (Radio Days) et les retrouvailles sur un banc face au fleuve (Manhattan).

Il y a un peu de Woody Allen dans Emmet Ray. Et pas la peine de se précipiter vers sa discographie : le « deuxième plus grand guitariste du monde (après Django, ce « gitan français ») n’existe pas, pas plus que le Lewyn Davis des frères Coen (la parenté entre les deux films est assez flagrante). Une invention de Woody pour son cri d’amour au jazz, l’un de ses très, très beaux films.

Monte là-dessus (Safety Last !) – Fred C. Newmeyer et Sam Taylor – 1923

Posté : 10 décembre, 2014 @ 2:59 dans 1920-1929, FILMS MUETS, LLOYD Harold, NEWMEYER Fred C., TAYLOR Sam | Pas de commentaires »

Monte là dessus

La postérité n’a pas placé Harold Lloyd à la place qu’il mérite : aux côtés de Chaplin ou Keaton, les deux autres grands géants du burlesque muet. Lloyd, pourtant, n’a rien à leur envier. Son personnage n’est ni aussi lunaire que Keaton, ni aussi romantique que Chaplin. Mais comme eux, il joue aussi bien de son visage que de son corps, avec lequel il réalise des prouesses qui, aujourd’hui encore, sont stupéfiantes.

La preuve avec l’image la plus célèbre de toute l’oeuvre de Lloyd, celle que chacun connaît même sans savoir à qui l’attribuer : ce personnage élégant et irréel avec son canotier et ses lunettes rondes, accroché aux aiguilles d’une horloge sur la façade d’un immeuble, à des dizaines de mètres au-dessus de la ville. Une image tirée de Safety Last !, porte d’entrée parfaite pour découvrir l’univers d’Harold Lloyd.

C’est l’histoire d’un gars de la campagne qui monte à la ville, fait croire à sa fiancée restée dans leur village qu’il a fait fortune, et se retrouve obligé, suite à une série d’événements, d’escalader la façade du grand magasin où il travaille. Cette escalade d’autant plus hallucinante qu’elle joue constamment sur la profondeur de champs et sur la sensation de vertige (sans doute avec l’utilisation de transparence, mais si c’est bien le cas, le trucage est absolument invisible), et sur un Lloyd aux capacités physiques hors du commun qui joue merveilleusement le maladroit.

Tout lui arrive durant cette longue ascension, clou annoncé du film : des pigeons trop présents, un faux braquage, une course-poursuite avec un policier, des voisins plus ou moins amicaux… et même l’attaque d’un chien méchant ! Cette longue séquence est à elle seule un chef d’oeuvre de mise en scène et de créativité, qui suffit pour comprendre la différence entre Lloyd et les autres stars du burlesque.

Mais ce n’est que le clou d’une comédie hallucinante et jubilatoire, où les gags s’enchaînent à un rythme fou, jouant sur la maladresse de Harold, et sur ses extraordinaires capacités physiques. Avant cette escalade, il y a bien d’autres grands moments : une course contre la montre dans les rues de New York, ou une série de quipropquos dans les travées du grand magasin, qui sont l’occasion de gags hilarants et souvent spectaculaires.

Dès la première image, le génie de Lloyd est frappant : son visage apparaît derrière des barreaux, une potence se dessinant derrière lui. Les derniers instants d’un condamné à mort ? Mais non, la caméra s’éloigne alors, le cadre s’agrandit, et dévoile la vérité : Harold est à la gare et fait ses au-revoirs à sa famille. C’est alors un feu d’artifice de maladresses : Harold s’empare d’un porte bébé (avec le bébé of course) au lieu de sa valise, puis monte dans une charette au lieu de son train…

Le film n’est commencé que depuis quelques minutes, et les fous rires s’enchaînent déjà. Safety Last ! garde tout son pouvoir comique.

• Carlotta a édité un magnifique coffret regroupant 16 longs métrages d’Harold Lloyd (muets et parlants), quelques courts, et des bonus toujours passionnants.

Femme ou maîtresse (Daisy Kenyon) – d’Otto Preminger – 1947

Posté : 10 décembre, 2014 @ 2:54 dans 1940-1949, PREMINGER Otto | Pas de commentaires »

Femme ou maîtresse

Preminger a signé quelques-uns des grands films noirs de la décennie (de Laura à Mark Dixon détective). Il en gare les mêmes codes visuels et narratifs, avec de grands moments d’angoisse, et le même acteur iconique (Dana Andrews) avec ce drame romantique qui dynamite les codes du triangle amoureux.

Une femme trop romantique, un homme trop sûr de son pouvoir de séduction, un autre trop timoré… On pourrait tenter de décrire en quelques mots chacun de ces personnages, mais ce serait la promesse de tomber à côté de la réalité : chacun d’entre eux est bien plus complexe que ce qu’il semble être au premier abord, et leurs relations sont elles aussi particulièrement intenses et inattendues.

Henry Fonda mystérieux et attachant, Joan Crawford intense en pure héroïne romanesque, et surtout Dana Andrews, exceptionnel en homme cynique et incapable d’assumer ses responsabilités de père et de mari, capable de la pire cruauté.

Il faut le voir dans une séquence particulièrement cruelle où, affichant un large sourire, il remet en cause le rôle et l’autorité de sa femme devant leurs enfants. Cette scène-là, si banale en apparence, en dit long sur la cruauté et l’égoïsme de cet homme, et sur la capacité de sa femme de tout encaisser pour sauver sa place dans la société. Elle vaut tous les films noirs du monde.

• Cette perle méconnue de Preminger vient d’être éditée parmi neuf autres productions de la Fox, dans la collection Hollywood Legends.

Monuments Men (id.) – de George Clooney – 2014

Posté : 10 décembre, 2014 @ 2:51 dans 2010-2019, CLOONEY George | Pas de commentaires »

Monuments Men

George Clooney acteur a quelque chose, au choix, de Clark Gable, Cary Grant, voire Gary Cooper selon les films (jusqu’aux initiales…). Réalisateur, il s’inscrit dans la tradition du cinéma classique hollywoodien, signant des films qui évoquent l’âge d’or des grands studios. Il faut reconnaître à Clooney cinéaste un ton qui lui est propre, avec une vraie légéreté mêlée à de soudains accès de gravité, sur des sujets forts. Celui-ci l’est sans aucun doute.

Monuments Men est un film séduisant, mais qui a un côté pastiche involontaire qui en fait un hommage un peu trop appuyé aux grands maîtres d’autrefois. Et puis Clooney, s’il sait choisir ses sujets, n’a sans doute pas la carrure nécessaire pour en tirer toutes leurs possibilités. L’idée, ici, est excitante : raconter l’histoire de ces spécialistes de l’art qui parcourent l’Europe au lendemain du débarquement pour retrouver et sauver les œuvres volées par les nazis, tandis que les militaires se battent pour la libération.

Un sujet passionnant, et authentique (même si le film limite l’équipe à une poignée d’hommes, alors qu’ils étaient plusieurs dizaines dans la réalité), mais Clooney semble ne pas être tout à fait sûr de lui, soulignant constamment, et un peu lourdement, à la fois la grandeur de l’art et l’immensité de la perte, et son côté dérisoire par rapport aux innombrables vies perdues.

Les passages les plus forts concernent d’ailleurs bien des objets, mais pas des œuvres d’art : un entrepôt regroupant les mobiliers et biens des familles juives dans d’interminables raillonages, ou un baril rempli de dents en or…

Sympathique et plutôt réussi, le film n’en est pas moins très sage. Même les acteurs semblent bridés. Matt Damon semble heureux d’être là, mais sans avoir grand-chose à jouer. Et les géniaux John Goodman et Bill Murray restent constamment en retrait. Jean Dujardin, lui, est très bien.

• DVD chez Fox, avec quelques bonus promotionnels sympathiques, mettant en valeur les différents comédiens.

Aguirre, la colère de Dieu (Aguirre, der Zorn Gottes) – de Werner Herzog – 1972

Posté : 10 décembre, 2014 @ 2:48 dans 1970-1979, HERZOG Werner | Pas de commentaires »

Aguirre la colère de dieu

Documentariste génial, auteur de quelques fictions restées confidentielles, Werner Herzog trouve son alter ego monstrueux qui lui inspire son premier grand classique, une oeuvre hallucinante et fascinante dont Klaus Kinski est l’incarnation délirante. Difficile de dissocier le cinéaste et l’acteur quand on évoque Aguirre, tant la folie de l’un semble avoir imprégné l’autre. La seule question semblant être : qui imprègne qui ?

Les deux hommes en tout cas, dont on connaît les relations tourmentées, atteignent une dimension presque mystique avec ce film. L’acteur devient une icône après des années de seconds rôles et de séries B, C… voire Z. Quant à Herzog, c’est un cinéma presque total qu’il livre ici. Sans grand moyen apparent, uniquement en décors naturels, délaissant volontairement tous les artifices habituels du cinéma d’aventure, il signe une lente avancée vers nulle part, où l’art cinématographique ne dépend plus de rien d’autre.

L’histoire est résumée à un contexte : au 16ème siècle, un petit groupe de conquistadors s’enfonce dans la forêt vierge, à la recherche du mythique Eldorado. En confrontant ces hommes avides à la nature immense et menaçante qui les entoure (les Indiens restent constamment invisibles, comme si c’était la forêt qui s’attaquait à eux), le cinéaste cerne mieux qu’avec de grands moments debravoures ou de longs dialogues l’isolement de plus en plus insupportable, et la folie qui guette, jusqu’à tout envahir.

On n’est pas prêt d’oublier cette ultime image d’Aguirre seul sur son canot envahi de singes, continuant à faire des plans pour trouver cet Eldorado mythique et atteindre à la gloire, à l’immortalité.

Les Rescapés du Futur (Future World) – de Richard T. Heffron – 1976

Posté : 10 décembre, 2014 @ 2:45 dans 1970-1979, FANTASTIQUE/SF, HEFFRON Richard T. | Pas de commentaires »

Les Rescapés du futur

Mondwest avait été l’un des grands succès de 1973, son habile mélange de science-fiction et de western, inédit jusque là, lui valant même l’objet d’un petit culte qui reste vivace quarante ans plus tard. Un statut un peu usurpé, l’idée de départ étant nettement plus excitante que le film lui-même. Malgré ce concept plein de possibilités, une suite était-elle nécessaire ? Après avoir ce Future World, la réponse est claire : non, en tout cas pas cette suite-là.

Le film a le même problème que l’original : il se base sur une idée forte, dont les scénaristes, au fond, ne savent pas vraiment quoi faire. Résultat : une heure quinze de pas grand-chose et de pseudo-mystère (perso, j’ai compris en dix minutes à peine que les invités prestigieux du parc d’attraction allaient être remplacés par des « copies »), et quinze minutes d’affrontements mous du genoux avec quand même une deuxième idée forte, l’opposition des deux héros et de leurs clones respectifs.

Le film de Crichton avait quand même des personnages intéressants, et faisait monter l’angoisse crescendo avec ce robot frustré incarné par Yul Bryner. Ici, rien de tel. Les personnages sont mal dessinés, et Peter Fonda et Blythe Danner n’y peuvent rien. Crichton, lui, s’est totalement retiré du projet, mais recyclera son idée de parc futuriste tournant au carnage dans un roman qui connaîtra un petit succès : Jurassic Park.

Et puis il y a un aspect totalement impardonnable dans Future World : avoir ressorti des cartons le déjà iconique « gunslighter » pour une unique raison, placer le nom et la trombine de Yul Bryner en bonne place (voire la première) sur les affiches et la bande annonce. Forcément, on attend le truc de scénariste qui va réanimer le robot tueur. Mais non : le pauvre Yul n’apparaît que quelques minutes pénibles dans une séquence de rêve aussi inutile que grotesque. Et dire que c’est la dernière apparition de Bryner au cinéma… Cruel !

• Le film a été édité récemment chez Sidonis, avec le nom et le visage de Yul Bryner occupant la première place sur la jaquette…

Stanley et Livingstone (Stanley and Livingstone) – de Henry King (et Otto Brower) – 1939

Posté : 10 décembre, 2014 @ 2:39 dans 1930-1939, BROWER Otto, KING Henry | Pas de commentaires »

Stanley et Livingston

Voilà l’un de ces « grands films prestigieux » que les studios hollywoodiens adoraient du temps de leur grandeur : l’une de ces productions taillées pour les Oscars et la postérité. L’un de ces films, aussi, qui supporte généralement le plus difficilement l’épreuve du temps. Pas manqué : ce Henry King ne figure pas parmi les plus mémorables du cinéaste, et résume assez bien la grandeur et la limite du système hollywoodien de l’âge d’or.

Cette grande épopée humaniste a aussi un aspect très colonialiste, assez représentatif de la vision de l’époque : comme dirait l’autre, c’est le blanc qui fait rentrer l’Afrique dans l’histoire, comme si le continent ne pouvait exister que parce les sociétés occidentales l’ont reconnu à travers des cartes.

Au-delà de cet aspect (à remettre dans son contexte, bien sûr), le film est assez beau, surtout par les portraits qu’il dresse de ces aventuriers transformés à jamais par un continent noir fascinant. Livingstone bien sûr, mais aussi l’ambassadeur amoureux et détruit par cette Afrique qui a fait de lui un vieillard avant l’heure.

Henry King peut surtout se reposer sur la prestation toute en nuance et particulièrement intense à la fois de Spencer Tracy, formidable en Stanley, ce journaliste d’un autre temps qui passe des contrées sauvages de l’Ouest américain (dans une étrange séquence d’ouverture) à celles si semblables et si différentes de l’Afrique.

L’acteur, flanqué d’un Walter Brennan déjà haut en couleur dans le rôle de son « éclaireur », n’a pourtant jamais mis les pieds en Afrique pour ce film, tourné en studio avec en fond des images filmées sur place (par Otto Brower). Le procédé est habilement utilisé, mais donne aussi un côté très fabriqué, nuisant quelque peu à l’atmosphère.

Paradoxalement, la séquence de « tribunal » de Stanley face aux scientifiques qui doivent juger de la véracité de ses propos, elle aussi très hollywoodienne et qui permet de faire de grands discours forcément humanistes, est d’une belle intensité. Plus que beaucoup de scènes africaines qui s’étirent un peu trop et s’attardent parfois gratuitement sur les paysages.

• Le film vient d’être édité parmi neuf autres productions de la Fox (des curiosités, pour la plupart), dans la collection Hollywood Legends.

 

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