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Archive pour novembre, 2014

Le Troisième Homme (The Third Man) – de Carol Reed – 1949

Posté : 17 novembre, 2014 @ 5:18 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, REED Carol, WELLES Orson | Pas de commentaires »

Le Troisième Homme

Immense film noir, et témoignage hallucinant d’une espèce d’entre-deux grotesque et inquiétant, Le Troisième Homme n’a rien perdu de son pouvoir hypnotique. La beauté des images, le noir et blanc granuleux et contrasté, les ombres et les contre-plongées spectaculaires… Que le film ait été entièrement dirigé par Carol Reed ou qu’Orson Welles y ait participé comme on l’a beaucoup dit importe peu : le film est un chef d’œuvre unique qui doit sans doute à l’alchimie miraculeuse des immenses talents réunis.

Celui de Graham Greene, d’abord, dont l’univers littéraire trouve un prolongement parfait dans ce film, le seul pour lequel il a écrit un scénario original (le roman du même nom sera écrit après la sortie du film). Ceux qui connaissent et aiment l’œuvre de Greene (j’en suis) y retrouvent cette atmosphère si particulière, à la fois envoûtante et pleine de danger, où le romanesque se heurte à une réalité complexe et aux bouleversements du monde.

Son cadre est le sujet du film : ce centre international de la Vienne de l’immédiat après-guerre, lieu de privations et de trafics en tous genres où les forces armées des différents pays alliés doivent apprendre à cohabiter, et où les individus les plus décomplexés prospèrent. Une zone de non droit qui évoque le Far West des pionniers. Sans doute pas un hasard si le “héros”, Américain à la recherche d’un nouveau départ, est un auteur de westerns…

L’angoisse naît de l’incompréhension de ce microcosme. Joseph Cotten, étranger transformé en détective dans un milieu qu’il ne connaît et ne comprend pas, plonge de plus en plus profondément  au cœur de cette terre sacrifiée par la guerre, dans une obscurité de plus en plus marquée qui souligne la noirceur des âmes qu’il découvre au fur et à mesure qu’il perd ses illusions de jeunesse.

Alors que ses dernières illusions disparaissent à jamais, les fantômes de sa jeunesse perdue réapparaissent… C’est Orson Welles, dans le rôle mythique de Harry Lime. Tout un symbole, omniprésent dans le film alors qu’il n’apparaît réellement qu’au bout d’une heure. Un monstre absolu, pur produit de la guerre, qui procure un malaise de plus en plus profond. Car il est séduisant, ce monstre. Comme l’est la musique d’Anton Karas, envoûtante et légère, et tellement décalée qu’elle en devient oppressante.

Et les sublimes images nocturnes de ces rues en apparence pleine de charmes ne font que souligner l’horreur de ce qui s’y cache. Le cynisme absolu, le destin des enfants victimes, dont la fugitive vision de doudous abandonnés suffit à faire ressentir l’ampleur de la tragédie.

On n’est pas prêt d’oublier la première apparition de Welles, visage d’ange et cœur de pierre. Ou cette mythique poursuite dans les égouts, chasse à l’homme toute en ombres et en obscurité, qui confirme qu’il n’y a pas de héros qui naissent d’une guerre, et que la frontière entre le bien et le mal est bien difficile à situer lorsque l’ombre est mouvante (Clouzot ne disait pas autre chose dans Le Corbeau). Avec un style exceptionnel.

Pluie noire (Kuroi ame) – de Shohei Imamura – 1989

Posté : 17 novembre, 2014 @ 5:13 dans 1980-1989, IMAMURA Shohei | Pas de commentaires »

Pluie noire

Comment filmer l’indiscible ? Comment rendre palpable le summum de l’horreur et de l’inhumanité ? Imamura s’attaque à un sujet immense : l’utilisation de l’arme atomique sur Iroshima, sujet tellement inhumain, tellement extrême, qu’il n’a que rarement été évoqué frontalement au cinéma. Lui n’élude pas la violence et la souffrance physique : on a bien droit à d’insoutenables images de « la bombe », des corps disloqués, des visages déformés, des enfants comme figés, des êtres qui seraient grotesques si elles n’étaient pas aussi horribles…

Mais le cinéaste fait surtout le choix de rester constamment à hauteur d’hommes, en suivant le destin d’une poignée de personnages frappés directement par l’horreur, par ces scènes de fin du monde dont ils ont été les témoins « privilégiés » : un couple de Japonais « normaux » et leur nièce, qu’ils ont élevée, qui traversent les ruines encore fumantes sans la moindre protection, inconscients de faire le plein de cette radioactivité dont on sait qu’elle les condamne à une longue agonie…

Imamura filme la bombe H du strict point de vue de ces Japonais anonymes : comme la mort et l’horreur qui font irruption dans leur quotidien, sans que rien ne les y ai préparé. Et sans que personne ne les accompagne réellement et ne les aide à en affronter les conséquences. Les images d’horreur reviennent régulièrement, comme des cauchemars qui viennent hanter les personnages, comme gravés à jamais sur leurs rétines. Mais c’est surtout les effets de cette arme ultime sur leur vie que filme Imamura. L’incompréhension, l’ignorance absolue, et la conscience de plus en plus vive de devenir des parias, marqués par la « pluie noire ».

Rien de spectaculaire, dans ce que montre Imamura : des êtres fatigués qui observent impuissants leur propre décomposition ; une communauté qui enterre ses morts les uns après les autres, comme une triste routine dont chacun sait qu’elle les touchera bientôt ; une belle jeune femme dont les projets de mariage sont condamnés les uns après les autres, comme un sinistre running gag, qui serait comique s’il n’était aussi tragique. Imamura filme les espoirs déçus de cette amoureuse pleine de vie comme il filmerait une comédie romantique. Mais le rire reste constamment en travers de la gorge, entravé par l’horreur de ces destins sacrifiés.

Pluie noire est un film précieux mais sans illusion, comme ce fol espoir qui vient clore le film. Ce paysage figé que l’on scrute en espérant y voir apparaître un arc-en-ciel. Bien illusoire, bien sûr : comment tirer des leçons si tout le monde se désintéresse des victimes ? Prix spécial mérité au festival de Cannes en 1989.

Macbeth (id.) – d’Orson Welles – 1948

Posté : 13 novembre, 2014 @ 3:21 dans 1940-1949, FANTASTIQUE/SF, WELLES Orson | Pas de commentaires »

Macbeth

N’étant pas un grand connaisseur de l’œuvre de Shakespeare, je me garderais bien d’évoquer les libertés que Welles a apparemment pris avec la pièce, coupant des scènes entières, déplaçant des dialogues… Je me garderais aussi de confirmer que ce Macbeth est pourtant le plus fidèle dans l’esprit à l’œuvre originale.

Tout ce que je peux souligner, par contre, c’est la puissance des images de Welles, et la manière dont le cinéaste, comme l’acteur, semblent totalement habités par le texte de William. Welles choisit de respecter une dramaturgie et même une mise en scène très théâtrale, avec des décors spectaculaires où les personnages entrent et sortent comme sur une scène. La voix off remplace les apartés, mais le procédé est bien là…

Pourtant, ce qui frappe surtout, c’est la force visuelle du film, et à quel point ce Macbeth est une œuvre purement cinématographique, utilisant d’une manière formidablement percutante les gros plans, les jeux d’ombre, les contre-plongées ou le montage pour souligner les tourments de ces personnages malades. Macbeth et Lady Macbeth (formidable Jeanette Nolan), couple dévoré par une ambition sans fin qui les pousse à commettre les pires crimes : régicide, infanticide… Un couple uni dans le crime et le désir, mais que la culpabilité et la folie guettant finira par isoler jusqu’à l’extrême, la caméra ne les filmant plus alors que séparément.

C’est sans doute cet aspect qui a attiré Welles dans ce premier film shakespearien (il enchaînera avec Othello) : le poids de la culpabilité et l’éveil de la conscience, que Welles acteur incarne avec une douleur perceptible absolument sidérante.

Il y a bien quelques longueurs dans la seconde moitié du film (ce qui explique en partie qu’il ressortira deux ans plus tard dans un montage plus court d’une demi-heure, supervisé par Welles lui-même). Mais ce Macbeth est une plongée fascinante et dérangeante dans un esprit malade. Une expérience de cinéma assez sidérante.

Carlotta vient d’éditer un somptueux coffret DVD réunissant les deux films shakespearien de Welles, dans des versions magnifiques, et avec de très nombreux bonus. On y trouve notamment les deux versions de Macbeth (la version intégrale de 1948, celle que j’ai vue, et celle écourtée de 1950), des analyses, documentaires et documents d’époque. Indispensable pour les amoureux de Shakespeare, de Welles, ou simplement du cinéma.

Magic in the Moonlight (id.) – de Woody Allen – 2014

Posté : 13 novembre, 2014 @ 3:07 dans 2010-2019, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Magic in the moonlight

Un an après le magnifique Blue Jasmine, difficile de cacher sa déception durant le premier quart d’heure de ce qui ressemble alors à une petite comédie sans grand relief qui évoque les moments les moins inspirés de la carrière de Woody Allen, lorsque ses obsessions tournaient au rabachage. Et c’est vrai qu’on a l’impression qu’il nous l’a déjà racontée, cette histoire d’un magicien décidé à démystifier une jeune médium dans le Sud de la France des années 20. Lui-même semble à peine y croire, à cette œuvrette plaisante mais étonnamment mécanique…

Et puis il y a cette scène superbe qui donne son titre au film : une nuit d’orage que le magicien (Colin Firth, formidable dans l’excès et dans la sensibilité) passe avec la jeune médium (Emma Stone, bluffante de naturelle) dans un observatoire déserté, et ce plafond qui s’ouvre enfin sur un ciel rempli d’étoile et sur un sublime clair de lune… Magic in the moonlight ! Ce moment de pure poésie correspond, pour le personnage principal, à son ouverture à la vie, au relâchement d’un homme qui accepte de lâcher prise, d’abandonner les règles stricts qu’il s’est imposés toute sa vie.

C’est son point de vue qu’adopte Woody Allen. Et on comprend alors que si la première partie semblait si froide, répondant à une logique trop stricte et évidente de mise en scène, c’est parce que le point de vue est celui d’un homme trop engoncé dans ses certitudes et dans ses stricts codes de conduite. Un homme cynique, si ouvertement rationnel et cartésien qu’il se prive de tout plaisir et de tout bonheur possible.

Dans ce rôle, Colin Firth est formidable, odieux et maladroit, d’un cynisme irrésistible face à la jeune – et pas si innocente ) Emma Stone, mimi minois et vrai tempérament. Est-elle une authentique médium, ou une arnaqueuse ? On sait la fascination qu’a Woody Allen pour les sciences occultes (Alice, notamment), mais malgré les apparences, ce n’est vraiment pas le sujet : juste une métaphore pour souligner l’ouverture à la vie de ce « génie » autoproclamé, totalement incapable d’être ou de rendre heureux.

La légèreté du propos est trompeuse : le film est habité par le poids du temps qui passe et des regrets, par la mort qui guette, et par la nostalgie de ce qui aurait pu être. Mais c’est aussi une vraie comédie à la Woody Allen, peuplée de personnages irrésistibles (le fiancé ridicule, sûr du pouvoir de sa fortune, qui séduit sa belle au ukulélé).

Tendresse et cynisme, humour et romantisme… Magic in the Moonlight aborde un thème pas si éloigné de celui de Blue Jasmine : la chance qui s’offre de sortir de son monde plein de carcans, pour s’ouvrir aux plaisirs simples de la vie. Mais le ton est assez radicalement différent. On sortait du précédent film bouleversé. On sort de celui-ci heureux, avec un sourire grand comme ça, et une larme au coin des yeux…

Le Rendez-vous de Hong Kong (Soldier of fortune) – de Edward Dmytryk – 1955

Posté : 13 novembre, 2014 @ 2:47 dans 1950-1959, DMYTRYK Edward | Pas de commentaires »

Le rendez-vous de Hong Kong

La même année que La Mousson et sa découverte des mystères de l’Inde, la Fox poursuit son tour du monde en Cinemascope des terres exotiques avec ce Rendez-vous de Hong Kong, qui participe clairement de la même démarche. Dès les premières images, la parenté entre les deux films est évidente, avec ces longs plans dévoilant l’architecture et la vie de Hong Kong.

Le film manque un peu de souffle, mais les images sont belles. Et Smytryk ne se laisse pas tourner la tête par ses moyens, qu’il a gros, et ses décors, qui sont spectaculaires : son film reste focalisé sur son « couple » vedette, Susan Hayward et Clark Gable.

La première est une Américaine qui débarque à Hong Kong pour tenter de retrouver son mari, fait prisonnier en Chine pour avoir voulu y faire un reportage sur le régime en place et les conditions de vie. Le seul qui puisse l’aider est au mieux un aventurier, au pire un gangster (Gable, donc), un homme cynique et sans attache qui, bien sûr, tombe amoureux d’elle.

Le film ne manque pas d’atouts, et parvient à créer une atmosphère très particulière de lieu d’exil. Moins par la richesse des décors que par quelques seconds rôles remarquables. Le policier anglais, un peu transparent (le terne Michael Rennie, également à l’affiche de La Mousson), mais surtout deux personnages qui ne font que de courtes apparitions : cette Européenne entre deux âges, seule et sans avenir, qu’un vieux pilier de bar demande en mariage dans une séquence bouleversante ; et cet ex-général chinois réfugié dans la colonie anglaise, et rattrapé par son passé.

Tous deux sont des nostalgiques, à leur manière, d’un passé douloureux dont on ne saura rien, et s’apprêtent à affronter un avenir incertain. Ils n’ont pas le cynisme de Clark Gable, ou le détachement de ce Français alcoolique et dragueur dont on se demande ce qui l’a amené ici, mais qui affiche une décontraction à toute épreuve, élément comique dans cet univers globalement sombre.

Mais le plus étonnant dans ce film, outre la manière d’évacuer le personnage du mari qui est pourtant le moteur de l’action, c’est sa construction. Et comment le couple improbable formé par Susan Hayward et Clark Gable se révèle central alors que les deux stars n’ont que peu de scènes en communs. Il faut attendre 30 minutes pour que Gable entre en scène, et Susan Hayward disparaît presque totalement de l’action dans la dernière partie du film.

Pourtant, ces deux-là semblent se nourrir l’un l’autre, la présence de l’autre les aidant à se libérer des « prisons » qu’ils se sont construites… Etrange et séduisante manière de filmer la passion et l’espoir qui renaît…

• Le film est édité dans la collection « Hollywood Legends », qui exhume les classiques de la Fox dans des éditions visuellement soignées, mais sans bonus.

La Tour du silence (Der Turm des Schweigens) – de Johannes Guter – 1925

Posté : 7 novembre, 2014 @ 2:11 dans 1920-1929, FILMS MUETS, GUTER Johannes | 1 commentaire »

La Tour du silence

Réalisé par un pionnier de l’expressionnisme, tombé dans un relatif oubli, La Tour du silence est une curiosité assez loin des sommets de l’expressionnisme allemand. Même si la forme est plutôt soignée, avec l’utilisation de beaux décors radicaux (le désert, l’intérieur bourgeois, ou cette mystérieuse tour qui constitue la porte d’entrée vers l’expressionnisme… les trois décors soulignent à l’extrême la nature de l’environnement), le film est moins basé sur la forme que sur une histoire parfaitement improbable.

Rocambolesque, le film fait intervenir un savant fou, des aventuriers, des trahisons, des vengeances… Pourtant, le scénario est étonnamment pauvre en rebondissements. L’histoire, d’ailleurs, se résume en quelques mots : laissé pour mort dans le désert, un aventurier revient pour découvrir que son ami, qui l’a trahi, a épousé sa fiancée pendant son absence.

Ce qui frappe surtout, c’est à quel point ce film muet est bavard : tout repose sur ce que les personnages ont à raconter, et qui donnent lieu à une série de flash-backs qui font la particularité d’un film où les événements renvoient à un mystérieux passé, comme un éternel recommencement.

On marche totalement, malgré les facilités scénaristiques, à cette Tour du silence, dont certaines séquences, grâce à un montage d’une grande efficacité, sont d’une modernité étonnante.

Rome, ville ouverte (Roma città aperta) – de Roberto Rossellini – 1945

Posté : 7 novembre, 2014 @ 2:08 dans 1940-1949, ROSSELLINI Roberto | 1 commentaire »

Rome, ville ouverte

L’acte de naissance du Néoréalisme, le film qui a bouleversé le cinéma du monde entier (on voit bien ce que la Nouvelle Vague doit au chef d’œuvre de Rossellini), rompant avec les structures narratives et la manière de filmer… Soixante-dix ans après, Rome ville ouverte n’a rien perdu de son incroyable puissance.

A quoi le film la doit-il, cette puissance ? Au sentiment d’urgence, peut-être, qui se dégage de ces images tournées en décors réels et sans fards. Ou alors à ces multiples écueils dans le récit, qui donnent l’impression que le film réagit à la vie qui se déroule devant la caméra, plutôt qu’il n’illustre un scénario conventionnel. Peut-être encore à la frontalité avec laquelle Rossellini filme ses acteurs, accordant la même place à des débutants sans expérience qu’à des vedettes qui se révèlent ici sous un autre jour (Anna Magnani, sublime en femme du peuple révoltée).

Tourné deux mois seulement après la libération de Rome, le film est aussi un témoignage précieux, comme si Roberto Rossellini s’était dépêché de redonner vie à cette période dont les Romains sortaient et qu’ils n’aspiraient qu’à oublier. D’où, peut-être, l’accueil froid réservé au film à sa sortie…

Adoptant un style proche des actualités filmées, Rossellini semble filmer la vie qui s’écoule en temps de guerre, avec ses horreurs, ses peurs, le sentiment omniprésent d’oppression et d’aliénation. En restant constamment à hauteur d’hommes, il nous fait partager les doutes et les espoirs, mais nous plonge aussi au cœur de la haine et de la folie. Qu’est-ce qui est le plus terrible dans ce film ? Voir l’acceptation de sa propre mort à venir dans le regard du prêtre (magnifique Aldo Fabrizi), ou la haine pure, incompréhensible, dans celui de l’officier SS (troublant Harry Feist) ?

Le sentiment d’oppression est omniprésent. Sans montrer grand-chose de la guerre jusqu’à la dernière partie, Rome ville ouverte en fait ressentir toute l’horreur. Pourtant, malgré les morts, malgré l’immense sensation de gâchis humain, le film se révèle étrangement optimiste. Le vainqueur, c’est l’humanité : celle qui se transcende et survit malgré tout au fanatisme, celle des soldats eux-mêmes qui baissent les armes devant le prêtre… Face à la haine, les différences s’estompent, un communiste, un monarchiste et un homme d’église partagent les mêmes convictions profondes… Et une horde d’enfants annonce l’arrivée de jours meilleurs.

Rome ville ouverte est un film révolutionnaire. Mais c’est surtout un chef d’œuvre d’une beauté et d’une force incomparables.

Récit d’un propriétaire (Nagaya shinshiroku) – de Yasujiro Ozu – 1947

Posté : 7 novembre, 2014 @ 2:06 dans 1940-1949, OZU Yasujiro | Pas de commentaires »

Récit d’un propriétaire

Premier film tourné par Ozu après une interruption de plusieurs années due à la guerre, Récit d’un propriétaire est une œuvre au ton singulier, à part dans sa filmographie.

Reprenant sa thématique des Gosses de Tokyo, il signe ce qui ressemble au premier abord à une sorte de farce à la fois tendre et légère. Il y a une vraie dérision presque comique dans la manière dont il filme la cohabitation forcée entre un gamin perdu et l’une des locataires qui l’ont recueilli. Partant à la recherche du père dont on ne sait s’il a perdu ou abandonné son fils, elle tente de le semer pour se débarrasser de cet encombrant cadeau du ciel…

Mais la tendresse et l’amour maternel ne sont jamais loin chez Ozu. Avec même une vraie cruauté, face au sort réservé au gamin, à sa solitude. On se déplace beaucoup dans ce film, on sourit beaucoup, on chante, même, lors d’une soirée entre voisins qui apparaît comme une parenthèse joyeuse et nostalgique. Pourtant, en filigrane, il y a cette évocation d’un Japon qui ne se relève pas encore de la guerre.

Les maisons sont des bicoques perdues dans des terrains vagues, les personnages portent des vêtements élimés, la nourriture est chère et rare, les enfants ne jouent pas aux jeux de leur âge, et les papas sont absents…

Ozu, pourtant, affiche un vrai optimisme dans ce film. Face aux épreuves, la solidarité est certes relative (surtout au début, lorsque chacun se rejette la garde de ce gamin perdu) mais existe bien. Et de cette situation naît une vocation de mère, et l’espoir pour un enfant sans avenir… Une étincelle qui illumine ce film court et précieux.

Mulholland Drive (id.) – de David Lynch – 2001

Posté : 7 novembre, 2014 @ 2:03 dans * Thrillers US (1980-…), 2000-2009, LYNCH David | Pas de commentaires »

Mulholland Drive

Rêves insouciants et cruelles désillusions dans la Cité des Anges… Lynch s’attaque à la machine à rêve dans ce cauchemar éveillant fascinant et mystérieux.

Qui est cette brune brûlante et amnésique, beauté revenue de tout qui manque de se faire assassiner sur Mulholland Drive avant de rencontrer la blonde pure et innocente destinée à une grande carrière d’actrice ? Quel est le mystérieux lien qui unit ces deux jeunes femmes que tout oppose, deux versants opposés d’un même rêve hollywoodien ?

Tout au long des deux premières heures, on ne peut qu’accumuler les questions sans réponse, et se laisser envoûter par les images hypnotiques d’une élégance folle, et par la musique voluptueuse d’Angelo Badalamenti, par cette étrange quête d’identité entrecoupée de scènes fascinantes qui semblent sans rapport avec l’histoire des deux jeunes femmes (les deux hommes qui viennent affronter les rêves de l’un d’eux dans un coffee shop, la mauvaise passe d’un réalisateur confronté au fiasco de sa vie professionnelle et de son couple), et par la troublante attirance des deux héroïnes (Laura Harring et Naomi Watts, révélée par ce film).

Lynch s’amuse à nous promener dans cet Hollywood de rêve et de carte postale, mais dont les routes sinueuses (ce fameux Mulholland Drive qui serpente dans les hauteurs de Los Angeles) conduisent directement au cauchemar. Sans que l’on comprenne réellement tout ce qui se passe à l’écran, mais qu’importe : c’est le plaisir de cinéma le plus total, le plus absolu, que Lynch nous offre. Comme pour Twin Peaks ou Lost Highway, ses deux chef d’œuvre, Lynch signe un film sensoriel, trip enthousiasmant et fascinant.

Curieusement, et contrairement aux deux précédents films, les dernières minutes soulèvent les nombreuses zones d’ombre, et donnent les clés (littéralement) de tout ce qui précède. Mais à rendre son film plus explicite, plus compréhensible, Lynch gâche un peu le plaisir trouble et dérangeant. Surtout que l’explication, même si elle révèle les déceptions à la hauteur de leurs rêves de ces starlettes en quête de gloire de cinéma, n’est pas tout à fait à la hauteur du trip magnifique des deux premières heures de ce projet pensé pour être le point de départ d’une série TV à la Twin Peaks, et devenu un grand film lynchien, inoubliable.

La Mousson (The Rains of Ranchipur) – de Jean Negulesco – 1955

Posté : 7 novembre, 2014 @ 1:58 dans 1950-1959, NEGULESCO Jean | Pas de commentaires »

La Mousson

Au moins, dès les premières images, on voit ce qui a poussé les studios (la Fox en l’occurrence) à produire ce remake de l’excellent « film catastrophe » de Clarence Brown, avec Tyrone Power : avec ce Cinemascope qui n’en finit pas de s’étirer, et les couleurs vives du Technicolor, cette Mousson deuxième version rompt radicalement, dans la forme en tout cas, avec le noir et blanc et le format traditionnel du film des années 30.

Cette volonté est clairement affichée : avant même de voir les personnages apparaître, de longs plans spectaculaires s’enchaînent, plantant le décor exotique de Ranchipur, « petite » province à l’échelle grandiose de l’Inde, où les traditions ancestrales et les différences de castes semblent toujours très vivaces. Les images sont belles et impressionnantes, et suffisent, en quelques minutes, à faire naître l’excitation. Car si on a vu le film de Clarence Brown, on sait que cette histoire d’amour inattendue entre une Américaine trop riche et trop égoïste et un médecin indien totalement dévoué aux autres, sera marquée par une catastrophe naturelle particulièrement destructrice, qui constituera le sommet du film.

Et Jean Negulesco a visiblement les moyens de ses ambitions, mettant en scène des centaines de figurants pour les seules séquences d’exposition. Eh bien cette séquence de destruction massive tient ses promesses. Les effets spéciaux ont certes un peu vieilli, mais le montage soudain frénétiques, la lumière crépusculaire, et cette manière d’associer le spectaculaire à l’intime sont particulièrement réussis.

Le passage réellement spectaculaire dure à peine plus de cinq minutes, mais il dramatise efficacement le destin de tous ces personnages qui se croisent depuis le début du film. Le problème, c’est que ce début est un peu long : il faut attendre 70 minutes (dans un film qui en dure 100) pour rompre avec le romantisme un peu mièvre qui était en place. Peut-être est-ce dû à la prestation un peu too much de Lana Turner et à celle de Richard Burton qui semble étrangement figé sous les fards du médecin indien… En tout cas l’histoire d’amour au cœur du film laisse de marbre, et fait regretter le couple Tyrone Power-Mirna Loy du film original.

Beaucoup plus réussi : le personnage du mari humilié (Michael Rennie), ou celui de l’exilé qui se réfugie dans l’alcool (Fred MacMurray), deux personnages secondaires autrement plus intéressants, mais trop en retrait.
Tous deux auront droit à de belles scènes dans la dernière partie du film, plus intense, plus complexe, plus aboutie. Un beau mélodrame en demi-teinte, qui donne furieusement envie de revoir La Mousson version 1939.

• Le film est édité dans la collection « Hollywood Legends », qui exhume les classiques de la Fox. Une édition visuellement soignée, mais sans bonus.

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