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Archive pour le 17 novembre, 2014

Le Troisième Homme (The Third Man) – de Carol Reed – 1949

Posté : 17 novembre, 2014 @ 5:18 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, REED Carol, WELLES Orson | Pas de commentaires »

Le Troisième Homme

Immense film noir, et témoignage hallucinant d’une espèce d’entre-deux grotesque et inquiétant, Le Troisième Homme n’a rien perdu de son pouvoir hypnotique. La beauté des images, le noir et blanc granuleux et contrasté, les ombres et les contre-plongées spectaculaires… Que le film ait été entièrement dirigé par Carol Reed ou qu’Orson Welles y ait participé comme on l’a beaucoup dit importe peu : le film est un chef d’œuvre unique qui doit sans doute à l’alchimie miraculeuse des immenses talents réunis.

Celui de Graham Greene, d’abord, dont l’univers littéraire trouve un prolongement parfait dans ce film, le seul pour lequel il a écrit un scénario original (le roman du même nom sera écrit après la sortie du film). Ceux qui connaissent et aiment l’œuvre de Greene (j’en suis) y retrouvent cette atmosphère si particulière, à la fois envoûtante et pleine de danger, où le romanesque se heurte à une réalité complexe et aux bouleversements du monde.

Son cadre est le sujet du film : ce centre international de la Vienne de l’immédiat après-guerre, lieu de privations et de trafics en tous genres où les forces armées des différents pays alliés doivent apprendre à cohabiter, et où les individus les plus décomplexés prospèrent. Une zone de non droit qui évoque le Far West des pionniers. Sans doute pas un hasard si le “héros”, Américain à la recherche d’un nouveau départ, est un auteur de westerns…

L’angoisse naît de l’incompréhension de ce microcosme. Joseph Cotten, étranger transformé en détective dans un milieu qu’il ne connaît et ne comprend pas, plonge de plus en plus profondément  au cœur de cette terre sacrifiée par la guerre, dans une obscurité de plus en plus marquée qui souligne la noirceur des âmes qu’il découvre au fur et à mesure qu’il perd ses illusions de jeunesse.

Alors que ses dernières illusions disparaissent à jamais, les fantômes de sa jeunesse perdue réapparaissent… C’est Orson Welles, dans le rôle mythique de Harry Lime. Tout un symbole, omniprésent dans le film alors qu’il n’apparaît réellement qu’au bout d’une heure. Un monstre absolu, pur produit de la guerre, qui procure un malaise de plus en plus profond. Car il est séduisant, ce monstre. Comme l’est la musique d’Anton Karas, envoûtante et légère, et tellement décalée qu’elle en devient oppressante.

Et les sublimes images nocturnes de ces rues en apparence pleine de charmes ne font que souligner l’horreur de ce qui s’y cache. Le cynisme absolu, le destin des enfants victimes, dont la fugitive vision de doudous abandonnés suffit à faire ressentir l’ampleur de la tragédie.

On n’est pas prêt d’oublier la première apparition de Welles, visage d’ange et cœur de pierre. Ou cette mythique poursuite dans les égouts, chasse à l’homme toute en ombres et en obscurité, qui confirme qu’il n’y a pas de héros qui naissent d’une guerre, et que la frontière entre le bien et le mal est bien difficile à situer lorsque l’ombre est mouvante (Clouzot ne disait pas autre chose dans Le Corbeau). Avec un style exceptionnel.

Pluie noire (Kuroi ame) – de Shohei Imamura – 1989

Posté : 17 novembre, 2014 @ 5:13 dans 1980-1989, IMAMURA Shohei | Pas de commentaires »

Pluie noire

Comment filmer l’indiscible ? Comment rendre palpable le summum de l’horreur et de l’inhumanité ? Imamura s’attaque à un sujet immense : l’utilisation de l’arme atomique sur Iroshima, sujet tellement inhumain, tellement extrême, qu’il n’a que rarement été évoqué frontalement au cinéma. Lui n’élude pas la violence et la souffrance physique : on a bien droit à d’insoutenables images de « la bombe », des corps disloqués, des visages déformés, des enfants comme figés, des êtres qui seraient grotesques si elles n’étaient pas aussi horribles…

Mais le cinéaste fait surtout le choix de rester constamment à hauteur d’hommes, en suivant le destin d’une poignée de personnages frappés directement par l’horreur, par ces scènes de fin du monde dont ils ont été les témoins « privilégiés » : un couple de Japonais « normaux » et leur nièce, qu’ils ont élevée, qui traversent les ruines encore fumantes sans la moindre protection, inconscients de faire le plein de cette radioactivité dont on sait qu’elle les condamne à une longue agonie…

Imamura filme la bombe H du strict point de vue de ces Japonais anonymes : comme la mort et l’horreur qui font irruption dans leur quotidien, sans que rien ne les y ai préparé. Et sans que personne ne les accompagne réellement et ne les aide à en affronter les conséquences. Les images d’horreur reviennent régulièrement, comme des cauchemars qui viennent hanter les personnages, comme gravés à jamais sur leurs rétines. Mais c’est surtout les effets de cette arme ultime sur leur vie que filme Imamura. L’incompréhension, l’ignorance absolue, et la conscience de plus en plus vive de devenir des parias, marqués par la « pluie noire ».

Rien de spectaculaire, dans ce que montre Imamura : des êtres fatigués qui observent impuissants leur propre décomposition ; une communauté qui enterre ses morts les uns après les autres, comme une triste routine dont chacun sait qu’elle les touchera bientôt ; une belle jeune femme dont les projets de mariage sont condamnés les uns après les autres, comme un sinistre running gag, qui serait comique s’il n’était aussi tragique. Imamura filme les espoirs déçus de cette amoureuse pleine de vie comme il filmerait une comédie romantique. Mais le rire reste constamment en travers de la gorge, entravé par l’horreur de ces destins sacrifiés.

Pluie noire est un film précieux mais sans illusion, comme ce fol espoir qui vient clore le film. Ce paysage figé que l’on scrute en espérant y voir apparaître un arc-en-ciel. Bien illusoire, bien sûr : comment tirer des leçons si tout le monde se désintéresse des victimes ? Prix spécial mérité au festival de Cannes en 1989.

 

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