Macbeth (id.) – d’Orson Welles – 1948
N’étant pas un grand connaisseur de l’œuvre de Shakespeare, je me garderais bien d’évoquer les libertés que Welles a apparemment pris avec la pièce, coupant des scènes entières, déplaçant des dialogues… Je me garderais aussi de confirmer que ce Macbeth est pourtant le plus fidèle dans l’esprit à l’œuvre originale.
Tout ce que je peux souligner, par contre, c’est la puissance des images de Welles, et la manière dont le cinéaste, comme l’acteur, semblent totalement habités par le texte de William. Welles choisit de respecter une dramaturgie et même une mise en scène très théâtrale, avec des décors spectaculaires où les personnages entrent et sortent comme sur une scène. La voix off remplace les apartés, mais le procédé est bien là…
Pourtant, ce qui frappe surtout, c’est la force visuelle du film, et à quel point ce Macbeth est une œuvre purement cinématographique, utilisant d’une manière formidablement percutante les gros plans, les jeux d’ombre, les contre-plongées ou le montage pour souligner les tourments de ces personnages malades. Macbeth et Lady Macbeth (formidable Jeanette Nolan), couple dévoré par une ambition sans fin qui les pousse à commettre les pires crimes : régicide, infanticide… Un couple uni dans le crime et le désir, mais que la culpabilité et la folie guettant finira par isoler jusqu’à l’extrême, la caméra ne les filmant plus alors que séparément.
C’est sans doute cet aspect qui a attiré Welles dans ce premier film shakespearien (il enchaînera avec Othello) : le poids de la culpabilité et l’éveil de la conscience, que Welles acteur incarne avec une douleur perceptible absolument sidérante.
Il y a bien quelques longueurs dans la seconde moitié du film (ce qui explique en partie qu’il ressortira deux ans plus tard dans un montage plus court d’une demi-heure, supervisé par Welles lui-même). Mais ce Macbeth est une plongée fascinante et dérangeante dans un esprit malade. Une expérience de cinéma assez sidérante.
• Carlotta vient d’éditer un somptueux coffret DVD réunissant les deux films shakespearien de Welles, dans des versions magnifiques, et avec de très nombreux bonus. On y trouve notamment les deux versions de Macbeth (la version intégrale de 1948, celle que j’ai vue, et celle écourtée de 1950), des analyses, documentaires et documents d’époque. Indispensable pour les amoureux de Shakespeare, de Welles, ou simplement du cinéma.
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