Les Voies du Destin (The Railway Man) – de Jonathan Teplitzky – 2013
L’ombre de David Lean plane sur ce grand mélodrame à l’ancienne adapté d’une histoire vraie. Pas uniquement pour la toile de fond, qui évoque forcément son classique Le Pont de la Rivière Kwai : le héros, vétéran de la seconde guerre mondiale, est toujours hanté en 1980 par le traumatisme qu’il a subi alors qu’il était prisonnier sur le fameux chantier de la rivière Kwai, après la chute de Singapour.
Mais dès les premières images, c’est à un autre film que le film Teplitzky fait référence. Une rencontre fortuite dans un train, une gare britannique, la simplicité des gestes… tout renvoie à Brève rencontre, l’un des premiers chefs d’œuvre de Lean. Et comme si les images n’étaient pas suffisamment parlantes, le scénariste nous sort le titre du film dans l’un des premiers dialogues…
C’est un peu le principal reproche que l’on peut faire au film : être constamment trop explicite, trop démonstratif. Au risque de tuer l’émotion, qui reste cruellement absente jusqu’aux toutes dernières minutes. Non pas que le film soit dénué de qualités : il y a de très beaux moments, en particulier dans la dernière partie le face à face entre Lomax, interprété par un Colin Firth subtil et poignant, et son ancien bourreau lui aussi hanté par les horreurs qu’il a infligées.
Là, durant quelques minutes, le film devient fascinant, parce qu’il renvoie constamment d’une époque à l’autre, du passé au présent, de l’horreur à ses effets, dans un montage audacieux et percutant. Mais la plupart du temps, la construction du film manque hélas totalement d’audace. Plutôt que de jouer sur l’omniprésence de ce passé dans l’esprit de Lomax, Teplitzky consacre successivement de longues parties à une époque, puis à une autre, le lien entre les deux finissant par se perdre en cours de route.
Et puis, aussi soignée la partie se déroulant dans les camps soit-elle (et aussi bon Jeremy Irvine soit-il dans le rôle du jeune Lomax), elle se révèle inutilement longue : les images qui semblent étirées à l’envie des sévices infligés au jeune soldat sont bien moins percutantes et bouleversantes que les dessins de ces tortures que la femme de Lomax (Nicole Kidman, tellement botoxée qu’elle semble ne plus pouvoir chanter d’expression) découvre dans un carnet, dessins entraperçus en quelques secondes mais qui laissent une impression particulièrement forte.
Reste en tout cas quelques belles scènes, une fin poignante, et une belle ode au pardon et à la réconciliation, construits sur la base du souvenir.
• DVD chez Metropolitan avec un making of assez classique, composé essentiellement d’interviews convenues des acteurs et du réalisateur. Avec toutefois un passage passionnant : l’évocation par Colin Firth de sa rencontre avec Eric Lomax, le personnage qu’il interprète, décédé avant la fin du tournage.
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