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Archive pour le 21 août, 2014

Histoires d’herbes flottantes (Ukikusa monogatari) – de Yasujiro Ozu – 1934

Posté : 21 août, 2014 @ 1:57 dans 1930-1939, FILMS MUETS, OZU Yasujiro | Pas de commentaires »

Histoires d’herbes flottantes

Le cinéma d’Ozu est décidément un bonheur de chaque instant. Quelle beauté, encore, que ce film tardivement muet (le cinéaste ne passera au parlant qu’avec Le Fils unique, deux ans plus tard), où les relations filiales, que l’on retrouve tout au long de son œuvre, sont une nouvelle fois complexes et bouleversantes.

Cette fois, c’est dans un milieu artistique qu’il connaît bien qu’il situe son histoire. Le héros est un petit comédien sans grand talent, chef d’une troupe itinérante que le train ramène, après quatre ans d’absence, dans un petit village où elle doit s’installer pour un temps. Ce village, Kihachi, le chef de troupe, le connaît bien : c’est là que vit son ancienne maîtresse, qu’il avait rencontrée lors d’une tournée il y a bien longtemps de cela, et avec qui il a eu un enfant. Ce dernier a grandi, est un étudiant plein d’avenir, et pense que son vrai père est mort : Kihachi ne serait qu’un oncle un peu inconsistant que l’on est toujours heureux de revoir…

Les retrouvailles entre l’acteur vieillissant et son ancienne maîtresse, qui évoquent leur fils en buvant du saké (les traditions japonaises sont toujours très présentes chez Ozu, comme un contrepoint à la modernité et à l’occidentalisation de la société), est une merveille. Glissant doucement de l’ivresse des retrouvailles la conscience douloureuse de la longue absence, la caméra d’Ozu scrute les visages et y décèlent des trésors de souffrance, chez cet homme qui ne peut qu’observer de loin en loin ce fils aimé grandir loin de lui…

Ozu donne une image sans complaisance du théâtre, ôtant toute dimension romantique à cette troupe dont le quotidien semble n’être fait que d’ennui et d’attentes interminables. Surtout, il oppose la condition d’homme de troupe aux aspirations de père de famille. La vie facile que Kihachi a sans doute choisie s’est transformée en une vie de sacrifice, que les trop longues absences ont rendu insupportables.

Les moments que le jeune homme passe avec son « oncle » n’en sont que plus précieux. Père et fils qui pêchent côte à côte dans le fleuve… Une scène simple et touchante qui renvoie à un autre film de Ozu, Il était un père.
Le film est une splendeur, terriblement émouvant et émaillé de fulgurances de mise en scène, comme cette dispute entre l’acteur et sa maîtresse officielle séparés par un épais rideau de pluie. Comme souvent chez Ozu, le décor et les objets jouent un rôle important dans le langage cinématographique. Cette constante troupe son apogée lors d’une séquence en apparence anodine, entre le fils de l’acteur et la jeune fille, comédienne elle aussi, dont il est tombé amoureux…

Alors que le jeune couple est côte à côte, insouciant, la soudaine apparition d’un train (figure récurrente dans le cinéma de Ozu), vient les tirer de leur rêverie, rappelant la jeune actrice à la réalité, et à l’imminence du moment où elle devra reprendre la route avec la troupe. Cette séquence, rythmée par les rails et la présence du vélo du jeune homme, éléments de décors qui semblent éloignés les amants l’un de l’autre, est d’une intelligence narrative et d’une beauté impressionnantes. Un chef d’œuvre, dont Ozu signera lui-même un remake en 1959, Herbes flottantes.

• Le film figure dans le formidable coffret DVD édité chez Carlotta, dans une version sans accompagnement musical. Un étrange choix éditorial, mais qui ne gâche en rien le plaisir immense que procure le film.

Mondwest (Westworld) – de Michael Crichton – 1973

Posté : 21 août, 2014 @ 1:52 dans 1970-1979, CRICHTON Michael, FANTASTIQUE/SF, WESTERNS | Pas de commentaires »

Mondwest

Avant d’imaginer Jurassic Park, le romancier, scénariste et réalisateur Michael Crichton avait déjà créé un parc d’attraction du futur, dans ce petit classique de la SF, malin et bien fichu. A quelle époque l’histoire se déroule-t-elle ? A quoi ressemble la société ? On n’en saura à peu près rien, mais c’est une époque où les vacances les plus funs consistent à s’immerger dans une période de l’histoire reconstituée jusqu’au moindre détail, où les figurants sont tous des robots, répliques parfaites des hommes.

Au choix : le far-west, le Moyen-Âge ou l’empire romain, trois périodes marquées par le sexe débridé, la morale discrète et la violence facile, ce qui attire visiblement des tas de touristes franchement désireux de s’encanailler, et qui reviennent de ces vacances enchantés d’avoir pu tuer une demi-douzaine d’hommes (en se persuadant sans trop réfléchir qu’il s’agissait bien de robots) et baiser autant de prostitués ou de femmes facilement séduites (en n’imaginant pas trop qu’il ne s’agissait pas de vraies femmes)…

Crichton signe mine de rien une œuvre profondément cynique, qui inspirera beaucoup les grands films de SF de Paul Verhoeven : la filiation est évidente dès la séquence d’ouverture, spot télévisé vantant les mérites de ce parc d’attraction, un procédé que le « Hollandais violent » reprendra dans Total Recall, celui de ses films qui évoquera le plus ce Mondwest.

Un autre classique plus récent s’inscrit clairement comme un rejeton du film de Crichton : Terminator, qui reprendra en le développant le thème des machines prenant le pouvoir. Car les robots en ont marre de se faire tripoter par des vieux libidineux ou de se faire descendre par des citadins trop excités par leur revolver.

C’est un autre aspect du film que Crichton réussit parfaitement : faire monter la tension à travers ce robot taciturne interprété par Yul Brynner, dans l’un de ses rôles les plus emblématiques. Constamment abattu par le même homme (Richard Benjamin, très bien en avocat coincé venu se « déniaiser » avec son pote James Brolin, tous deux s’éclatant à se découvrir une âme de machos et de tueurs), le pistolero-robot semble de plus en plus sur le point d’éclater, ses yeux fixes reflétant une colère sourde impressionnante.

Les vingt dernières minutes sont les moins intéressantes. Une fois que la révolte est commencée, la tension retombe un peu, et l’enjeu se résume alors à un simple suspense, certes plutôt efficace. Crichton lui-même semble conscient de n’avoir plus grand-chose à dire, étirant inutilement la conclusion en rajoutant quelques rebondissements grand-guignolesques, sans doute ajoutés uniquement pour rapprocher le métrage des 90 minutes standards.

Reste que Mondwest, avec ses personnages peu aimables et sa critique acerbe de la société, est une belle réussite. Un gros succès commercial aussi, qui aura droit à une suite trois ans plus tard : Les Rescapés du futur, toujours avec Yul Brynner.

• Rien d’autre que le film dans le DVD édité chez Aventi.

Le Voleur de Tanger (The Prince who was a thief) – de Rudolph Maté – 1951

Posté : 21 août, 2014 @ 1:47 dans 1950-1959, CURTIS Tony, MATÉ Rudolph | Pas de commentaires »

Le Voleur de Tanger

Tony Curtis, à la jeunesse insolente, virevolte et sautille autant qu’il le peut (et il le peut beaucoup) dans ce très joli film « d’aventures orientales », genre alors très en vogue et dont la Universal s’était fait une spécialité. Et dans la longue liste des films du genre produits par le studio cette décennie-là, celui-ci est une vraie merveille.

Aux commandes, Rudolph Maté donne un rythme fou à ce film léger et enthousiasmant, aux antipodes du film noir dont il a signé quelques perles (D.O.A. surtout). Respectant toutes les figures imposées du genre (la poursuite dans le souk, les murailles que l’on gravit, les danses orientales…), il construit tout son film autour de la personnalité et du dynamisme irrésistibles de Curtis et de celle qui allait devenir sa partenaire privilégiée (c’est leur premier film ensemble), Piper Laurie.

L’actrice est craquante en petite sauvageonne cracra et indomptable, dont la souplesse impressionnante donne lieu à quelques scènes de cambrioles très étonnantes. Le rôle de Curtis est plus convenu, mais il apporte la légèreté et le dynamisme qu’il faut à ce voleur au grand cœur qui s’élève face au roi tyrannique, voleur qui est en fait le prince héritier sauvé d’un assassinat par le plus grand voleur de Tanger, alors qu’il n’était qu’un bébé…

Puis il y a la musique romanesque à souhait de Hans Salter, et le Technicolor flamboyant merveilleusement utilisé par le chef opérateur Irving Glassberg. Ses images sont d’une grande beauté, en particulier les séquences nocturnes, où quelques discrets points de lumière chaude percent constamment la pénombre, créant une atmosphère envoûtante et pleine de mystère. Avec mêmes quelques passages joliment émouvants. Le plus beau plan du film ? La silhouette de Piper Laurie se découpant dans un beau clair-obscur alors que son prince disparaît. Simple, sobre, et magnifique.

• Un DVD sans bonus et à petit prix vient d’être édité chez Universal.

L’Homme sans âge (Youth without youth) – de Francis Ford Coppola – 2007

Posté : 21 août, 2014 @ 1:42 dans 2000-2009, COPPOLA Francis Ford, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

L’Homme sans âge

Près de dix ans après son précédent film, enfin débarrassé des problèmes financiers qui l’ont poussé, durant toute les années 90, à se fondre dans le paysage des grands studios hollywoodiens, Coppola retrouve une liberté et une ambition qui rappellent ses grandes années. L’ambition par la richesse des thèmes abordés, et par l’ampleur de son récit, qui court sur une trentaine d’années, de la Roumanie de l’immédiat avant-guerre, aux années pleines d’angoisse et d’espoirs de la guerre froide, trois décennies plus tard. Et la liberté que s’offre Coppola, totalement débarrassé des codes hollywoodiens.

Avec le destin de ce vieil homme (Tim Roth) frappé par la foudre, qui rajeunit mystérieusement et réalise que ses capacités intellectuelles ont accru de manière spectaculaire, Coppola signe une méditation sur le temps qui passe, sur la perception, le sens de la vie, la maîtrise que l’on a sur sa propre existence et sur ceux qui nous entourent…  Le filme pose beaucoup de questions sur la connaissance, l’amour, la responsabilité, le destin. Y répond-il ? Je n’en suis pas sûr : pour apprécier L’Homme sans âge, il faut accepter de se perdre en route, de se laisser embarquer dans cette balade dans le temps, quitte à se retrouver perdu en cours de route.

Car c’est bien la question du temps, omniprésente dans toute son œuvre, qui est le sujet central de ce film, comme si Coppola tenait d’une certaine manière à rattraper celui qu’il avait perdu. Voyageant dans sa propre cinématographie, il renoue avec un enthousiasme qu’il semblait avoir perdu depuis quinze ans. Ce n’est sans doute pas un hasard si, visuellement, le film évoque si fortement Le Parrain par moments (ne serait-ce que par la présence de Tim Roth, que Coppola filme dans certains plans comme s’il était le Pacino de 1972), Dracula à d’autres (l’utilisation poétique des cadres et de la lumière, à travers le filtre du fantastique).

La parenté avec son adaptation du roman de Bram Stocker est souvent frappante, dans cette œuvre fascinante et déconcertante, visuellement splendide, qui est sans doute le plus européen de ses films (il s’agit d’ailleurs d’une co-production européenne, tournée en Roumanie) : par son côté expérimental, et son approche très cinéphile du cinéma. Tout en cherchant à trouver une nouvelle manière de raconter son histoire, Coppola rend un hommage vibrant au cinéma des années 30 à 60, durant lesquelles se déroule l’action, du générique très 50s à la manière très film noir de filmer les ruelles sombres et humides… jusqu’au clin d’œil amusé au Faucon maltais.

L’Homme sans âge passionne souvent, laisse perplexe parfois, frôlant même l’ennui dans quelques séquences de la seconde moitié, mais il fascine constamment. Coppola, avec ce film, trouve une nouvelle jeunesse, même si le titre original (« la jeunesse sans la jeunesse ») montre bien qu’il n’est pas dupe. Sa soif d’expérimentation est de cinéma pur est toujours bien là, comme le confirmeront ses deux films suivants, Tetro et Twixt. On attend la suite avec impatience…

Pour elle – de Fred Cavayé – 2008

Posté : 21 août, 2014 @ 1:38 dans * Polars/noirs France, 2000-2009, CAVAYÉ Fred | Pas de commentaires »

Pour elle

Dès son premier long métrage, placé sous le parrainage d’un Olivier Marchal qui fait une apparition clin d’œil dans le film, Fred Cavayé s’impose comme le nouveau roi incontournable du thriller français. Très inspiré aussi par le film de genre hollywoodien, Pour elle marque une date dans l’histoire du polar français, qui atteint une sorte de maturité et d’excellence rarement atteintes jusque là.

Avec Pour elle, Fred Cavayé joue à la fois sur le romanesque tragique à la James Gray, et sur un dépouillement absolu (à l’image de l’appartement de Vincent Lindon à la fin du film) qui évoque lui le Jean-Pierre Melville des grands films. Rien de superflu dans ce polar sec et tendu, l’histoire d’un père de famille sans histoire qui décide de faire évader sa femme, incarcérée depuis trois ans pour un meurtre qu’elle n’a pas commis.

Cavayé aurait pu jouer sur le doute concernant la culpabilité de l’épouse, jouée par Diane Kruger. Mais là n’était pas son sujet. L’innocence de la jeune femme est dévoilée en trois plans – flash backs d’une concision exemplaire. La nature même du crime, d’ailleurs, n’est abordée que brièvement, comme un passage obligé mais expédié en une poignée de répliques seulement.

Le cœur du film est ailleurs. Dans la détermination d’un homme ordinaire de tout faire pour libérer la mère de son enfant, victime d’une société imparfaite. Cavayé ne cherche pas à ménager le spectateur : le système qui a condamné cette innocente ne reconnaîtra pas son erreur, et l’unique chance qu’a Vincent Lindon de sauver sa famille est de braver tous les interdits…

Plus encore, peut-être, que cette détermination à toute épreuve, d’un homme prêt à tout pour celle qu’il aime, Pour elle est un film sur la filiation. Le personnage de Vincent Lindon ferait-il les mêmes choix s’il n’y avait cet enfant qui crève de ne pas vivre avec sa mère ? Et puis il y a le père de Lindon, taiseux n’ayant plus échangé un mot avec son fils depuis des années, des décennies peut-être. Les regards que ces deux-là s’échangent, et l’étreinte qu’ils se font au dernier moment sont absolument bouleversants.

C’est dans ces moments intimes, plus que dans les grands moments de suspense ou les accès de violence, que le film est le plus marquant : les brèves retrouvailles dans le parloir, les après-midi dans le parc, ou le face à face entre les deux frères. Là, Cavayé réussit ce que peu de cinéastes français ont su faire avec lui : mêler le suspense et l’intime, dans une sorte de tragédie déchirante. La marque d’un auteur à suivre…

 

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