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Archive pour le 15 août, 2014

Winter Sleep (Kiş Uykusu) – de Nuri Bilge Ceylan – 2014

Posté : 15 août, 2014 @ 3:20 dans 2010-2019, CEYLAN Nuri Bilge, Palmes d'Or | Pas de commentaires »

Winter Sleep

Loin de la déambulation presque irréelle de Il était une fois en Anatolie, son précédent long métrage (un chef d’œuvre), qui était à la limite parfois du burlesque, Nuri Bilge Ceylan revient avec une narration plus classique, plus ancrée dans la réalité, constamment palpable dans ce parcours intime d’un personnage à la recherche d’une impossible paix.

Aydin est un homme entre deux âges, entre deux vies. Un ancien comédien sexagénaire, qui s’est retiré avec sa très jeune épouse dans un hôtel coupé du monde, au cœur de l’Anatolie, qu’il a hérité de son père. C’est l’hiver, les touristes se font rares, disparaîtront bientôt pour de bon jusqu’au printemps, et l’isolement ressert inexorablement le microcosme de Aydin à quelques personnes : son épouse, sa sœur divorcée, son employé, des locataires mauvais payeurs, un ami fermier…

Dans les premières scènes, ce qui frappe d’abord, c’est le bien-être qui semble entourer ce personnage, qui s’est aménagé un havre de paix inattendu au-milieu d’un paysage grandiose et hostile : les vastes plaines d’Anatolie, balayées par les rigueurs de l’hiver. Contrastant spectaculairement avec ces paysages que l’on retrouve régulièrement comme des respirations dans le film (parfois comme de simples et sublimes jeux d’ombres, comme lors des visites nocturnes au cheval), l’hôtel troglodyte où se déroule l’essentiel du film est un intérieur feutré et douillet à la lumière chaleureuse (l’éclairage du film mérite tous les prix du monde), où il fait bon vivre, où Aydin s’adonne à une recherche constante de la beauté, et où le temps semble passer avec douceur et bienveillance.

D’ailleurs, on prend le temps dans cet hôtel où tout ne paraît être qu’harmonie : on prend le temps de parler avec des inconnus de passage, d’écouter ses proches, de s’asseoir autour d’une table et de partager le thé avec les visiteurs à n’importe quelle heure du jour ou du soir. Une atmosphère qui respire la quiétude, comme une bulle coupée du monde.

Mais peu à peu, et c’est là toute la beauté du film, Nuri Bilge Ceylan révèle les aspérités, les petits défauts, et les grandes fêlures. Cet ancien comédien retiré du monde cherche à se construire une vie sans contrainte, faisant abstraction de tous les problèmes du monde extérieur, qu’il délègue systématiquement à son employé. Comme une élégance de vie qu’il brandit avec fierté. Cette posture fonctionne-t-elle durant l’été, lorsque la vie grouille ? On ne le saura pas, mais lorsque l’hiver résume la société à un petit microcosme, la réalité des sentiments ne peut plus se cacher… Et cette élégance, bien sûr, ne peut être perçue que comme l’égoïsme d’un homme trop riche et trop insensible qui s’ignore.

Bientôt, on réalise que le vernis ne demande qu’à craquer. Et lorsqu’il craque, c’est avec une violence psychologique incroyable. La solitude et l’enfermement qui exacerbent les fêlures : le thème rappelle le Shining de Kubrick. On y retrouve cette force de l’isolement, que souligne la longueur du film (3h15), qui participe bel et bien à sa force : cette longueur a un sens, et rend palpable le poids de cet hiver pas particulièrement rigoureux, mais qui coupe du monde cette partie de la Turquie, loin d’un Istambul dont on parle souvent, sans jamais rien en voir.

Amoureux de son pays, Ceylan filme aussi mine de rien une Turquie mal connue, faite d’éléments contradictoires. Son film aborde ainsi la rencontre des générations (le couple que forme l’ancien comédien sexagénaire et sa très jeune femme), celle des nantis et des laissés pour compte, celle des croyants et des athées… Et la quasi-impossibilité pour tous ces êtres de se comprendre, d’autant que derrière sa façade affable, Aydin cache mal une haine viscérale pour tout ce qui représente la société et ses codes : l’imam, l’instituteur…

La cohabitation ne se fait finalement qu’au prix d’efforts constants et de faux-semblants, qui ne peuvent être qu’éphémères. Et lorsque les engueulades éclatent, elles sont définitives. Avec sa sœur, avec sa femme, ou avec l’instituteur, il se dit des choses extrêmement violentes, malgré une façade courtoise et bienveillante.

Si le film est aussi fort, c’est aussi parce que Nuri Bilge Ceylan se révèle, plus que dans aucun autre film peut-être, un formidable directeur d’acteur : les comédiens, jusqu’au dernier seconds rôles, sont tous formidables, avec une présence et une justesse rares. Leurs doutes, leurs colères renfermées, leurs désirs contrariés, sont l’essence même de ce film beau et radical, belle Palme d’Or au dernier festival de Cannes.

Obsession (id.) – de Brian De Palma – 1976

Posté : 15 août, 2014 @ 3:17 dans * Polars US (1960-1979), 1970-1979, DE PALMA Brian | Pas de commentaires »

Obsession

Le meilleur de tous les films-hommages à Hitchcock, pour un De Palma en pleine période révérencieuse pour son maître de toujours. Pulsions sera un quasi-pastiche, où le cinéaste s’amusera à citer Hitchcock scène après scène. Obsession existe d’avantage par lui-même, et n’est pas qu’une suite de références, même si références il y a bien, et beaucoup.

De Palma n’a jamais caché que l’idée leur est venue (à lui et au scénariste Paul Schrader) après avoir vu Sueurs froides, qu’ils ont voulu revisité à leur manière. La filiation est évidente : Cliff Robertson, hanté par la mort de sa femme, qui rencontre le sosie de la défunte et tente de retrouver à travers elle celle qu’il n’a jamais oubliée, c’est bien sûr James Stewart dans Vertigo. Et Geneviève Bujold, c’est Kim Nowak.

Ce n’est pas non plus un hasard si De Palma a fait appel à Bernard Herrmann, le compositeur de Hitchcock (notamment sur Vertigo), et s’il filme La Nouvelle Orléans à peu près de la même manière qu’Hitch filmait San Francisco.
Obsession est d’ailleurs un hommage vibrant à Hitchcock, et pas seulement à Sueurs froides. Plusieurs plans sont des copies exactes, quoique discrètes du maître : Cliff Robertson monte l’escalier de la chapelle comme Martin Balsam gravissait l’escalier des Bates dans Psychose ; le meurtre aux ciseaux est une copie conforme de celui du Crime était presque parfait ; la découverte de la grande maison par Geneviève Bujold rappelle les premiers pas de Rebecca à Manderley.

Pourtant, jamais ses références omniprésentes ne sont intrusives, et ne gâchent le plaisir de spectateur… même s’ils donnent clairement une longueur d’avance pour la révélation finale (amenée prématurément, de la même manière que celle de Sueurs froides). Et puis De Palma va au-delà de l’obsession, donnant une dimension plus dérangeante encore à cette histoire de « fantômes », de vengeance et de passé qui resurgit.

Le Brigand bien-aimé / Jesse James, le brigand bien-aimé (The True Story of Jesse James) – de Nicholas Ray – 1957

Posté : 15 août, 2014 @ 3:11 dans 1950-1959, CARRADINE John, RAY Nicholas, WESTERNS | Pas de commentaires »

Le brigand bien-aimé Ray

Un remake du film de Henry King était-il bien nécessaire ? Sans doute pas, mais Nicholas Ray adopte une approche très différente du mythe de Jesse James, notamment dans la structure du film, avec une construction en puzzle qui tourne entièrement autour de la personnalité du bandit et de la perception qu’en ont les Américains.

Esthétiquement, cependant, les choix de Ray ne sont pas loin de ceux de King. La preuve : des stock shots du film de 1939 (dont la spectaculaire chute du cheval) sont utilisés dans le film de Ray, et se marient parfaitement à l’ensemble, malgré les deux décennies qui séparent les deux tournages. La filiation entre les deux films est assez frappante, beaucoup de séquences renvoyant directement au film de King. Surtout, il y a la participation de John Carradine, qui tenait le rôle de Robert Ford dans le film de 1939 et dans sa suite (signée Fritz Lang).

Là où Ray s’éloigne le plus de King, c’est dans sa manière de montrer la violence, sans ménager le spectateur. La toute première séquence ne laisse guère de doute, et impressionne en nous immergeant directement dans la violence la plus brutale, dans le sang et dans la boue. Le romantisme et le mythe qui entourent le personnage de Jesse James ne sont que des fantasmes dont Ray n’est pas dupe le moins du monde.

Âpre et intense, le film aurait quand même mérité des acteurs un peu plus… âpres et intenses. Aussi sympathiques Robert Wagner et Jeffrey Hunter (dans le rôle de Frank James, le frangin) soient-ils, ils font pâle figure à côté de Tyrone Power et Henry Fonda, et n’apportent jamais vraiment cette ambiguïté nécessaire à leurs rôles.

Le film, finalement, est surtout réussi pour les détails souvent anodins en apparence qu’y glisse le cinéaste, comme ces badauds qui se ruent après la mort de Jesse, volant objets et photos dans la maison endeuillée. Des petits riens inutiles pour le déroulement de l’histoire, mais qui apportent un supplément d’âme, une humanité qui justifie à elle seule l’existence de ce remake.

Traquenard (Party Girl) – de Nicholas Ray – 1958

Posté : 15 août, 2014 @ 3:07 dans * Films noirs (1935-1959), 1950-1959, COMEDIES MUSICALES, RAY Nicholas | Pas de commentaires »

Traquenard Ray

Nicholas Ray fait partie de ces cinéastes, comme Elia Kazan, qui ont donné un nouveau souffle à Hollywood, dans les années 50, alors que l’âge d’or des studios arrivait à son fin. Son cinéma marque certainement une évolution, mais pas une rupture, tant il est marqué par celui de ses aînés, ce qui est surtout perceptible dans ses grands films noirs et dans ses westerns. Avec Le Brigand bien-aimé, qu’il tourne l’année précédente, il se démarque ainsi du Jesse James d’Henry King, dont il est le remake, avec une approche très différente, mais aussi en lui rendant un hommage sincère et appuyé.

Avec Traquenard, il va plus loin encore. Film noir, film de gangster, comédie musicale, comédie romantique… Son film est un chant d’amour au grand cinéma hollywoodien. Et le résultat est peut-être son plus grand chef d’œuvre¸ une merveille qui navigue d’un genre à l’autre avec une habileté et une fluidité sidérante. Et avec un couple inédit d’acteurs absolument formidables : Cyd Charisse et ses jambes interminables, dans un rôle moins dansant que ceux auxquels elle est habituée ; et Robert Taylor, immense acteur aux antipodes des postures très Actor’s Studios de James Dean, dont Ray fut le grand metteur en scène.

Taylor est fabuleux dans son rôle d’avocat de la mafia, handicapé par une jambe folle et tiraillé entre son engagement au côté du « parrain » local (génial Lee J. Cobb, absolument réjouissant) et le dégoût que ses méthodes lui inspirent. Un avocat peu regardant pourtant sur le mode de vie de ses clients, mais qui réalise trop tard, lorsqu’il décide de mener une vie rangée avec la belle danseuse dont il est tombé amoureux, qu’il s’est enfoncé bien trop profondément dans le monde du crime…

Party Girl (le titre original est bien plus beau) est un cocktail presque unique dans le cinéma américain, une sorte de trait d’union entre tous ses genres-phare (à l’exception du western), qui réussit sur absolument tous les plans. Le suspense est réellement angoissant (avec une séquence finale à l’atmosphère à couper au couteau), les personnages sont magnifiquement écrits. Même les numéros de music-hall, dont je ne suis pas un grand client habituellement, sont beaux et envoûtants. Un pur plaisir de cinéma, quoi, d’une intelligence et d’une efficacité rares.

Le Cavalier au masque (The Purple Mask) – de Bruce Humberstone – 1955

Posté : 15 août, 2014 @ 3:03 dans 1950-1959, CURTIS Tony, HUMBERSTONE Bruce | Pas de commentaires »

Le Cavalier au masque

Une question me taraude : les spectateurs américains de 1955 trouvaient-ils normal que l’on entende des cris de singe dans une forêt française ? S’étonnaient-ils de voir Bonaparte traverser lui-même le pays, aller et retour, pour aller confier une mission à quelqu’un ? Bon… Le moins que l’on puisse dire, c’est que le film de Bruce Humberstone prend des libertés avec la vraisemblance, et que sa vision du folklore français paraît bien curieux.

Bruce Humberstone, c’est l’un des co-réalisateurs de Si j’avais un million (avec notamment Lubitsch), mais on lui doit aussi, et surtout plusieurs Charlie Chan dans les années 30 (avec Warner Oland), et des Tarzan dans les années 50 (avec Gordon Scott). Autant dire, pas vraiment un auteur, ni un grand formaliste. Il ne fallait donc pas s’attendre à un grand film d’aventures à la hauteur des grands classiques du genre, dont Tyrone Power ou Errol Flynn furent les plus grands interprètes.

Mais dans la longue lignée des ersatz de Zorro, celui-ci est plutôt très sympathique. Kitsch, mais sympathique. A condition quand même de se laisser amuser par la vision d’un Tony Curtis jouant les grandes précieuses dans le civil, et revêtant un costume et un masque pourpre (c’est dans le titre original) du plus bel effet… particulièrement discret pour une embuscade en pleine nature.

Le film respecte parfaitement le cahier des charges du genre : des duels, des chevauchées, une romance, et un arrière plan historique dont il vaut mieux ne pas connaître grand-chose, tant on est dans la caricature. Dans le rôle titre, Tony Curtis, la grande vedette Universal de l’époque, est charismatique, bondissant. Sans surprise, mais très à l’aise dans la comédie, comme dans les scènes d’action.

• Universal vient d’éditer le DVD du film dans sa collection « Universal Classics » à petit prix, sans bonus, et dans un format 4/3 bien loin du Cinemascope d’origine.

 

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