Le Fier rebelle (The Proud Rebel) – de Michael Curtiz – 1958
Après avoir quitté la Warner, dont il a signé quelques-uns des plus grands chef-d’œuvre (L’Aigle des mers, Casablanca…), Michael Curtiz n’a pas signé que des grandes réussites. Mais ce Fier rebelle est sans doute l’un des plus beaux de la fin de sa carrière. Retrouvant Olivia de Havilland, son héroïne de Capitaine Blood et Robin des Bois, il signe un western simple et beau, dans la lignée de Shane : Alan Ladd y trouve un rôle similaire, celui d’un homme qui tente d’oublier son passé, et de construire une nouvelle vie pour un enfant, cette fois le sien.
Toute la grandeur d’Hollywood est là : cette capacité à transformer des torrents de bons sentiments en une œuvre intime et émouvante. Alan Ladd est un père qui traverse l’Amérique à la recherche d’un médecin qui pourrait soigner son fils, muet depuis qu’il a assisté à la mort de sa mère durant la guerre civile (joué par David Ladd, le propre fils de la star). On sait d’avance ce qui va se passer, bien sûr, surtout lorsque le père et le fils croisent la route de cette vieille fille encore magnifique jouée par Olivia De Havilland : ce qui manque à ce gamin, c’est une vraie famille, ce qu’il trouvera finalement avec un père, une mère d’adoption, une ferme, et son chien.
Tous les poncifs de la famille américaine sont là, pourtant, élevés en idéaux absolus. Ça devrait agacer, mais non : le film est une splendeur, superbement photographié par Tedd McCord qui souligne les passages les plus intimes par des couleurs chaudes d’un romantisme absolu. Curtiz, lui, n’a rien perdu de son talent : son sens du cadre et du rythme est intact, tout comme sa capacité à offrir de grands moments aux plus petits seconds rôles.
C’est le cas avec John Carradine, qui parvient à marquer le film de son empreinte alors qu’il n’apparaît que dans une courte scène dans les premières minutes, sans le moindre impact sur l’histoire. Mais cette simple scène (Carradine quittant la ville croise Ladd et son fils qui arrivent) suffit à dévoiler le caractère de Ladd, sa lassitude, et ses liens si forts avec son fils.
Tout le casting est parfait, d’ailleurs autour du couple de stars : Henry Hull en juge grande gueule mais bon fond, Cecil Kellaway en médecin au grand cœur, Dean Jagger dans le rôle incontournable du gros éleveur machiavélique (un rôle qui devait être tenu par Adolphe Menjou) ou encore le jeune Harry Dean Stanton en petite frappe…
Mais il y a surtout le chien, loin d’être un simple élément de décor : véritable star du film, il est le moteur de l’histoire, la source des scènes les plus émouvantes et les plus douloureuses. Les plus surprenantes aussi, lorsque Curtiz le filme longuement à l’action dans ses œuvres de chien de berger d’exception. A se demander même, par moments, si Curtiz n’a pas tourné ce film uniquement pour mettre ce chien en scène… Ce serait bien sûr oublier que Le Fier rebelle est une réussite à tous les niveaux.
• Le film a été édité chez Artus, généralement plus habitué à dénicher des séries B, voire C, D ou Z. En bonus, une présentation par Eddy Moine, aussi érudit que son papa.
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