Brigadoon (id.) – de Vincente Minnelli – 1954
La comédie musicale n’est pas exactement le genre le plus couru de ce blog. Mais j’ai toujours eu pour ce Brigadoon une tendresse particulière. C’est un chef d’œuvre enchanteur qu’a signé Minelli, jetant un pont entre le rêve et la réalité (au sens propre comme au sens figuré).
Gene Kelly et Van Johnson (excellent mais inattendu dans un tel rôle, pour lequel on aurait plutôt imaginé Donald O’Connor, le comparse de Kelly dans Chantons sous la pluie) sont deux chasseurs perdus dans les Highlands, qui découvrent par hasard un village qui ne figure pas sur les cartes. Ils y découvrent des habitants qui semblent hors du temps, totalement heureux, et fermés aux malheurs du monde. Ils finissent par découvrir la vérité : un miracle a fait de ce village, Brigadoon, une bulle en dehors du temps, qui n’apparaît qu’une journée tous les cent ans…
Envisagé en extérieurs en Ecosse, le film a finalement été tourné en studio, la météo peu clémente des Highlands ayant découragé les producteurs. Mais ce choix de repli se révèle payant : les décors, la brume, la lumière… Minelli filme une Ecosse fantasmée qui convient parfaitement à l’histoire, et à ce village, comme sorti d’un songe.
Brigadoon, c’est le paradis perdu, un idéal de vie. Le symbole de l’amour absolu, que trouve Gene Kelly en la personne de Cyd Charisse. Là, tout n’est que fête, amitié, chansons, danses, légèretés… Un pur décor de comédie musical, en somme. Tout dans la mise en scène, dans les chorégraphies, dans les poses de Cyd et les sourires de Gene, évoque le bonheur parfait, et l’harmonie.
Pourtant, Minelli glisse un grain de sable dans ce bonheur parfait : un jeune homme qui, seul, se sent prisonnier de ce village trop idyllique dont les habitants ne peuvent pas sortir sous peine de rompre l’enchantement et de faire disparaître le village. Un jeune homme qui ne rêve que de voler de ses propres ailes, et tente de partir. Personne ne lui veut de mal bien sûr, mais tout le monde essaie de l’arrêter, et le jeune homme se fait tuer. Un accident, mais on se met d’accord pour ne plus même en parler. Comme s’il n’avait jamais existé.
Et puis, effectivement, on n’en parle plus. La légèreté, l’amour, le rêve, la musique et la danse reprennent leurs droits. La communauté parfaite a été sauvée, au prix fort pour le seul individualiste du village. Malgré l’amour fou, malgré le happy end miraculeux, ce « prix à payer » laisse un arrière-goût amer à ce magnifique feel-good movie.
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