Le Drame de Shanghaï – de Georg Wilhelm Pabst – 1938
Grand cinéaste du muet, Pabst a poursuivi une carrière loin d’être inintéressante, au début du parlant. Avec ce Drame de Shanghaï, dont les héros sont des laissés pour compte de la grande histoire en marche, le cinéaste retrouve même une inspiration, un sens de l’atmosphère, et par moments une ambition qui rappelle ses plus grandes heures.
L’atmosphère, c’est celle de la Chine mystérieuse. Atmosphère envoûtante et inquiétante, à laquelle s’ajoute l’omniprésente menace de guerre, qui contribue à renforcer l’aspect désespéré d’un film qui, tourné à une autre époque, aurait sans doute eu une fin plus heureuse. Les dernières séquences sont l’œuvre d’un réalisateur qui observe l’état du monde sans illusion.
Film d’atmosphère (et de décors), Le Drame de Shanghaï bénéficie aussi des excellents dialogues de Henri Jeanson, qui disent mieux que de longs discours ou d’inutiles flash-backs le passé des personnages, en particulier de Christl Mardayn (la chanteuse Kay Murphy) et Louis Jouvet, anciens aristocrates russes qui ont grandi ensemble, mais que la révolution de 1917 a transformés en aventuriers apatrides.
Leurs destins à tous deux, et le poids de l’histoire en marche, tranchent avec les rebondissements et l’esprit feuilleton du film, cette histoire d’une bande mystérieuse appelée le Serpent noir, qui évoque curieusement Tintin.
La comparaison n’est sans doute pas anodine, tant il paraît évident que Le Drame de Shanghaï et Le Lotus bleu se sont nourris l’un l’autre (la première version de la BD, en noir et blanc, était sortie peu avant, mais Hergé la remodèlera plus tardpour la version couleur que l’on connaît). La ligne claire de Tintin est là, sa manière d’imbriquer la construction feuilletonnante et l’arrière-plan très documenté.
Si le personnage du journaliste Franchon ressemble étrangement à Tintin, ce sont des plans entiers, certains personnages et même des figurants aperçus au détour d’un plan, qui semblent sortir de l’œuvre d’Hergé.
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