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Archive pour le 28 février, 2014

Obsessions (Flesh and Fantasy) – de Julien Duvivier – 1943

Posté : 28 février, 2014 @ 2:17 dans 1940-1949, DUVIVIER Julien, FANTASTIQUE/SF, STANWYCK Barbara | Pas de commentaires »

Obsessions

Exilé aux Etats-Unis durant la guerre, Duvivier y a tourné une poignée de films qui sont loin d’avoir la même réputation que ses films français d’avant-guerre, mais qui n’ont rien d’anodins non plus. Ce Flesh and Fantasy en particulier, souvent ignoré, peut-être parce qu’il s’agit d’un film à sketch, genre parfois un peu foutraque.

Mais cette fois, il y a une vraie cohérence dans le choix des trois histoires, et dans la manière qu’a Duvivier de les mettre en images : avec une belle utilisation de trucages (surimpressions, faux reflets, séquences de rêves…) qui illustrent joliment l’effet du subconscient sur le comportement des personnages.

C’est le fil conducteur des trois histoires que lit un homme à l’un de ses amis (Robert Benchley, vedette de courts métrages dont la série How to…), troublé par un rêve et sa rencontre avec une diseuse de bonne aventure.

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La première histoire est introduite de la plus belle des manières : un cadavre découvert par d’étranges personnages tout de noir vêtus, aux masques grimaçants. Un temps, on imagine être en enfer, mais la caméra révèle bientôt une affiche indiquant qu’il s’agit d’une fête de Mardi-Gras, le soir des masques.

L’héroïne est une femme aigrie qui se croit laide (laideur que Duvivier souligne par un éclairage par en-dessous aussi simple qu’efficace), mais à qui une rencontre avec un étrange vieillard va offrir une nouvelle chance : un masque qui lui donne, quelques heures durant, les traits de céramique d’une belle femme (visage qui ressemble étrangement à celui de Veronika Lake), et surtout la confiance dont elle avait besoin.

C’est la plus morale des trois histoires : l’apparence ne serait que le reflet de la beauté intérieure. Mais c’est joliment fait, avec une belle histoire d’amour naissante (avec Robert Cummings), dans l’effervescence festive, mais curieusement morbide de cette soirée costumée.

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La deuxième histoire offre à Edward G. Robinson un rôle taillé sur mesure pour lui, pas si loin de ceux qu’il tiendra chez Lang : un homme obsédé par son destin, que lui a révélé un diseur de bonne aventure (Thomas Mitchell). Cet homme promis à un beau mariage (avec Anna Lee) doit commettre un meurtre, c’est en tout cas ce qui est écrit dans sa main…

L’obsession est vraiment le sujet de ce sketch, obsession qui prend le visage du reflet de Robinson dans la glace, sorte d’ange maudit qui lui rappelle sans cesse qu’il tuera. A tel point qu’il se décide à passer à l’acte pour se débarrasser de cette fatalité. Dame May Whity (la Miss Froy d’Une femme disparaît) et C. Aubrey Smith (le père assassiné de Quatre hommes et une prière) feront des cibles parfaites.

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Tout aussi réussie, la troisième histoire est une déclinaison sur le même thème, mais avec l’espoir en plus. Un funambule (Charles Boyer, co-producteur du film avec Duvivier) rêve qu’il tombe de son fil devant les yeux d’une inconnue (Barbara Stanwyck). Le rêve le hante, jusqu’à ce qu’il rencontre cette femme sur un bateau…

Il y a là aussi de beaux trucages : Charles Boyer filmé en gros plan sur un fil à 25 mètres de haut, des réminiscences de ses rêves qui apparaissent soudain à l’écran… Des effets qui soulignent le malaise et les doutes du personnage.

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Obsessions n’a peut-être pas la puissance de ses grands chef d’œuvre, mais cette deuxième incursion de Duvivier dans le film à sketchs hollywoodien (après Tales of Manhattan) est un sans faute, avec une bien belle distribution…

Maris et femmes (Husbands and wives) – de Woody Allen – 1992

Posté : 28 février, 2014 @ 2:06 dans 1990-1999, ALLEN Woody | Pas de commentaires »

Maris et femmes

En terrain connu, abordant une fois de plus les rapports entre les hommes et les femmes, Woody Allen parvient une nouvelle fois à surprendre et à signe un chef d’œuvre qui s’inscrit dans la lignée naturelle de ses précédents films, tout en marquant une rupture assez radicale.

Formellement, d’abord, Husbands and wives confirme la volonté du cinéaste d’explorer de nouveaux horizons. Loin de l’hommage au film noir de son précédent opus, Ombres et brouillard, Allen adopte ici un style qui évoque le film documentaire un peu improvisé. Caméra à l’épaule, faux raccords, coupes volontairement approximatives… Allen crée le sentiment d’un cinéma vérité parfois troublant : la sensation d’intimité s’en trouve renforcée, comme dans cette belle séquence d’orage, au cours de laquelle Woody se met en scène avec Juliette Lewis, facilement de 30 ans sa cadette, dans ce qui est l’un des baisers les plus romantiques de ces années-là.

Mais ce passage délicat et sensuel n’est qu’une parenthèse. Car le ton est, lui aussi, plus radical que dans les précédents films d’Allen. Avec cette histoire de deux couples qui connaissent les mêmes difficultés, mais suivent des destins inverses (Woody Allen et Mia Farrow, Judy Davie et Sydney Pollack), Allen souligne comme jamais peut-être la difficulté de vivre en couple, et l’aspect éphémère de la passion et des illusions.

Au cours d’une discussion passionnée en pleine nuit, Woody évoque les moments les plus mémorables de son couple avec Mia Farrow : une promenade au clair de lune, un éclat de rire, qu’importe… Mais elle lui répond qu’il ne s’agit que de souvenirs isolés, qui ne racontent pas ce qu’est leur vie ensemble. Une discussion calme, et même tendre, mais le propos est dur, sans concession. Et aucun des deux n’a encore compris qu’il s’agissait là d’un dialogue de rupture…

Dans Husbands and wives, hommes et femmes semblent constamment en décalage, jamais dans le même timing. Mia veut un enfant depuis des années, mais Woody n’accepte l’idée que lorsqu’il est trop tard. Sydney Pollack veut expérimenter le célibat, mais il ne réalise ce qu’il perd que lorsque sa femme Judy Davis commence à y prendre goût…

Sans vouloir sur-interpréter, ni dresser des ponts systématiques entre la vie et l’œuvre, ce grand film sur le couple, sombre et sans illusion, semble ouvertement marquer la fin de quelque chose, comme si Allen ne pouvait aller plus loin dans cette direction. Difficile de n’y voir qu’un hasard : Maris et femmes est le dernier de ses films dont Mia Farrow est l’interprète (et l’égérie), avant la douloureuse rupture. Avec son film suivant, Meurtre mystérieux à Manhattan, Woody Allen surprendra encore avec un nouveau changement de cap, radical, et réjouissant.

Le Drame de Shanghaï – de Georg Wilhelm Pabst – 1938

Posté : 28 février, 2014 @ 2:02 dans 1930-1939, PABST Georg Wilhelm | Pas de commentaires »

Le Drame de Shanghai

Grand cinéaste du muet, Pabst a poursuivi une carrière loin d’être inintéressante, au début du parlant. Avec ce Drame de Shanghaï, dont les héros sont des laissés pour compte de la grande histoire en marche, le cinéaste retrouve même une inspiration, un sens de l’atmosphère, et par moments une ambition qui rappelle ses plus grandes heures.

L’atmosphère, c’est celle de la Chine mystérieuse. Atmosphère envoûtante et inquiétante, à laquelle s’ajoute l’omniprésente menace de guerre, qui contribue à renforcer l’aspect désespéré d’un film qui, tourné à une autre époque, aurait sans doute eu une fin plus heureuse.  Les dernières séquences sont l’œuvre d’un réalisateur qui observe l’état du monde sans illusion.

Film d’atmosphère (et de décors), Le Drame de Shanghaï bénéficie aussi des excellents dialogues de Henri Jeanson, qui disent mieux que de longs discours ou d’inutiles flash-backs le passé des personnages, en particulier de Christl Mardayn (la chanteuse Kay Murphy) et Louis Jouvet, anciens aristocrates russes qui  ont grandi ensemble, mais que la révolution de 1917 a transformés en aventuriers apatrides.

Leurs destins à tous deux, et le poids de l’histoire en marche, tranchent avec les rebondissements et l’esprit feuilleton du film, cette histoire d’une bande mystérieuse appelée le Serpent noir, qui évoque curieusement Tintin.

La comparaison n’est sans doute pas anodine, tant il paraît évident que Le Drame de Shanghaï et Le Lotus bleu se sont nourris l’un l’autre (la première version de la BD, en noir et blanc, était sortie peu avant, mais Hergé la remodèlera plus tardpour la version couleur que l’on connaît). La ligne claire de Tintin est là, sa manière d’imbriquer la construction feuilletonnante et l’arrière-plan très documenté.

Si le personnage du journaliste Franchon ressemble étrangement à Tintin, ce sont des plans entiers, certains personnages et même des figurants aperçus au détour d’un plan, qui semblent sortir de l’œuvre d’Hergé.

Dark Blue (id.) – de Ron Shelton – 2002

Posté : 28 février, 2014 @ 1:59 dans * Thrillers US (1980-…), 2000-2009, SHELTON Ron | Pas de commentaires »

Dark Blue

Passé relativement inaperçu, par rapport à un Training Day au thème semblable (on retrouve d’ailleurs le même David Ayer aux scénarios de ces deux films), Dark Blue n’a pourtant rien perdu de sa puissance, en dix ans. Ce polar noir, noir, noir, porte à la fois la marque de son scénariste, et surtout celle de James Ellroy, qui a écrit l’histoire originale. Il y a mis ses obsessions : ce L.A. bouffé par la corruption, la violence et le racisme qui peuple ses romans noirs.

Le flic interprété par un Kurt Russell renversant ressemble aux personnages rongés par leurs démons qu’il aime mettre en scène dans ses livres. Un type dévoré par une machine corrompue qui l’a entraîné dans une abyssale descente aux enfers. Et, bonne nouvelle, ni le scénar, ni la réalisation, plutôt inspirée, de Ron Shelton, ne font quoi que ce soit pour atténuer la noirceur du propos.

La belle idée du film est d’avoir situé l’intrigue durant le printemps 1992, à quelques heures de l’acquittement des flics qui ont tabassé Rodney King un an plus tôt, verdict qui va mettre la ville à feu et à sang, et mettre en évidence l’immense corruption et les méthodes douteuses du LAPD. Le destin de Perry (Kurt Russell) est lié à ces émeutes : l’un comme l’autre symbolisent la fin d’un système, l’explosion de violence nécessaire au grand nettoyage…

Bien sûr, les lecteurs fidèles d’Ellroy (j’en suis) auront l’impression d’avoir déjà vu ça mille fois. Mais l’esprit de l’auteur est bien là, tout comme celui du scénariste. David Ayer, cinéaste, aurait sans doute apporté un aspect un peu plus rugueux au film, que Ron Shelton peine parfois à donner. Mais la tension est bien là, et il y a quelque chose de shakespearien et de profondément tragique dans le destin de ce flic embrigadé par son père génétique et une sorte de père de substitution depuis sa plus tendre enfance, qui rompt finalement avec ce qui a toujours été sa vie.

Kurt Russel n’a peut-être jamais aussi bien que dans ce rôle de flic qui flirte de plus en plus avec les abysses, perd son âme, avant de se confronter, tardivement, à ce qu’il est et surtout ce qu’il n’est plus. La scène de rupture avec sa femme, parenthèse apaisée dans un enchaînement de violence, sonne la rupture du personnage avec ses propres démons. Une scène magnifique, la plus belle du film, au cours de laquelle son humanité affleure enfin…

 

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