September (id.) – de Woody Allen – 1987
Woody Allen renoue avec l’influence bergmanienne qui lui avait déjà inspiré Interiors, quelques années plus tôt. Le thème est sensiblement le même, le ton aussi, ainsi que le décor : une vieille maison de famille dans laquelle se retrouvent des personnages en crise. Mais comme toujours chez Allen, loin de se répéter, son cinéma se nourrit de lui-même : ce film s’inscrit dans la lignée de tous ceux qu’il a déjà réalisé, maillon différent, mais totalement cohérent.
Il y a du Intérieurs, mais aussi du Hannah et ses sœurs, pour la relation entre une fille et sa mère, ancienne vedette à la vie dissolue. Il y a aussi du Comédie érotique d’une nuit d’été : ce huis-clos dans une (magnifique) maison à la campagne se déroule à la fin d’un été qui aura été une parenthèse dans la vie des personnages qui s’apprêtent tous à retrouver l’effervescence de New York, ou la monotonie de leur vie.
Un été que personne n’oubliera, marqué par des passions contrariées, des ressentiments qui resurgissent… On est bien chez Allen : chaque personnage a son proche cousin dans les précédents films qu’il a tournés. Mais comme toujours, il y a un petit quelque chose de radicalement nouveau, y compris dans sa manière d’appréhender la mise en scène. Cette gageure de ne jamais quitter la maison par exemple, procédé théâtral qui ne fait que renforcer l’éphémère intimité des personnages, dont on sait qu’ils finiront par quitter cette maison, et donc retrouver leur place dans le monde.
Il y a aussi un parti-pris étonnant : la relation entre la fille (Mia Farrow) et sa mère (Elaine Stritch) s’inspire de « l’affaire Lana Turner ». Adolescente, la première aurait tué le gangster avec lequel sa mère vivait, comme la fille de Lana Turner a tué le fameux Johnny Stompanato lorsqu’elle avait 14 ans. Un fait divers qui inspire Woody Allen, qui imagine les effets dévastateurs d’un tel acte sur l’avenir de l’ado-assassin.
Chaque personnage a ses fantômes, ses angoisses : la mère qui reconnaît son dégoût de vieillir lors d’une scène bouleversante face à son miroir ; son ami (Jack Warden) angoissé par l’absurdité de l’existence dans un univers qui ne repose que sur le hasard ; la meilleure amie (Diane Wiest) tiraillée entre sa loyauté et son besoin de plaire encore…
Superbe, cette non-comédie de Woody Allen est d’une justesse et d’une douleur déchirantes.
Laisser un commentaire
Vous devez être connecté pour rédiger un commentaire.