La Divorcée (The Divorcee) – de Robert Z. Leonard – 1930
Il y a une belle liberté de ton dans ce drame de mœurs, assez typique de la production hollywoodienne du début des années 30. Pas vraiment réputé pour son sens du rythme (et ici, la bande son particulièrement pauvre n’aide pas), Robert Z. Leonard signe pourtant un film réellement passionnant, portrait d’une génération qui semble hésiter constamment entre des plaisirs immédiats et vains, et des rapports aux autres plus profonds et plus sincères.
C’est très américain, bien sûr, avec une morale finalement impeccable. Mais sans faux-culterie non plus : Leonard réussit un beau portrait de couple, sur un ton remarquablement juste. La passion des premiers jours, les habitudes qui s’installent, les tromperies, la défiance, la colère, les regrets… On a déjà vu ça cent fois, mais qu’importe : Chester Morris est parfait dans le rôle du mari volage incapable d’accepter que sa femme lui rende la pareil, réjouissant symbole de l’hypocrisie des hommes. Quant à Norma Shearer, protégée d’Irving Thalberg et grande star de l’époque, elle est magnifique, trouvant le parfait équilibre entre les aspirations égalitaristes de cette femme qui fait « un métier d’homme » (un aspect pas assez développé, hélas), et son amour total pour son mari. Elle a d’ailleurs décroché le troisième Oscar de la meilleure actrice pour ce rôle.
La même justesse de ton entoure les autres personnages de cette « bande » d’amis dont l’unité vole en éclats au fur et à mesure que les couples se forment et que les drames s’enchaînent. Ainsi, celui de l’amoureux transi de Norma Shearer, contraint d’épouser une jeune femme folle de lui, mais défigurée lors d’un accident qu’il a provoqué alors qu’il était ivre. Il y a une scène bouleversante et pudique à la fois, où cette dernière le supplie de ne pas le quitter.
Chaque personnage a sa fêlure, y compris celui du « meilleur copain » qui affiche une décontraction à toute épreuve, mais qui sera pourtant celui par qui le drame va arriver. Dans ce rôle tout en légèreté apparente, Robert Montgomery cabotine gentiment, et dévore l’écran. Parfaitement aimable à première vue, mais bien plus complexe qu’il n’y paraît. Comme le film, en fait…
• Le film figure sur le volume 2 de la collection Forbidden Hollywood, consacrée aux films pre-code. Ce coffret zone 1 (avec des sous-titres français) contient d’autres pépites, notamment 3 on a match de Mervyn LeRoy et Night Nurse de William Wellman.
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