La Flamme pourpre (The Purple Plain) – de Robert Parrish – 1954
Parrish est décidément un cinéaste qui ne ressemble à aucun autre, et qui mériterait d’être redécouvert, lui dont la carrière semble oubliée, quelque part entre l’âge d’or d’Hollywood (il est un disciple de John Ford, dont il fut un proche) et le Nouvel Hollywood (la première séquence de La Flamme pourpre évoque d’une certaine manière celle de Apocalypse Now).
Avec La Flamme pourpre, il signe un film de guerre qui ne ressemble pas aux films de guerre, comme il fera avec L’Aventurier du Rio Grande un western qui ne ressemble pas aux westerns. Un film de guerre tourné au plus près des personnages, et surtout où on ne voit jamais l’ennemi. Pas d’altercation ici, pas de face à face meurtrier, mais des bombardements annoncés par de lointains bruits, et surtout une douleur qui touche les autochtones au plus profond d’eux-mêmes.
Il y a dans ce film magnifique une émotion à fleur de peau qui emporte le spectateur au moment où il s’y attend le moins. Parce que le héros, interprété par un Gregory Peck exceptionnel dans un rôle tout en nuances, est un homme brisé par la guerre, hanté par la mort (hallucinante scène de flash-back), que Parrish filme avec une tendresse extrême. Et que cet homme bouleversant renaît malgré tout, dans un pays, la Birmanie, ravagé par la peur et la douleur.
Le film se sépare en deux parties assez distinctes. La première raconte la renaissance de Gregory Peck, homme brisé par la mort de sa femme dans un bombardement, grâce à sa rencontre avec une Birmane au passé également douloureux, dans un décor presque paradisiaque mais que l’on pressent fragilisé par la guerre toute proche.
La seconde partie ressemble a priori plus à un pur film de guerre : Peck et deux autres soldats perdus au cœur du territoire japonais après le crash de leur avion. Mais on est plus prêt de Côte 465 d’Anthony Mann que d’un film de genre héroïque. En plus radical encore, car la vraie menace ici, c’est le soleil, la soif et le désespoir, pas les Japonais dont personne ne semble réellement se soucier.
La guerre n’est le sujet du film que par les ravages qu’elle provoque chez les personnages. Pas par le côté spectaculaire des combats, mais par l’impact que cette violence, dont on ne voit rien, a sur le rapport à la vie ou à la mort de ces hommes et de ces femmes. Et Parrish reste fidèle à son thème avec une intelligence et une délicatesse infinies, absolument magnifiques.
• Ce film rare et précieux vient de sortir en DVD chez Sidonis, dans la collection « Classique de guerre », avec des présentations passionnées de Patrick Brion, et surtout Bertrand Tavernier.
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