Treize jours (Thirteen Days) – de Roger Donaldson – 2000
Avoir fait courir Kevin Costner dans les couloirs du Pentagone (dans le très réussi Sens unique) faisait-il de Roger Donaldson le réalisateur idéal pour ce Treize jours, dans lequel Kevin Costner arpente les couloirs de la Maison Blanche ? Evidemment non. Honnête artisan du cinéma de genre (on lui doit La Mutante, Cocktail ou le remake de Guet-Apens), Donaldson n’est, ici, jamais à la hauteur de son sujet.
Les treize jours du titre sont ceux de la fin 1962, durant lesquels la découverte de missiles soviétiques à Cuba a failli déclencher une troisième guerre mondiale. Le sujet aurait pu être traité de bien des façons : en plongeant au cœur d’une population américaine traumatisée par l’hypothèse d’une attaque nucléaire ; en mettant en perspective les intérêts géopolitiques des deux camps… Le scénario adopte plutôt le point de vue de trois hommes dont dépend le sort du monde : le président JFK, son frère Bobby, et le conseiller politique de Kennedy, Kenneth O’Donnel.
Il y a beaucoup de bonnes idées autour de ce scénario, qui s’intéresser aux conflits moraux des Kennedy (présentés comme la bonne conscience de l’Amérique), et qui fait de ce conseiller de l’ombre interprété par Costner un « frère de l’ombre ». Le scénario de David Self (le scénariste des Sentiers de la Perdition) met constamment en parallèle les négociations secrètes dans les arcanes de la Maison Blanche, et le portrait de ce Ken O’Donnel qui aime les Kennedy comme des frères, mais qui a constamment conscience de ne pas être des leurs.
Le choix des acteurs, aussi, est irréprochables : Bruce Greenwood et Steven Culp font des Kennedy très convaincant, et Kevin Costner est parfait, lui qui est un habitué de l’administration Kennedy, grâce à deux de ses meilleurs films (Un monde parfait se déroulait quelques jours avant le 22 novembre 63, et JFK évoquait la contre-enquête après l’assassinat).
Mais dès le générique de début, alors que les noms des acteurs apparaissent sur des stock-shots d’explosion nucléaire, on pressent que quelque chose cloche. Trop d’ambition, trop d’enjeux dans cette histoire. Et pas assez de personnalité et d’envergure chez ce cinéaste décidément pas taillé pour un tel sujet. Plate et sans imagination, la mise en scène de Donaldson n’est jamais à la hauteur, et ne parvient jamais à rendre tangible la tragédie qui se noue, pas plus que les tourments des protagonistes.
Pour « faire vrai », et peut-être pour renforcer la parenté avec JFK, Donaldson passe par moments de la couleur au noir et blanc, mais il n’est pas Oliver Stone qui, lui, avait du style alors. Dommage, parce que le sujet était plein de promesses, et parce que quelques passages sont plutôt réussis (la scène où Costner observe les Kennedy, conscient qu’il ne sera jamais des leurs, la belle prestation du représentant américain aux Nations Unies…). Mais Treize jours est sage, beaucoup trop sage. On ne s’ennuie pas vraiment : le scénario réserve d’innombrables surprises (toutes historiques). Mais ce sentiment d’être passé à côté d’un grand film est constamment palpable.
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