Panic Room (id.) – de David Fincher – 2002
Au choix, Panic Room est le film le plus virtuose, ou le plus vain, de David Fincher. Les deux qualificatifs vont de pair, pour ce thriller qui est, sur le papier au moins, et de loin, le film le moins ambitieux du réalisateur de Seven, Zodiac ou Social Network. Jugez plutôt : une mère fraîchement divorcée et sa fille adolescente emménagent dans une énorme maison de Manhattan, dotée d’une « panic room », une chambre forte inviolable qui permet aux habitants de se mettre à l’abri en cas de menace ou d’intrusion. Devinez quoi : la première nuit, trois intrus pénètrent dans la maison.
Rien de plus : juste un thriller en huis clos, une histoire que Hitchcock aurait sans doute beaucoup aimée. Les clins d’œil au maître du suspense sont d’ailleurs omniprésents. Plus ou moins évidents, mais bel et bien présents : la maison tout en verticalité qui évoque Psychose, les deux héroïnes cloîtrées qui observent la menace par écrans interposés qui cite Fenêtre sur cour, l’utilisation du faux plan séquence qui ne peut pas ne pas faire penser à La Corde…
La démarche de Fincher, d’ailleurs, ressemble beaucoup à celle d’Hitchcock dans nombre de ses films : comment s’emparer d’un sujet banal et pas franchement passionnant, et le transcender par la seule grâce de la mise en scène. Fincher semble ainsi n’avoir choisi ce sujet que pour le plaisir de jouer avec toutes les possibilités d’un décor unique (à l’exception de l’introduction et de la conclusion du film) : cette maison sur quatre niveaux qui lui inspire des mouvements de caméra verticaux et horizontaux pensés au millimètre.
Trop peut-être : c’est en tout cas l’impression tenace qui me restait de la sortie en salles. Le fameux plan impossible, où la caméra semblait traverser les entresols, les barreaux des escaliers, et même passer à travers l’anse d’une cafetière, m’avait paru le comble du tape-à-l’œil inutile et grotesque. Avec le recul, et une dizaine d’années plus tard, me voilà plus nuancé. Il y a certes un côté virtuose gratuit dans ces vastes plans séquences inimaginables sans le numérique. Mais Fincher donne aussi l’impression de justifier avec intelligence l’utilisation des effets spéciaux : des outils qui permettent de se débarrasser des contraintes purement physiques pour permettre la réalisation des plans parfaits, ceux qui conviennent le mieux à la scène présente.
Parce que le moindre mouvement de caméra, le moindre plan de coupe… Tout est ici au service du suspense et de l’impression d’étouffement et de menace qui pèse sur les personnages de Jodie Foster (parfaite, dans un rôle prévu à l’origine pour Nicole Kidman) et de sa fille. Comme dans The Game, autre film mal aimé de Fincher, la virtuosité du cinéaste est totalement destinée au plaisir du spectateur, plaisir basé sur la manipulation et sur la perception. Des thèmes décidément très hitchcociens…
Laisser un commentaire
Vous devez être connecté pour rédiger un commentaire.