Arrêtez-moi – de Jean-Paul Lilienfeld – 2012
Une nuit, dans un commissariat du Nord de la France, une femme vient confesser à l’officier de garde le meurtre de son mari, commis des années plus tôt. Le flic, une femme totalement désabusée, n’aspire qu’à passer une nuit au calme. Elle est contrainte d’écouter l’histoire de l’intruse…
L’affiche donne envie : Sophie Marceau et Miou-Miou, deux des meilleures actrices françaises de ces trente dernières années, dans un huis clos qui évoque forcément le Garde à vue de Claude Miller… Le face-à-face tient en partie ses promesses. En partie seulement, parce que même si les deux comédiennes sont parfaites, les dialogues qu’elles débitent semblent constamment trop écrits. C’est bien simple : on a souvent l’impression tenace qu’elles sont en train de lire du Jean Teulé.
Le film est l’adaptation du roman La loi de la gravité. N’ayant pas lu celui-ci, je ne saurais dire si c’est une adaptation fidèle. Mais la langue, elle est bien celle de l’écrivain. On y retrouve son style ironique et sa manière d’évoquer des sujets très glauques avec un humour parfois enfantin et souvent amusé. Un style que Lilienfeld a repris tel quel dans ses dialogues, oubliant au passage que les dialogues de romans ne sont pas faits pour le cinéma.
Du coup, tout ça sonne parfois très faux, et les deux personnages perdent en crédibilité. Sophie Marceau, qui fait bien attention de ponctuer ses phrases de liaisons mal-t-à propos et d’une grammaire parfois hasardeuse, parle aussi de temps en temps comme une agrégée de philosophie. Dommage, parce qu’elle fait de beaux efforts pour non pas s’enlaidir, mais paraître banale.
On retrouve dans le film les mêmes qualités et les mêmes défauts que dans les livres de Jean Teulé : un séduisant mélange d’ironie et de cynisme, un peu gâché par une volonté constante d’être brillant et intelligent, en affichant une légèreté feinte.
Le film commence fort, en nous faisant plonger dans le quotidien d’une femme battue (avec l’utilisation toujours très discutable de la caméra subjective). Le face-à-face entre cette femme battue et meurtrière et la policière désenchantée, qui porte elle aussi une lourde croix, sera plein de surprises. Certaines belles et émouvantes, d’autres étonnantes et parfois lourdingues.
Trop bavard, le film n’est finalement jamais aussi beau que quand il se tait : lors de quelques plans de la ville qui révèlent, bien plus que tous les dialogues, le mal-être et le lourd héritage de ces deux personnages cassés par la vie, mais que leur rencontre improbable va sauver.
• Le film vient de sortir en DVD, édité par les éditions France Télévisions, avec notamment un making of qui donne le plaisir de voir Sophie Marceau et Miou-Miou au travail.
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