Bellamy – de Claude Chabrol – 2009
Ces deux-là auraient dû faire toute une carrière ensemble. Pourtant, Chabrol a attendu son ultime film pour diriger Depardieu. La rencontre de ces deux ogres, fous de cinéma et de bouffe, avait tout d’une évidence. C’est aussi un retour aux sources pour Chabrol, qui retrouve une veine très « simenonienne ». Même si le film n’est pas une adaptation de Simenon, l’ombre du père de Maigret plane continuellement (la dédicace « aux deux George » – l’autre étant Brassens, lui aussi omniprésent).
Ce commissaire Bellamy a tout du personnage fétiche de l’écrivain. Même aspect débonnaire, même force brute, même volonté de sentir l’atmosphère… Après tout, Depardieu était également fait pour incarner Maigret, ce qu’il n’a jamais fait. Bellamy répare aussi ce rendez-vous manqué.
La présence du jeune frère du commissaire (Cornillac, excellent) fausse la donne, donnant au gros Gégé une facette plus sombre et mystérieuse, une personnification de sa mauvaise conscience.
Comme dans le roman de Simenon, l’intrigue policière n’est qu’un prétexte pour explorer les consciences, et les rapports entre les personnages, à commencer par ceux entre ce commissaire à qui la chance ne cesse de sourire, et ce jeune frère qui rate tout depuis toujours, et qui s’aiment et se détestent en même temps, passant de l’un à l’autre dans le même mouvement…
Chabrol referme aussi sa filmographie sur ce qui restera comme l’un des plus beaux personnages féminins de sa carrière : l’épouse de Bellamy, personnage qui a tout du faire-valoir, mais qui est peut-être le plus profond, le plus beau et le plus complexe du film. Surtout que Marie Bunel est absolument formidable dans ce rôle tout en demi-teinte.
Il y a bien quelques dialogues un peu lourdingues, et deux ou trois scènes trop longues (la première scène du Bricomarché est de trop), mais Bellamy permet à Chabrol de sortir par la grande porte, comme tous les grands : c’est son plus beau film depuis des années.
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