7h58 ce samedi-là (Before the devil knows you’re dead) – de Sidney Lumet – 2007
Cinéaste passionné par les affres de la famille, Lumet conclut sa carrière avec une pure tragédie familiale digne de Shakespeare. On a vu à peu près tout dans son œuvre, sauf peut-être des familles équilibrées et tranquilles (pas très cinégéniques, c’est vrai). Mais là, le cinéaste va loin, très loin, avec cette histoire de deux frères acculés par leurs problèmes d’argent, qui préparent le braquage de la bijouterie de leurs parents.
Aucun risque, juré : les deux frangins connaissent parfaitement les lieux et les systèmes de sécurité, savent que leurs vieux parents seront couverts par l’assurance, et que l’argent qu’ils en tireront leur offrira une nouvelle chance… Devinez quoi : ce coup sans risque va tourner au cauchemar. Un comparse chargé à la coke, un échange de coups de feu… et cette arnaque provoque la mort de la vieille maman, et le chagrin abyssal du père, magnifique Albert Finney.
C’est beaucoup ? Ce n’est pourtant que le début. Dans la grande tradition du film noir, Lumet s’intéresse aux conséquences de ce drame, à la descente aux enfers inexorables des deux frères, au sentiment de panique, de désespoir et de douleur auxquels ils réagissent très différemment. L’un dévoré par ses remords (Ethan Hawke, toujours très intense), l’autre laissant sa part monstrueuse prendre le dessus (Philip Seymour Hoffman, immense) et se coupant de tout et tous : son père, son frère, et sa femme (Marisa Tomei, qui n’a jamais été aussi belle et émouvante).
C’est du très grand film noir, qui excelle à faire ressentir la spirale infernale dans laquelle ces deux paumés sont plongés. Et la construction en puzzle, faite d’allers et retour incessants entre le braquage, les préparatifs et les conséquences, peut sembler artificielle, mais elle renforce le sentiment de tragédie et de piège inexorable.
En signant son film le plus fort depuis des lustres, Lumet tire sa révérence de la plus belle manière, avec un chef d’œuvre qui fait oublier les déceptions des dernières années.
Laisser un commentaire
Vous devez être connecté pour rédiger un commentaire.