La Patrouille perdue (The Lost Patrol) – de John Ford – 1934
C’est l’un des films les plus dépouillés de Ford, tourné à une époque de transition pour lui (entre ses chefs d’œuvre du muet et ses grands classiques à venir à partir de la fin des années 30), où il touchait à tous les genres, tous les styles, tous les tons.
Considéré, à l’époque, comme l’un des meilleurs films de cette année 1934, La Patrouille perdue est à la fois une œuvre atypique dans les films fordiens (pas de femme, même si elles sont souvent évoquées ; une unité de lieu et de temps ; et un dispositif étonnant de huis-clos à ciel ouvert), et un film très représentatif de l’univers de Ford : ce qu’il filme ici, comme souvent dans sa carrière, c’est un groupe d’hommes réunis par les circonstances.
L’action se déroule durant la Grande Guerre, dans les grandes étendues désertiques de la Mésopotamie. Mais le contexte historique n’est qu’un prétexte. Ce qui compte pour Ford et son scénariste Dudley Nichols (c’est leur première collaboration), c’est de s’attacher à ce groupe de soldats perdus dans un univers qui n’est pas le leur, et où la menace (des soldats arabes qu’on ne verra jamais avant les toutes dernières minutes) est omniprésente.
Après avoir erré dans les dunes de sables, ces hommes dirigés par Victor McLaglen se réfugie dans une oasis, sans grand espoir de s’en sortir. Les soldats se font descendre, l’un après l’autre, mais Ford ne s’intéresse pas aux combats, réduits à leur plus simple illustration (un coup de feu, un corps qui tombe). Il reste constamment à hauteur d’homme, soulignant avec infinie délicatesse la peur grandissante de ces hommes confrontés à leur propre mort.
Réalisé avec une belle économie de moyens, dans des décors (l’oasis) simples et beaux, le film est passionnant et d’une grande délicatesse, porté par des comédiens d’une grande justesse. Seul bémol : l’interprétation outrancière, qui supporte mal l’épreuve du temps, de Boris Karloff, bien moins à l’aise en soldat taraudé par sa foi qu’en créature de Frankenstein.
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