Fort Massacre (id.) – de Joseph M. Newman – 1958
Ne vous fiez pas au titre : Fort Massacre, malgré ses Apaches omniprésents, n’est pas une resucée du Massacre de Fort Apache. S’il y a comparaison à faire, c’est plutôt avec Côte 465 de Mann ou La Patrouille perdue de Ford, dans un autre genre : même concision, même simplicité, même approche frontale, même submersion de l’homme dans une nature spectaculaire mais rendue hostile par la guerre.
La guerre, ici, ce sont les guerres indiennes. Le film commence au milieu de nulle part, alors qu’une compagnie de soldats américains vient d’être en partie décimée par une attaque d’Indiens. Les survivants se mettent en route, et cherchent à rejoindre le gros des troupes.
D’où viennent ces hommes, où vont-ils, qui sont-ils ? Ne comptez pas sur le film pour apporter des réponses à ces questions : Joseph Newman, cinéaste très efficace, filme des personnages hors de leur monde, hors du monde même, une espère d’entre-deux sans issue, sans espoir, long voyage vers l’enfer.
Un seul personnage se dévoile un peu : celui de Joel McCrea, officier rongé par sa haine des Indiens depuis la mort de sa femme et de ses enfants. Mais ce qu’on croit comprendre de lui n’est pas grand-chose : l’humanité qui se dégage de ce personnage malade est constamment contredite par ses actions.
McCrea est formidable, intense, personnage qui vit avec la mort : celle de sa famille, celle de ses hommes (dont il trimballe les montres, dont le tic-tac incessant l’empêche de dormir, symboles tangibles de sa mauvaise conscience, chacune de ses décisions aboutissant à des morts supplémentaires), celle des indiens qu’il a tués, et la sienne qu’il semble appeler de ses vœux.
Apre et désespéré (le scénario est signé Martin Goldsmith, l’auteur de Détour), ce western poussiéreux et sanglant est une lente marche vers la mort. La mort des hommes, et celle des illusions. Ce petit western, bien sombre, est une œuvre complexe, intelligente, et d’une grande force.
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