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Archive pour le 7 décembre, 2012

Chasse à l’homme (Man Hunt) – de Fritz Lang – 1941

Posté : 7 décembre, 2012 @ 10:39 dans 1940-1949, CARRADINE John, LANG Fritz | Pas de commentaires »

Chasse à l’homme (Man Hunt) – de Fritz Lang – 1941 dans 1940-1949 chasse-a-lhomme-lang

Premier vrai film de propagande de Fritz Lang, tourné deux ans avant Les Bourreaux meurent aussi, qui sera une dénonciation plus frontale et premier degré de la barbarie nazie, Man Hunt est un film étonnant. Le jeu des acteurs, le rythme de la mise en scène, l’humour et la légèreté dont font preuve les personnages la plupart du temps… Tout cela relève a priori plus de la comédie à la Lubitsch que du pur film de propagande. On pense d’ailleurs, dans la première partie, à To be or not to be. Et pourtant…

La légèreté, la nonchalance même, ne sont que des leurres : ceux d’un « monde libre » qui ne fait pas encore face au destin qui l’attend. Walter Pidgeon est le symbole de ce monde libre. Officier anglais surpris par les Allemands alors qu’il tenait Hitler en ligne de mire de sa carabine, peu avant la guerre, il est arrêté et torturé alors qu’il n’a pas tiré. Après avoir réussi à s’enfuir, il parvient à regagner l’Angleterre, persuadé d’y retrouver la paix et l’insouciance qu’il avait laissées derrière lui.

Sauf qu’en n’abattant pas Hitler comme il l’aurait pu, en refusant de stopper la marche tragique de l’histoire, il a supprimé toute innocence, et toute insouciance. L’Angleterre (sous les bombes lorsque Lang tourne le film) n’est plus ce havre de paix d’antan. Parce qu’il n’a pas eu le cran, ou l’intelligence, d’appuyer sur la gâchette, Walter Pidgeon ne retrouve dans la brume de Londres qu’un rideau inquiétant dissimulant toutes sortes de dangers. Des dangers qui ont le visage de George Sanders et John Carradine, au service des Nazis.

C’est le coup de génie de Lang avec ce film : faire d’une « non-action » l’acte fondateur du désordre mondial, et de l’enfer qui attend l’Angleterre (et le reste du monde). En ne commettant pas un meurtre, le « héros » fait placer une menace sourde sur tout ce qu’il a toujours connu. Les dernières lueurs d’espoir qu’il rencontre – cette innocence qui a le visage de Joan Bennett – semblent elle aussi condamnées d’avance.

Point de happy end à attendre ici : il est beaucoup trop tôt en cette année 1941. Cinéaste allemand exilé volontaire dès la montée en puissance du nazisme, Lang est un observateur qui ne prend pas de gant. Il le dit à mi-mot : si la guerre éclate, c’est aussi la faute des Anglais et de leurs alliés, qui n’ont pas pris les décisions qu’il fallait quand il était encore temps d’arrêter Hitler. Le propos est d’une force impressionnante, et le film est absolument passionnant. Un nouveau chef d’œuvre.

And now… Ladies and gentlemen – de Claude Lelouch – 2002

Posté : 7 décembre, 2012 @ 10:28 dans 2000-2009, LELOUCH Claude | Pas de commentaires »

And now… Ladies and gentlemen – de Claude Lelouch – 2002 dans 2000-2009 and-now-ladies-and-gentlemen

Lelouch, qui aime les castings inattendus, forme ici un couple que seul lui pouvait imaginer : Patricia Kaas (dans son seul rôle au cinéma à ce jour, elle qui avait participé à la bande originale des Misérables) et Jeremy Irons, deux destins qui se croisent en dépit de toute évidence, comme le cinéaste les aime. Ajoutez à ces deux têtes d’affiche Thierry Lhermitte, Claudia Cardinale, Jean-Marie Bigard, Alessandra Martines ou Yvan Attal, et vous obtiendrez ce qui est sans doute l’affiche la plus improbable de cette année-là.

On est en terrain connu, puisque Irons interprète l’un de ces voleurs-gentlemen qui peuplent la filmographie de Lelouch, et Patricia Kaas une chanteuse de cabaret, comme beaucoup d’autres héroïnes lelouchiennes, histoire de placer une nouvelle fois la musique et la chanson au cœur de ce film conçu comme une comédie musicale : même mouvement envoûtant, qui nous emporte comme une symphonie.

Mais la musique dégage ici un curieux sentiment de malaise. La romance paraît classique : c’est le destin croisé de deux êtres que tout oppose, mais que la même tumeur au cerveau rapproche à l’autre bout du monde. Mais la passion semble constamment contrariée par le mal-être qui touche ces deux personnages revenus de tout.

Le film reste ainsi toujours à la surface de la passion, au risque parfois de frustrer. Mais Lelouch maîtrise parfaitement l’art de la narration cinématographique. Et il sait transformer des épisodes parfois totalement insignifiants en pure moment de magie, qui en disent beaucoup sur les personnages. C’est le cas de ces nombreuses scènes de cabaret où, le temps d’une chanson (elle aussi très lelouchienne) Kaas se dévoile plus que dans n’importe quel dialogue.

Les chansons, merveilleusement utilisées comme toujours dans le cinéma de Lelouch, sont particulièrement réussies. Elles collent parfaitement à la personnalité de Patricia Kaas, très juste dans ce rôle écrit pour elle. Elle semble même être la raison d’être de ce film imparfait mais touchant, illuminé par le soleil et le sable marocains, et par la blondeur de la chanteuse.

 

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