Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour août, 2012

La Flèche brisée (Broken Arrow) – de Delmer Daves – 1950

Posté : 22 août, 2012 @ 4:09 dans 1950-1959, DAVES Delmer, STEWART James, WESTERNS | Pas de commentaires »

La Flèche brisée

« Funny, it never stroke me an Apache woman would cry her son like any other woman »

Pour la 500ème chronique de Playitagain, pas question de voir n’importe quoi… C’est du grand, du très grand western que je vous propose. Et pour Delmer Daves et James Stewart, avoir cet insigne honneur est le couronnement de toute une carrière ! Si, si…

Le film commence par une voix off qui s’excuse presque : « la seule liberté prise avec la liberté est que les Apaches parlent en anglais ». Cet aveu même confirme que La Flèche brisée est une date importante dans l’histoire des Indiens au cinéma : pour la première fois ou presque, un film hollywoodien prend fait et cause pour la nation indienne, en la filmant comme une vraie nation, et pas comme des sauvages à peine humains.

Et cette petite révolution se fait tout à fait consciemment : le personnage principal interprété par James Stewart est, au début du film, animé par les mêmes préjugés qui habitent le cinéma hollywoodien depuis un demi-siècle : « Je n’avais jamais pensé qu’une mère Apache puisse pleurer ses fils » lance-t-il, toujours en voix off. Cette révélation résume bien l’âme de ce film magnifique, le sommet de la filmographie inégale de Delmer Daves.

Tout sonne juste dans ce western, plus peut-être que dans aucun autre western avant, et même depuis. Une scène pour exemple : celle du « saloon », lieu qui mérite des guillemets tant il semble éloigné des habituels lieux de perdition de cow-boys vidant whiskys sur whiskys. Ici, le saloon ressemble bien plus à une pension tranquille qui sent l’ennui, loin des musiques trépidantes, des filles faciles et des champions de poker qui peuplent les saloons dans des centaines de westerns. Il y a même des mouches qui volent dans ce lieu ni lugubre, ni excitant, juste banal.

Pas d’angélisme, non plus : les Indiens peuvent réellement être sanguinaires et sans pitié. Mais le film de Daves remet les événements dans leur contexte : les atrocités des Apaches répondent à ce qui est bien plus qu’une « simple » invasion, les bons blancs traitant les Indiens comme des animaux sauvages qu’il faut abattre.

Dans ce contexte, le personnage de Jefford (Stewart), éclaireur parfaitement intégré aux Américains blancs, ne va pas tarder à faire figure de pestiféré (comme le John Dunbar de Danse Avec les Loups, cinquante ans plus tard), lui qui a sauver de la mort un jeune Indien blessé, s’attirant l’amitié d’Apaches dont il deviendra le porte-parole.

Mais le poids de l’histoire pèse sur ce film magnifique, passionnant et tragique, l’un des plus beaux westerns du monde.

Dans la nuit – de Charles Vanel – 1929

Posté : 22 août, 2012 @ 10:59 dans 1920-1929, FILMS MUETS, VANEL Charles, VANEL Charles | Pas de commentaires »

Dans la nuit

Celui qui fut le grand vétéran du cinéma français jusque dans les années 80 a eu une carrière longue de plus de sept décennies. On se souvient surtout de ses rôles dans Le Salaire de la peur de Clouzot, et dans La Main au collet d’Hitchcock. Mais l’histoire a un peu oublié que Charles Vanel a entamé une très prometteuse carrière de réalisateur à la toute fin du muet, carrière avortée après deux films seulement, et l’échec total de Dans la nuit, film magnifique tourné alors que le cinéma parlant se généralisait, et (à peine) sorti dans l’indifférence générale.

Rétrospectivement, on réalise à quel point Vanel aurait pu devenir un réalisateur majeur du cinéma français : son mélodrame est d’une richesse et d’une virtuosité impressionnantes. Derrière la caméra, Vanel se permet des ruptures de ton parfaitement maîtrisées, passant du naturalisme à l’expressionnisme sans jamais casser le rythme impeccable de son film.

Dans la nuit commence par la peinture presque documentaire, mais passionnante, du quotidien des mineurs du Nord de la France, belles gueules abîmées filmées longuement dans leur labeur dangereux et pénible, autant que dans leurs loisirs. Dans une séquence qui préfigure cinquante ans avant le début de Voyage au bout de l’enfer, Vanel montre les mineurs quittant leur travail pour se rendre à une noce, sublime, filmée par une caméra virevoltante, symbole de l’insouciance et du bonheur simple. Sans avoir recours aux intertitres, Vanel filme la journée qui passe dans la joie, avec les ombres qui s’allongent de plus en plus, et les visages qui se fatiguent.

Dans cette noce insouciante, Vanel annonce subrepticement le drame qui se prépare : un malaise soudain de la jeune épouse, des masques hideux qui apparaissent derrière une fenêtre, l’écran qui se couvre d’une pluie annonciatrice, cette sirène qui n’en finit pas de ramener les jeunes amoureux à la réalité, et Vanel lui-même (qui joue le mineur marié) se recouvrant le visage de savon…

Autant de signes qui annoncent l’accident de mine (filmé avec un suspense hyper efficace) qui vaudra à Vanel d’être défiguré. La seconde partie du film commence alors, plus sombre (dans tous les sens du terme), plus douloureuse, plus violente aussi. Mais toujours aussi virtuose. La peinture sociale laisse la place à un triangle amoureux tragique, et à un cruel suspense. Vanel signe un film d’une grande richesse, et quasiment un sans-faute. On lui pardonne même le rebondissement final, qui pouvait sembler original en 1929, mais qui paraît aujourd’hui bien téléphoné.

La Relève (The Rookie) – de Clint Eastwood – 1990

Posté : 21 août, 2012 @ 6:18 dans * Thrillers US (1980-…), 1990-1999, ACTION US (1980-…), EASTWOOD Clint (acteur), EASTWOOD Clint (réal.) | Pas de commentaires »

La Relève

Ça n’intéressera personne, mais La Relève est le premier Eastwood que j’ai vu au cinéma. J’avais 14 ans, j’étais déjà un grand fan, et je me souviens avoir adoré ça. Plus de vingt ans après, le revoir montre bien à quel point la sensibilité de spectateur évolue avec le temps : difficile de reconnaître la touche Eastwood derrière ce polar efficace et explosif, mais dénué d’une quelconque originalité.

Echaudé par les échecs (francs ou relatifs) de ses derniers films, et alors qu’il venait de raccrocher le Smith et Wesson de Calahan à l’issue d’un cinquième volet un peu poussif, Eastwood est à la croisée des chemins. Il a 60 ans, et sait qu’il ne pourra plus longtemps jouer les gros bras. Cette Relève, qui porte bien son nom, sonne ainsi comme un baroud d’honneur pour un acteur populaire qui allait de plus en plus se tourner vers sa casquette de cinéaste, et qui n’allait pas tarder à sortir des cartons le scénario qu’il gardait depuis plus d’une décennie : celui de Impitoyable.

C’est d’ailleurs étonnant de constater qu’Eastwood réalisateur a enchaîné son plus mauvais film et son plus grand chef d’œuvre. Comme si, avant de signer son grand-œuvre (et d’obtenir enfin la récompense de ses pairs), il lui fallait prouver qu’il pouvait encore être dans l’ère du temps. C’est d’ailleurs la dernière fois (la seule, d’ailleurs) que le réalisateur Eastwood se plie à la mode du moment. Dans la lignée de L’Arme fatale et de nombreux autres polars de la fin des années 80, La Relève est en effet un « buddy movie » très classique (un vieux flic irrascible, une jeune recrue trop bien élevée), qui joue sur l’opposition des caractères et sur la surenchère spectaculaire.

Dans le domaine du spectaculaire, il faut reconnaître que le film est très convaincant, dominé par quelques séquences très originales et très impressionnantes, en particulier une course poursuite sur l’autoroute avec un camion transportant des voitures de luxe, et l’hallucinante explosion d’un immeuble dont les deux héros échappent en sautant du cinquième étage à bord d’une décapotable. Même à une époque où on a à peu près tout vu en matière de cascades pyrotechniques, ce moment reste réellement bluffant.

Pour le reste, à part quelques séquences nocturnes où on retrouve vaguement le style Eastwood, le film est très oubliable. Dans les rôles des méchants, Sonia Braga et Raul Julia sont aussi truculents et démodés qu’Alan Rickman dans Piège de Cristal : c’était génial en 1990, c’est à peine supportable aujourd’hui. Charlie Sheen, dans le rôle du « rookie » du titre, n’a pas le quart de la moitié du charisme d’Eastwood, qui lui se contente de recycler ses rôles passés, de Dirty Harry au Tom Highway du Maître de guerre. Pas vraiment glorieux, mais pas honteux non plus.

Le Grand Chef (Chief Crazy Horse) – de George Sherman – 1955

Posté : 21 août, 2012 @ 11:58 dans 1950-1959, SHERMAN George, WESTERNS | Pas de commentaires »

Le grand chef

George Sherman est sans doute la découverte la plus vivifiante de mes récentes pérégrinations cinématographiques : quelques-uns de ses westerns s’inscrivent dans la lignée de ceux de Ford. A un degré de réussite infiniment moindre, certes, mais avec un classicisme et une efficacité enthousiasmants : Bandits de grands chemins et La Fille des prairies sont ainsi de purs plaisirs de cinéma. Sauf que Le Grand Chef, l’un de ses films les plus ambitieux, est loin d’être aussi réussi.

Bien moins à l’aise avec le quotidien des indiens qu’avec celui des cow-boys, Sherman poursuit sa relecture des grandes figures de l’Ouest sauvage. Après Calamity Jane (La Fille des Prairies) ou Black Bart (Bandits de grands chemins), le voici qui s’intéresse à Crazy Horse, grand chef Indiens qui réussira à unir les nombreuses tribus Sioux pour mettre à mal l’hégémonie de l’armée américaine.

En à peine une heure et demi, Sherman tente d’illustrer le riche destin de ce jeune Indien marqué par une prophétie, et qui sacrifiera son bonheur personnel à la cause de tout un peuple. Par moment, c’est assez réussi, et Victor Mature fait un Sioux assez convaincant. Mais Sherman reste un réalisateur modeste, pas un grand maître du niveau de Ford. Il ne parvient jamais vraiment à apporter à son film le souffle épique dont il a besoin : celui de l’histoire en marche.

On ne s’ennuie jamais, non, mais la vie de Crazy Horse méritait sans aucun doute un réalisateur d’une autre envergure. La Flèche brisée de Delmer Daves, tournée peu avant, était autrement plus important. Comme le seront d’autres films consacrés au drame de la nation indienne, et notamment Les Cheyennes de… John Ford. Comme quoi l’élève, aussi bon soit-il, est resté loin de son maître…

 

Soudain le 22 mai (22 mei) – de Koen Mortier – 2010

Posté : 21 août, 2012 @ 11:46 dans 2010-2019, MORTIER Koen | Pas de commentaires »

Soudain le 22 mai

Réalisateur trash et expérimental, Koen Mortier s’essaye à un cinéma un brin plus narratif, encore que… En une heure et demi, le film ne raconte guère que quelques minutes de la vie d’une poignée d’hommes et de femmes. Des minutes importantes, puisqu’il s’agit de leurs dernières : l’événement central est un attentat meurtrier dans un centre commercial, perpétré par un kamikaze.

L’explosion est à elle seule un grand moment de cinéma. Filmée avec sans doute peu de moyens, mais avec un sens de la débrouillardise et une efficacité rares, cette séquence magistrale nous plonge littéralement au cœur de l’enfer. Jusqu’alors, le film a adopté strictement le point de vue du vigile du centre commercial, que l’on a suivi du réveil jusqu’à son arrivée sur son lieu de travail, dans une vie banale et d’une tristesse glaçante : pas la moindre couleur dans la vie de cet homme dont on apprendra plus tard qu’il a connu une perte particulièrement douloureuse.

Cherchait-il à se débarrasser de ce fardeau qu’était devenu la vie ? Est-ce pour cela qu’il a laissé passer devant lui un homme cagoulé et très suspect, celui-là même qui allait se faire exploser, entraînant avec lui des passants dans la mort ? Ces questions sont posées, bien sûr, et sans doute le film aurait-il gagné en profondeur si Mortier s’était concentré uniquement sur ce personnage de vigile. Mais le réalisateur préfère, dans la seconde partie de son film, multiplier les points de vue : ceux des victimes, qui s’interrogent sans grande passion sur les raisons de leur mort et sur le destin qui les a poussés là.

Mère de famille sans histoire, commerçants, exhibitionniste malsain, et le kamikaze lui-même… tous sont filmés de la même manière, sans passion, sans tristesse, des êtres anonymes qui appréhendent la mort comme ils l’ont fait avec leur vie. Même pas désespérant : plutôt aliénant.

On a beaucoup reproché la vacuité du film de Mortier. Et c’est vrai qu’on se demande un peu de quoi il nous a vraiment parlé. Mais Soudain le 22 mai est une œuvre étonnante, qui garde son mystère jusqu’au bout, et nous hante longtemps. Un bel exemple de la bonne santé du cinéma belge d’aujourd’hui.

Gretchen the Greenhorn (id.) – de Chester M. Franklin et Sidney Franklin – 1916

Posté : 20 août, 2012 @ 5:25 dans 1895-1919, FILMS MUETS, FRANKLIN Chester M., FRANKLIN Sidney | Pas de commentaires »

Gretchen the greenhorn

Très joli film avec Dorothy Gish en tête d’affiche, sans sa sœur pour une fois. Réalisé par deux frères qui font preuve d’une belle inventivité visuelle, avec une utilisation très inspirée des cadrages, des caches, et de la pénombre. Point d’orgue de ce petit film qui supporte très bien l’épreuve du temps : un mariage génialement filmé par une suite de gros plans sur des visages expressifs (et des mains) isolés sur un fond totalement noir. Original et génial, même près d’un siècle après.

Gretchen the Greenhorn a pour toile de fond une sorte d’auberge espagnoles dans laquelle cohabitent des immigrés venus des quatre coins d’Europe et d’Amérique, à New York. Gretchen (la frangine Gish) y retrouve son père, honnête artisan venu tenter sa chance en Amérique, qui n’a jamais fait fortune, mais qui a gardé un cœur immense. La preuve : il partage son repas avec les enfants affamés d’une pauvre voisine.

Il y a là un jeune Italien, qui tombe amoureux de Gretchen ; une veuve américaine entourée d’enfants et sans le sou ; et bientôt un étrange propriétaire de bateau, joué par un Eugene Pallette presque svelte (difficile à imaginer, oui), qui profitera de la naïveté du père de Gretchen pour en faire le complice malgré lui de sa bande de faux-monnayeurs.

Belle peinture de ce petit groupe qui symbolise la diversité des immigrés, qui se retrouvent pourtant autour d’une même misère. Solidaires pour faire face à la dure réalité du « rêve américain ». C’est l’univers qui a tant inspiré Chaplin, décrit ici d’une manière un peu plus dramatique, mais tout aussi vivante.

Le rythme du film est étonnant : entre sourire et frisson, les Franklin ne laissent aucune seconde de répit aux spectateurs. Et puis, visuellement, c’est constamment inventif, en particulier pour l’utilisation des caches. Et ce dès les premiers plans, modèles du genre. D’abord, Dorothy Gish assise, rêveuse, en fond de cale d’un bateau l’amenant en Amérique. Puis, son père apparaît dans une petite vignette découpée en bas de l’écran. L’image s’agrandit peu à peu, alors qu’il se lève de son lit et se dirige vers la caméra. Son visage souriant finit par occuper tout l’écran. C’est à la fois simple et virtuose, et tout le film est à l’avenant.

Un Flic pour cible (The Son of no one) – de Dito Montiel – 2011

Posté : 20 août, 2012 @ 10:22 dans * Thrillers US (1980-…), 2010-2019, MONTIEL Dito, PACINO Al | Pas de commentaires »

Un Flic pour cible (The Son of no one) – de Dito Montiel – 2011 dans * Thrillers US (1980-…) un-flic-pour-cible

Bon sang, quell casting : Juliette Binoche, Ray Liotta et Al Pacino à l’affiche d’un même film. De quoi donner bien des envies, même si le titre français laisse penser qu’il s’agit là de l’un de ses polars sans grand relief dans lesquels le grand Al, dont les trente premières années au cinéma constituent quand même un quasi-sans faute (allez donc vérifier ça sur imdb, c’est assez impressionnant !), a trop facilement tendance à se laisser enfermer depuis quelque temps (88 minutes, La Loi et l’ordre… pas flambant tout ça).

Alors ? Eh bien le titre français est stupide, conçu pour attirer un public adolescent qui, forcément, sera déçu par un film noir presque totalement dépouillé d’action. Quant au casting, il est certes impressionnant, mais tous les grands noms sont cantonnés à des seconds rôles sans grande envergure. Alors oui, c’est toujours un plaisir de voir le grand Al, mais il faut bien reconnaître qu’il n’est que l’ombre de lui-même dans un rôle à peine ébauché et limite caricatural. Il est plutôt sobre pourtant, mais sans rien à jouer, il ne fait pas de miracle.

Même chose pour Juliette Binoche dont on se demande bien ce qu’elle fait là. Dans un rôle totalement transparent (et pour le coup carrément caricatural) de journaliste d’investigation, elle ne risquait pas d’obtenir un second Oscar. Seul Ray Liotta tire assez bien son épingle du jeu, mais dans un emploi qu’il connaît par cœur, sans grande nuance et sans surprise.

De toute façon, ces trois-là (et aussi Katie Holmes, transparente comme toujours) se contentent de petits rôles. Le « son of no one » du beau titre US est joué par Channing Tatum, tout en intériorité. C’est d’ailleurs l’un des rares personnages vraiment intéressant de ce film étrange et mélancolique, réflexion sur les souvenirs, l’héritage et l’enfance perdue. Jeune flic affecté au même commissariat que son père, mort des années auparavant, il y est confronté aux fantômes de son passé par le biais de lettres anonymes qui l’accusent d’un mystérieux crime…

Dito Montiel ne manque pas d’ambition. Son film, entrecoupé de nombreux flash-backs qui ne révèlent le mystère qu’avec parcimonie, évite consciencieusement tout effet spectaculaire dans sa partie « contemporaine ». De la même manière, tous les acteurs affichent une espèce d’apathie et jouent en retrait sans jamais jouer la surenchère. Il réussit à instaurer une ambiance pesante et une souffrance lancinante très marquantes. Dommage que les seconds rôles soient si peu développés…

Tarantula (id.) – de Jack Arnold – 1955

Posté : 17 août, 2012 @ 11:27 dans 1950-1959, ARNOLD Jack, EASTWOOD Clint (acteur), FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Tarantula

Surtout connu pour L’Homme qui rétrécit et L’Etrange créature du Lac Noir, Jack Arnold a à son actif de nombreuses séries B horrifiques souvent très réjouissantes. Ce Tarantula au pitch improbable en est l’un des meilleurs exemples. Sans moyen, avec une « star » sans charisme et assez lamentable (John Agar, second rôle fordien vu dans Le Massacre de Fort Apache, et devenu vedette de seconde zone), quelques seconds rôles solides (à commencer l’hitchcockien Leo G. Carroll), et un scénar qui ferait passer L’Île du Docteur Moreau pour un joyeux conte de Noël, Arnold signe un petit film franchement terrifiant.

Il n’a pas d’argent, mais il sait tirer le meilleur de sa caméra et de la magie du montage. Quelques plans fixes sur une ligne d’horizon suffisent à installer l’horreur de ce qu’on ne voit pas encore : cette tarentule géante, issue des expérimentations malheureuses d’un scientifique en quête de l’aliment miracle qui assurerait la survie de l’humanité…

Qu’importe si les personnages sont sans consistance. Tout ce qui compte ici, c’est le pur plaisir d’avoir peur. Et il est grand. Les trucages sont simplissimes : quelques transparences qui transforment une araignée banale en un monstre de dix mètres de haut. Mais Arnold prouve que les effets numériques ne sont pas tout, et que la seule force de la mise en scène peut donner vie aux plus incroyables des chimères. Plus d’un demi-siècle plus tard, difficile de ne pas frissonner devant cette araignée géante qui menace la belle Mara Corday à travers la fenêtre de sa chambre…

Tarantula Eastwood

Excellente série B, Tarantula marque aussi l’une des premières apparitions du jeune Clint Eastwood, alors en contrat chez Universal, qui tentait d’y décrocher quelques panouilles alimentaires. Arnold avait déjà été le tout premier à le diriger (c’était dans La Revanche de la créature, quelques mois plus tôt, dans le minuscule rôle d’un laborantin). Ici, sa participation est encore plus modeste : Clint n’a droit qu’à une poignée de plans où il est totalement méconnaissable, son visage étant caché derrière son masque de pilote d’avion. Il s’agit pourtant de son premier personnage de héros (ATTENTION, SPOILER), parce que celui qui dézingue le monstre, ce n’est pas le hagard Agar, mais bien notre Eastwood préféré !

Ghosts of Mars (id.) – de John Carpenter – 2001

Posté : 16 août, 2012 @ 6:40 dans 2000-2009, CARPENTER John, FANTASTIQUE/SF | Pas de commentaires »

Ghosts of Mars (id.) - de John Carpenter - 2001 dans 2000-2009 ghosts-of-mars

Dans Rio Bravo, il y a une scène (juste avant la fameuse goutte de sang dans la bière) qui montre Wayne retrouvant Dean Martin face à un saloon, alors qu’ils pistent un meurtrier. « Il est toujours à l’intérieur, dit ce dernier au Duke. D’ici je vois les deux sorties. » Remplacez John Wayne par Natasha Henstridge (ouais je sais, c’est pas facile), Dean Martin par Jason Statham (ouais je sais, c’est à peine plus facile), et le saloon par un bâtiment futuriste, et vous obtiendrez l’une des séquences-clés de Ghosts of Mars : une fois encore, John Carpenter a voulu rendre hommage à son film culte, celui dont il a signé un remake à peine déguisé dans Assaut (dont il a assuré le montage sous le pseudonyme de John T. Chance, le personnage de Wayne dans Rio Bravo).

Après Vampires, tourné juste avant ce Ghosts of Mars, Carpenter avance à visage de plus en plus découvert dans le genre qui lui tend les bras depuis près de trente ans : lui qui rêve de réaliser un western depuis toujours signe ici ce qui y ressemble le plus dans son œuvre. Les assauts de ses morts vivants d’une autre planète ressemblent bien à des attaques d’Indiens ; les forces de l’ordre qui doivent amener un criminel sain et sauf à la gare est un thème tout ce qu’il y a de plus westernien (3h10 pour Yuma, pour ne citer que celui-là…). Tout dans Ghosts of Mars renvoie vers la mythologie du western.

Mais l’heure de gloire du grand Carpenter semble bien loin, lorsqu’il signe ce film de SF hyper-fauché. L’époque où il s’imposait comme le pape incontesté du film d’horreur, et où les studios lui confiaient de gros budgets est bien révolue. Ses films, depuis Los Angeles 2013, n’ont pas rencontré le succès escompté, et le grand cinéaste ne cache pas une lassitude grandissante, annonçant à qui veut l’entendre son envie de se retirer. C’est d’ailleurs ce qu’il fera (pendant dix ans en tout cas, avant un retour timide et peut-être bien éphémère), après l’échec public et critique de ce qui apparaît déjà comme un film-testament, certes inégal et cheap, mais loin d’être aussi inconsistant qu’on l’a dit.

Ghosts of Mars est certes une boucherie brute de décoffrage assez basique et pleine de défauts flagrants, qui cache mal un budget ridicule derrière l’omniprésent rouge nuit de cette planète Mars dont on ne voit qu’un décor en carton-pâte, mais il y a dans l’approche de Carpenter une singularité qui vaut le voyage.

Car ce déluge de feu et cette accumulation de massacres est racontée uniquement à la première personne, par le seul témoignage de l’héroïne (Henstridge, dans le rôle de sa vie), qui livre son point de vue, avant de revenir sur ce qu’on lui a raconté. C’est la tradition orale qui continue à être au cœur de l’œuvre de Carpenter (Fog, Halloween, Jack Burton…) et qui donne à beaucoup de ses films cet aspect fascinant, comme les contes de notre enfance. Ici, la sensation est différente encore : on assiste à cette histoire comme dans un état second, comme si l’action était parasitée par les drogues qu’ingurgite Mélanie…

Film-testament, donc, dans lequel John Carpenter livre une sorte de synthèse de tout ce qu’il a filmé jusque là. Difficile de ne pas penser à Fog, avec cette brume menaçante qui gagne la civilisation. Difficile aussi de ne pas penser à Assaut avec cette prison dans laquelle flics et voyous font ami-ami pour résister à une bande d’agresseurs. Une bande déshumanisée dont le leader évoque bien sûr le Alice Cooper de Prince des Ténèbres. Quant au thème de la possession, il était déjà au cœur de The Thing, Starman ou encore Prince des Ténèbres.

On pourrait continuer longtemps encore le jeu des sept ressemblances. Pourtant, on sent que Carpenter n’y croit plus vraiment. Il multiplie les auto-citations, comme s’il baissait les armes, comme s’il reconnaissait qu’il est condamné à refaire le même genre de films, et qu’il ne tournera jamais ce vrai western dont il rêve. Il est temps pour lui de tirer les rideaux. Pour un temps, du moins…

Le Masque de Diijon (The Mask of Diijon) – de Lew Landers – 1946

Posté : 16 août, 2012 @ 6:07 dans 1940-1949, FANTASTIQUE/SF, LANDERS Lew | Pas de commentaires »

Le Masque de Diijon

Dans la carrière pour le moins chaotique de Erich Von Stroheim, ce Mask of Diijon se situe juste avant l’ultime retour du génie maudit en France, où il tournera une dizaine d’années encore jusqu’à sa mort (à l’exception très notable d’un détour par les studios hollywoodiens pour un petit film obscur nommé Boulevard du Crépuscule !). Une fois encore, il interprète ici un artiste de music-hall odieux et ravagé par ses démons.

C’est une habitude pour l’ancien (immense) cinéaste, depuis le succès de The Great Gabbo, près de vingt ans plus tôt. Mais cette nouvelle variation est bien l’une des toutes meilleures. Réalisé par Lew Landers (un spécialiste du genre depuis Le Corbeau, qui réunissait Karloff et Lugosi), le film offre à Stroheim l’occasion d’étoffer considérablement son personnage habituel.

On retrouve les tics habituels de l’acteur, ses regards plissés, son ton sec et péremptoire, sa cruauté verbale sans limite, sa cigarette omniprésente… Mais le temps de quelques séquences joliment filmées, avec des effets d’ombre et de brouillards bien photogéniques, la réal réussit à nous plonger dans les affres de cet esprit dérangé.

Ancien magicien réputé, marié avec une jeune femme trop belle et trop gentille, Diijon (avec deux « i », rien à voir avec la moutarde) s’est plongé dans l’étude de l’hypnose, devenue une véritable obsession qui le coupe de tout et de tous. Par hasard (lors d’une belle séquence de braquage qui le sort de sa morosité), Diijon réalise la puissance de ses nouveaux pouvoirs. Il ne tarde pas à s’en servir pour concrétiser ses pulsions les plus sombres.

The Mask of Diijon traîne un peu en longueur vers la fin (même s’il dure à peine plus d’une heure), et souffre un peu de seconds rôles peu charismatiques. Et puis la fusillade finale tranche trop brutalement avec l’ambiance globale du film. Mais ces réserves mises à part, le film est une belle réussite, dans un beau noir et blanc plein de nuances.

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