Le Monde lui appartient / Capitaine courageux (The World in his arms) – de Raoul Walsh – 1952
Après Capitaine sans peur, chef d’œuvre et triomphe en salles, Walsh retrouve la mer, Gregory Peck, et un grand souffle épique pour un nouveau grand film d’aventures au moins aussi passionnant que le précédent.
Il y a évidemment des points communs entre les deux films, mais Capitaine courageux (un titre français un peu pourri qui n’a pour but que d’attirer des spectateurs conquis par avance) n’est pas un Capitaine sans peur au rabais. Il y a dans ce film une euphorie, une ambition mêlée de simplicité, et un ton original qui en font l’une des très grandes réussites de Walsh.
Un grand film maritime ? Oui, sans conteste. Pourtant, il faut attendre près d’une heure pour que les personnages embarquent vraiment, et pour que le souffle du grand large souffle sur le film. Dans toute la première partie, Walsh installe son action dans les rues d’un San Francisco encore jeune, symbole d’un pays qui se construit et se « civilise », et dans lequel la comtesse russe (jouée par Anne Blythe) voit un pays idéal, loin de cette Russie tsariste vieillissante et étouffante où un mariage de raison et une vie sans joie ni liberté lui sont promis.
A San Francisco, la belle tombe évidemment sous le charme d’un Gregory Peck au sommet de sa gloire. Bel aventurier à la réputation sulfureuse, chasseur de phoques (mais un gentil, hein : pas comme ces salauds de Russes qui tuent toutes les pauvres bêtes qui se retrouvent sur leur chemin), et visionnaire qui rêve d’acheter aux Russes l’Alaska qui ne deviendra américain que quelques années plus tard, et dont le gouverneur n’est autre que le tonton de la belle comtesse. Est-ce nécessaire de préciser que notre aventurier va tomber lui aussi raide dingue de la belle ?
Choc des deux mondes que tout oppose (la rigidité d’un vieil empire guindé, la folie d’un jeune pays avide de liberté), la première partie est à la limite de la comédie : un tourbillon irrésistible peuplé de seconds rôles hauts en couleurs (Anthony Quinn en capitaine sans morale mais attachant, qui n’aime rien tant qu’une bonne bagarre avec Peck, son adversaire favori ; John McIntire en vieux briscard qui cite la bible et les grands auteurs à la moindre occasion…), d’une liberté totale.
Et puis soudain, le ton se fait plus grave. L’aventurier séducteur se transforme en amoureux transi, et l’heure n’est plus à la rigolade. En quelques secondes, finies les rues foisonnantes de San Francisco… Nos héros se retrouvent en pleine mer. L’atmosphère devient plus pesante, Walsh renoue avec le grand air, avec le large, avec la grande aventure qui nous conduit dans des contrées peu connues : les terres sauvages du Labrador, et les ports d’Alaska encore sous domination russe.
En même temps que ces découvertes, c’est le grand Hollywood de l’Âge d’Or que Walsh nous offre : cet univers romanesque en technicolor dont les jours étaient comptés. Humour et amour, aventures et sentiments, bagarres dantesques et suspense oppressant… C’était quand même quelque chose !
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