Girls in Chains (id.) – de Edgar G. Ulmer – 1943
La filmographie d’Ulmer est décidément passionnante, autant que déstabilisante… Sur un thème quasiment similaire à celui de So young so bad, réalisation de Bernard Vorhaus à laquelle Ulmer participera en 1950, ce Girls in Chains est une curiosité qui aurait pu être un petit film sympathique et bien troussé (ce qu’il est en partie), mais qui marque surtout les esprits par l’utilisation qu’il fait de la musique : l’une des plus idiotes (et bizarres) de l’histoire du cinéma.
Pourtant signée Leo Erdody qui, à défaut d’être un immense compositeur, est un artisan solide et très aguerri, cette musique n’est pas ratée en soi. C’est son utilisation qui est totalement incompréhensible, totalement à contre-courant. Totalement absente d’une scène d’exposition ou d’une autre pleine de suspense, elle apparaît soudain, romantique alors qu’elle devrait être oppressante, ou à l’inverse festive lorsque deux êtres se déclarent leur flamme. Et plus le film avance, plus elle devient insistante, rendant l’intrigue parfois inutilement obscure. Gênante, et incompréhensible, cette utilisation de la musique démontre par la négative toute la force que peut avoir une bande originale de film. J’en suis en tout cas toujours à me demander s’il y a derrière ce décalage total une justification qui m’aurait échappée… Pas sûr. En tout cas, Ulmer et Erdody travailleront de nouveau ensemble, notamment sur les excellents Barbe-Bleue, Détour et Strange Illusion, les trois films suivants du cinéaste.
Pour le reste, Girls in Chains est une petite production honnête et efficace, qui aborde un thème plutôt fort et original : celui des centres de redressement pour jeunes filles. Jeunes filles d’ailleurs toutes interprétées par des actrices pas terribles qui ne semblent pas avoir moins de 35 ans chacune… C’est le même thème qui sera au cœur de So young so bad, et qui sera alors traité de manière beaucoup plus engagée et frontale.
Ici, on sent bien que Ulmer se désintéresse assez vite de la condition de ces jeunes laissées pour compte. Son film s’attache bien davantage à l’histoire policière parallèle, avec un grand gangster urbain bien machiavélique, dans la tradition des grands films de gangster. On en est loin ici, mais rien de honteux non plus : Girls in chains se regarde comme un petit plaisir de fin de soirée…
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