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Archive pour novembre, 2011

La Fille des Marais (Das Mädchen vom Moorhof) – de Douglas Sirk (Detlef Sierck) – 1935

Posté : 3 novembre, 2011 @ 12:48 dans 1930-1939, SIRK Douglas | Pas de commentaires »

La Fille des Marais (Das Mädchen vom Moorhof) - de Douglas Sirk (Detlef Sierck) - 1935 dans 1930-1939 la-fille-des-marais

Même si, visuellement, il y a un monde entre l’univers bucolique en noir et blanc proche du réalisme poétique alors en vogue en France, et les couleurs vives de ses grands mélos hollywoodiens des années 50, il y a déjà tout Sirk dans cette histoire d’amour entre deux êtres que tout sépare, et en particulier à travers le personnage de Helga, jeune servante prête à sacrifier son bonheur pour celui qu’elle aime en secret, et pour respecter les règles de la société. Un thème qui reviendra tout au long de l’œuvre sirkienne…

La Fille des marais est un film de jeunesse : c’est seulement le deuxième long métrage de Sirk (qui s’appelait encore Detlef Sierck), et son premier mélodrame. Le film est à l’époque une production importante pour la UFA, la plus célèbre des firmes de cinéma allemande de l’entre-deux-guerre, qui voulait en faire une adaptation de prestige d’un roman suédois de Selma Lagerlöf, première femme Prix Nobel de littérature. Le film suivant de Sirk-Sierck sera d’ailleurs une autre adaptation d’un classique suédois (Les Piliers de la Société, d’après Ibsen). Moins connus que les films qu’il tournera un peu plus tard en Allemagne avec la star de l’époque, Zarah Leander, ces deux adaptations littéraires sont pourtant bien plus passionnantes, et beaucoup plus personnelles.

La scène d’ouverture est un petit chef d’œuvre à elle seule. Sur une place de village, des fermiers viennent pour la foire aux servantes, variantes à peine plus humaine de la traditionnelle foire aux bestiaux. C’est là qu’on rencontre nos deux futurs tourtereaux : le fils de fermier Karsten Dittmar, venu recruter (ou acheter ?) une nouvelle servante, et la frêle Helga Christmann, venue non pas chercher un emploi, mais défendre son honneur. Elle est attendue au tribunal après avoir porté plainte contre son ancien employeur qui refuse de reconnaître qu’il est le père de son enfant.

Dans ce microcosme très traditionnel et très religieux, la jeune femme, qui a le double handicap d’être d’une famille pauvre, et d’être mère célibataire, est l’objet de toutes les railleries. Mais l’opinion change radicalement lors d’une scène typiquement sirkienne : alors que son ancien patron et amant s’apprête à jurer sur la bible qu’il n’est pas le père, Helga, paniquée, décide de retirer sa plainte pour empêcher le père de son enfant de blasphémer. Un geste salué par tout l’auditoire, et par Karsten qui, du coup, lui propose de venir travailler dans la ferme familiale. La rédemption par l’abnégation… Là aussi, un thème redondant dans la filmographie de Sirk.

Tout le film est aussi brillant que cette première séquence. On fait bientôt la connaissance de l’autre femme importante du film : Gertrud, la fiancée de Karsten, qui ne serait pas une mauvaise personne si elle ne pressentait pas le danger que représente Helga pour son couple. Et puis il y a le père de Karsten, un « taiseux » qui ne parle que quand c’est nécessaire, c’est-à-dire pas avant près d’une heure de film, n’ouvrant la bouche que quand il réalise qu’il a un rôle vital à jouer. On ne dira pas ici quel est ce rôle, mais il donne lieu à une série de retournements de situations qui oscillent constamment entre la légèreté et le désespoir.

Sirk réussit là un tour de force : signer un quasi-premier film qui porte déjà en germes tout son univers. C’est beau et romantique, et il y a dans ces paysages façonnés peu à peu par la main laborieuse de l’homme (c’est un pays de tourbiers) un souffle simple et frais, digne de la culture nordique.

Espions sur la Tamise (Ministry of Fear) – de Fritz Lang – 1944

Posté : 2 novembre, 2011 @ 3:22 dans * Films noirs (1935-1959), 1940-1949, LANG Fritz | 1 commentaire »

Espions sur la Tamise (Ministry of Fear) - de Fritz Lang - 1944 dans * Films noirs (1935-1959) espions-sur-la-tamise

Graham Greene, l’un des plus grands romanciers du XXème siècle, est aussi celui, sans doute, qui a été le mieux servi au cinéma. De Tueur à gages de Frank Tuttle à La Fin d’une liaison de Neil Jordan, l’œuvre de l’auteur de Rocher de Brighton a inspiré un nombre assez impressionnant de chef d’œuvre. Celui de Fritz Lang n’est pas des moindres. Tourné un an à peine après la sortie du roman, Ministry of Fear est le troisième film de propagande antinazi d’affilée tourné par Lang, après Chasse à l’homme et Les Bourreaux meurent aussi, déjà deux chef d’œuvre. Lang a souvent eu la dent dure contre cette adaptation du roman de Greene, estimant avoir été étouffé par le scénariste et producteur Seton J. Miller, qui refusait qu’on modifie une ligne de son script.

Pour le cinéaste, Ministry of Fear n’était ni un film personnel, ni même un bon film. Le moins qu’on puisse dire est qu’il a l’autocritique un peu sévère… Non seulement le film est brillant en terme de style, mais c’est aussi un film très langien, que ce soit pour son personnage principal, monsieur tout le monde confronté au regard inquisiteur de la société entière, ou à travers une multitude de petits motifs visuels ou thématiques qui semblent répondre à d’autres films de Lang.

A peine sorti d’un asile où il était enfermé depuis deux ans, notre héros, avide de se plonger de nouveau au cœur de la population, se dirige vers une fête foraine. Dès qu’il entre, un ballon rebondit vers lui… Comment ne pas penser au ballon de la fillette, au début de M le maudit : avec ce ballon, symbole de l’innocence perdue, l’homme a fait son entrée dans un monde de faux semblants et de menaces. Cette voyante qu’il consulte alors, stéréotype ambulant qui semble tout droit sortie de l’univers du Docteur Mabuse, représente un autre pas franchi vers le cauchemar qui se dessine peu à peu autour de lui…

Le film rappelle aussi à quel point les univers de Lang et Hitchcock ont été proches, à cette époque (c’est d’ailleurs à Hitchcock qu’on avait d’abord proposé le scénario de ce qui allait devenir Chasse à l’homme). Le personnage de cet homme plongé malgré lui dans une sombre affaire d’espionnage, ce pourrait être le Robert Donat des 39 Marches. Ce faux aveugle, que notre héros rencontre dans un train, pourrait lui aussi sortir d’un film de Hitchcock… Sans oublier l’incontournable macguffin, objet de toutes les convoitises dont on se fiche de savoir ce que c’est, dont Hitchcock a fait l’une de ses marques de fabrique, et qui trouve ici une forme particulièrement anodine : un gâteau…

Hitchcock et Lang ne sont cependant pas interchangeables, loin s’en faut. Il y a chez Hitch une légèreté, une ironie, qui se transforment chez Lang en inquiétude plus marquée. L’ironie est là, aussi, mais plus sombre, plus cynique aussi. Le personnage interprété par le grand Ray Milland est à la fois un faux coupable et un homme sans histoire plongé au cœur d’un mystère (thèmes chers à Hitchcock), mais c’est surtout un héros profondément Langien : un homme marqué par son passé, à la fois avide de renouer avec le genre humain, dont il a été privé pendant deux ans, et conscient qu’il doit se méfier de tous. Comme tant d’autres héros de Lang, à commencer par Spencer Tracy dans Furie.

L’histoire en elle-même ressemble à bien d’autres films de propagandes de cette époque : notre  héros va mettre à jour l’existence d’un réseau d’espions au cœur de Londres. La principale force du film repose sur le style visuel de Lang, éblouissant : il fait de son film antinazi une pure gourmandise de cinéma, un film de genre bourré de rebondissements et sublimement filmé. Lang joue avec les ombres, avec l’obscurité, la brume… Moins on en voit, et plus c’est spectaculaire.

Il joue aussi sur la possible schyzophrénie de son héros, tout juste sorti d’un asile de repos et dont le premier acte d’homme libre est d’aller se mêler aux enfants d’un parc d’attraction, avant de raconter une histoire incroyable aux forces de l’ordre. Ce héros, que l’on confond avec un authentique espion, évoque avant l’heure le Robert Townsend qu’interprétera Cary Grant quinze ans plus tard dans La Mort aux trousses… d’Hitchcock, bien sûr.

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