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Heureux mortels (The Happy Breed) – de David Lean – 1944

Classé dans : 1940-1949,LEAN David — 17 octobre, 2011 @ 16:11

Heureux mortels

Le futur réalisateur de La Fille de Ryan qui adapte, pour sa première mise en scène solo, une œuvre renommée de Noel Coward, véritable institution en Grande-Bretagne ? J’y allai davantage par curiosité que par enthousiasme… Grand bien m’en a pris : Heureux mortels est un grand bonheur de cinéma, une fresque intime sublime et sensible, d’une intelligence rare, et d’une délicatesse infinie. Un chef d’œuvre ? Ben oui, un chef d’œuvre, à la fois ambitieux (c’est l’histoire d’une famille londonienne entre la fin de la Première guerre mondiale et la veille de la seconde) et d’une étonnante simplicité : cette famille, ce pourrait être n’importe laquelle, ou presque.

Le début et la fin du film se font écho. Le générique de début se termine sur une porte qui s’ouvre. La caméra est à l’intérieur d’une maison jusqu’alors vide, qui voit arriver toute une famille, revenue d’un exil forcé pendant la guerre. Le film se terminera par la même porte qui se referme sur les derniers habitants qui s’en vont vers une autre étape de leur vie. Entre deux, la caméra n’aura quasiment pas quitté la maison ou ses environs proches, comme si c’étaient ces murs qui nous racontaient l’histoire si banale et si belle à la fois de la famille Gibbons.

Cette famille, c’est un couple uni entouré d’une grand-mère acariâtre, d’une belle-sœur veuve de guerre, et de trois grands enfants que l’on voit grandir, quittant la maison l’un après l’autre. Il y a des fâcheries, des engueulades, des réconciliations, des départs, des mariages, et des drames aussi, terribles. Il y a des rires et il y a des larmes, mais ce qui est beau dans ce film, c’est la pudeur extrême de Lean, qui filme le pire des drames (je ne vais pas dévoiler de quel drame il s’agit) sans rien en montrer, et sans rien en dire. Les joies, par contre, sont filmées frontalement, et c’est là que les larmes jaillissent enfin (je parle de mes larmes à moi, en fait…). Il y a cet ami inséparable et profondément sympathique aussi, et puis les fréquentations amicales ou amoureuses que les enfants amènent à leur tour…

Le film, qui évoque évidemment le temps qui passe, pourrait être plombant. Ce n’est pas le cas, en partie aussi grâce aux personnages qui sont pourtant des « caractères » très typiques, mais qui évitent constamment le cliché ou l’excès. Celia Johnson (qui jouera l’année suivante dans Brève rencontre, grand classique également signé David Lean et Noel Coward), figure idéale de la mère de famille « normale » (beauté sans glamour, attachante mais rugueuse), forme avec Robert Newton (père idéal, mari aimant, homme simple qu’on aimerait avoir pour ami) un couple en dehors de toutes les modes, et donc inoubliable.

Ils sont au cœur de cette fresque intime d’une famille qui traverse les grands événements  historiques en les vivant pleinement, mais toujours par le prisme de la famille. Une grève générale, la mort d’un roi, une guerre qui menace… Jamais ces événements historiques ne prennent le pas sur les personnages, mais l’influence du « monde extérieur » est continuellement perceptible.

Tourné dans un technicolor d’une sobriété elle aussi extrême (on est finalement proche du noir et blanc), ce film sublime est, à travers l’histoire de cette famille à la fois classique et unique, le portrait doux amer de la société anglaise de l’entre-deux-guerre.

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