A l’abordage ! (Against all Flags) – de George Sherman – 1952
Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on entre vite dans le vif du sujet (et du dos d’Errol Flynn), avec ce film de pirates, dont les premières images nous montre l’éternel Capitaine Blood attaché au mât d’un navire, fouetté jusqu’au sang sous le regard de l’équipage. Mais pas de panique, Errol ne va pas être jeté aux requins : cette punition est en fait une couverture pour qu’il puisse infiltrer le repaire des pirates qui écument les mers et menacent le commerce des Indes. Il arrive dans une cité fortifiée sur la côte de Madagascar, où il est finalement accepté malgré les soupçons d’un méchant pirate, joué par un Anthony Quinn débordant de vie et de jeunesse. Il tombe aussi sous le charme d’une jolie pirate toute rousse, qui a les traits irrésistibles de Maureen O’Hara.
Un film de pirates de plus pour Errol Flynn ? Oui et non. C’est vrai que quand il se prend un peu trop au sérieux, le film s’apparente à une énième resucée de L’Aigle des Mers ou du Capitaine Blood. En forcément moins bien, parce que George Sherman n’est pas Michael Curtiz, parce que les deux films que je viens de citer sont sans doute insurpassables dans le genre « film de pirates », et aussi parce que Flynn, dans son éternel rôle de jeune premier bondissant, a pris un petit coup de vieux : il a 43 ans, et en fait 50 facile. Alors oui, on a un peu de mal, cette fois, à croire au prouesses physiques du héros, et à son charme absolu (même s’il a de beaux restes, faut reconnaître). Comme on a un peu de mal à comprendre pourquoi la sublime Maureen O’Hara, dans un rôle de gonzesse « qui en a », et qui fait jeu égal avec les plus terribles pirates, se transforme en flaque d’eau dès qu’elle pose le regard sur Flynn…
Heureusement, le film se prend rarement au sérieux : il y a un petit côté parodique qui est franchement ravissant, et qui finit par emporter l’adhésion. Le charme désuet qui se dégage du film, la sympathie qu’on ressent même pour le grand méchant interprété avec dérision par Anthony Quinn, la présence de cette princesse des Indes qui découvre les hommes et ne pense, elle aussi, qu’à embrasser notre Errol (« again »… lance-t-elle, les lèvres tendues, dès qu’elle apparaît à l’écran)… Tout ça fait qu’on ne prend pas cette histoire au sérieux, mais qu’on se laisse transporter sur les mers avec un vrai plaisir, en se disant que, même si on est loin des grands chef d’œuvre que la Warner a produit dans le genre, on est devant un film bien sympa, et bien rigolo. C’est déjà pas mal…