L’Assommoir – d’Albert Capellani – 1909
Considéré comme l’un des premiers grands maîtres du cinéma français, Albert Capellani est resté dans l’histoire pour avoir signé quelques grandes fresques adaptées de monuments de la littérature française : Le Chevalier de Maison-Rouge de Dumas, Les Misérables et Quatre-vingt-treize de Hugo, ou Germinal de Zola. Bien avant d’être l’un des premiers cinéastes à s’attaquer au (très) long métrage, Capellani avait déjà porté à l’écran l’œuvre de Zola, avec une ambition et une maîtrise déjà bien assurés : L’Assommoir est une adaptation certes raccourcie, mais très fidèle au roman de Zola, dont on retrouve les grands personnages, et la peinture sans fards du monde ouvrier de la fin du XIXème siècle.
L’histoire est strictement celle imaginée par Zola. Ouvrier, Lantier abandonne sa femme Gervaise sans ménagement, et part avec sa maîtresse Virginie. Coupeau, collègue et ami de Lantier, tente de l’en dissuader, puis réconforte Gervaise, qu’il finit par épouser. Porté sur la boisson, Coupeau tombe malade, et doit renoncer à l’alcool. Mais Virginie, qui s’est disputée avec Lantier, et qui a des vues sur Coupeau, est bien décidée à se venger.
La plus grande faiblesse de ce film de 1908 (alors que Méliès faisait encore des merveilles avec ses illusions et fantaisies filmées, et que de l’autre côté de l’Atlantique, Griffith tâtonnait encore dans l’art de la réalisation, rappelons-le), c’est sa longueur : rester fidèle à un roman foisonnant dont l’action se prolonge sur de nombreuses années, dans un film qui n’excède que de peu la demi-heure de projection, était mission impossible. Et effectivement, on a parfois du mal à comprendre les motivations des personnages, en particulier de Virginie, qui est le moteur de l’action, mais paradoxalement le personnage le plus faible.
Mais la plus grande force de ce moyen métrage, c’est la qualité et la puissance de l’interprétation. C’est d’ailleurs ce qui fera aussi la force des longs métrages à venir de Capellani : le jeu de ses acteurs n’a rien de théâtral, et donne une épaisseur étonnante aux personnages. Et même si le delirium tremens qui clôt le film a un côté grand-guignol qui porte à sourire aujourd’hui (mais je dois avouer que je n’ai jamais assisté à un authentique delirium tremens), la modernité du jeu d’Alexandre Arquillières, dans le rôle de Coupeau, marque les esprits…
Laisser un commentaire
Vous devez être connecté pour rédiger un commentaire.