Le Survivant des Monts lointains (Night Passage) – de James Neilson – 1957
Pour un peu, lorsque le mot « fin » apparaît sur l’écran large (très, très large), on s’attendrait à voir Eddy Mitchell se retourner vers la caméra, dans une salle de cinéma très fifties… C’est du pur cinoche que ce western à grand spectacle auquel ne manque qu’un véritable auteur derrière la caméra, pour en faire l’une des réussites majeures du genre. La réalisation de l’obscur James Neilson est soignée (très appliquée, même), et totalement au service du grand spectacle. C’est un artisan dénué d’une personnalité affirmée, mais très à l’aise pour remplir, et bien, le cahier des charges.
Et si on doit rappeler le cahier des charges des films hollywoodiens de l’époque, précisons que la télévision faisait son apparition dans les foyers ricains, et que les producteurs rivalisaient d’imagination pour faire venir les spectateurs en masse dans les salles obscures. C’est donc la décennie où les écrans s’élargissent considérablement (celui-ci est tourné en « technirama », pour ceux que ça intéresse), où les couleurs se font plus vives, et où les décors spectaculaires font leur retour.
Le moins qu’on puisse dire, c’est que Night Passage remplit parfaitement son contrat. Dès le générique, lorsque le nom de James Stewart dévore l’écran (on imagine l’effet que ça devait faire dans les salles immenses aujourd’hui disparues), et que des dizaines de figurants apparaissent dans des décors (naturels) grandioses et magnifiques, on sait qu’on va être transporté dans un cinéma hollywoodien de haute volée. Et on n’est pas déçu…
Les ingrédients de l’histoire sont hyper-rabachés dans l’histoire du cinéma, et plus particulièrement du western : c’est l’éternel affrontement de deux frères ayant choisi chacun un côté différent de la loi, et qui vont devoir choisir à nouveau entre leur famille d’adoption et leur famille de sang ; un affrontement qui se déroule sur fond de construction de chemin de fer, thème lui aussi éculé dans le western, qui symbolise à merveille la confrontation entre deux mondes, les terres encore sauvages et la civilisation en marche.
L’histoire elle-même passe rapidement au second plan, même si les rebondissements sont suffisamment nombreux pour nous tenir en haleine. James Stewart est excellent en ancien agent des chemins de fer contraint à gagner sa vie en jouant de l’accordéon, et qui ne rêve que de reprendre du service. Mais le tandem qu’il forme avec son très jeune frère Audie Murphy ne fonctionne pas tout à fait : à aucun moment on ne se dit que ces deux-là vont s’entre-déchirer, ce qui enlève beaucoup du suspense qui aurait dû planer sur le film.
Mais les séquences impressionnantes se succèdent : des scènes de bagarres ou de gunfights bien sûr, mais ce sont curieusement les moments plus calmes qui se révèlent les plus magistraux. Cette scène muette où, après avoir rencontré un personnage à la Calamity Jane (interprété par Olive Carey), James Stewart traverse la montagne par un tunnel de mineurs ; celle encore où Stewart calme (temporairement) les esprits des ouvriers en improvisant un bal en plein air ; et surtout celle où le même Stewart voyage avec son jeune protégé (Brandon de Wilde, le p’tit gars de L’Homme des Vallées perdues) sur le wagon ouvert d’un train, surplombant un paysage de montagne absolument sublime. C’est cette image qui reste en tête bien longtemps après le mot fin…
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