Play it again, Sam

tout le cinéma que j’aime

Archive pour janvier, 2011

Juste Cause (Just Cause) – de Arne Glimcher – 1994

Posté : 24 janvier, 2011 @ 11:18 dans * Thrillers US (1980-…), 1990-1999, GLIMCHER Arne | Pas de commentaires »

Juste Cause

Sean Connery, Larry Fishburne, Ed Harris, Kate Capshaw, et une toute jeunette Scarlett Johansson (elle n’a que 11 ans)… Plutôt séduisant, le casting de ce thriller que je n’avais pas revu depuis sa sortie en salles (à l’époque, bien sûr, la p’tite Scarlett n’avait retenu l’attention de personne). Mais une fois qu’on a parlé du casting, on a dit l’essentiel. Produit par Connery lui-même, Juste Cause est le film d’une star vieillissante qui peine à trouver un dernier souffle (on dira ce qu’on voudra, il n’aurait rien perdu à arrêter sa carrière une dizaine d’années plus tôt, Sean).

On comprend bien ce qui a attiré l’acteur-producteur dans cette histoire d’un ancien avocat reconverti en conférencier farouche opposant à la peine de mort, qui accepte de reprendre du service pour défendre un jeune noir sur le point d’être exécuté pour le meurtre sauvage d’une petite fille. Persuadé de l’innocence du condamné, l’avocat se heurte à l’hostilité de la population et des flics de cette petite bourgade un peu plouc de Floride, où le traumatisme de ce meurtre est toujours vivace.

Le scénario évoque les grands films à thèse des années 70, en tout cas au début du film. Tout y passe : le racisme de l’Amérique profonde, l’inhumanité de la peine de mort, la justice expéditive… Et pendant un temps, c’est assez efficace et plaisant, même si le scénario accumule les facilités, et que les dialogues sont purement fonctionnels. Oubliez la psychologie des personnages, c’est l’histoire qui prime.

C’est bien le problème, d’autant plus qu’à trop vouloir éviter d’appuyer sur le message anti-peine de mort et anti-raciste, Arne Glimcher (jamais entendu parler, depuis ce film) et ses scénaristes finissent par se mordre la queue. Non seulement le thème initial perd tout son sens, mais le film se transforme en un thriller grand-guignol assez percutant (suffisamment, en tout cas, pour ne pas s’ennuyer), mais guère différent des productions qu’on voyait à la pelle au milieu des années 90.

Mais bon, je me sens d’humeur généreuse : Juste Cause mérite d’être vu, ne serait-ce que pour le face-à-face réussi entre Sean Connery et Laurence Fishburne. Oubliez les autres acteurs (surtout Ed Harris, qui en fait des tonnes dans un rôle à la Hannibal Lecter), c’est grâce à eux deux, et à eux deux seulement, qu’on prend un certain plaisir à voir ce petit film…

Au-delà (Hereafter) – de Clint Eastwood- 2010

Posté : 20 janvier, 2011 @ 11:15 dans 2010-2019, EASTWOOD Clint (réal.), FANTASTIQUE/SF | 1 commentaire »

Au-delà

Clint Eastwood n’est pas seulement le plus grand cinéaste vivant. C’est aussi le plus délicat. Il le prouve encore avec ce film qui, sur le papier, faisait un peu peur. Depuis vingt ans, je n’ai pas raté un Clint au cinéma (le premier, c’était La Relève), attendant systématiquement le prochain avec une impatience et un enthousiasme qui ne se démentent pas. C’est d’ailleurs encore le cas avec le futur biopic sur Hoover, dont il doit commencer le tournage dans quelques jours. Mais là, pour la première fois, l’enthousiasme se faisait plus discret. L’histoire croisée de trois personnages qui se retrouvent autour de la mort (une Française qui côtoie la mort lors du tsunami, un Américain qui communique avec les morts, un enfant anglais qui perd son frère jumeau) ? Mouais, bof… C’est bien parce que c’est Clint…

Eh bien encore une fois, il remporte le morceau. Du mélo larmoyant qu’on nous promettait, Eastwood tire un film apaisé, dépassionné même, et anti-spectaculaire (passée la séquence époustouflante du tsunami, filmée exclusivement du point de vue de Marie, le personnage incarné par Cécile de France). Malgré le thème, c’est même le film le plus optimiste qu’il ait fait depuis dix ans. Le thème, justement, est hyper gonflé : il n’est pas vraiment question de deuil, ou de l’approche de la mort, mais du rapport que l’on entretient avec la mort qui nous guette tous.

Qu’y a-t-il après ? Faut-il en avoir peur ? A la première question, Clint Eastwood ne répond pas, bien sûr. Mais à la seconde, il dit clairement : « non », condition sine qua non pour réussir sa vie, et trouver enfin sa vraie place dans le monde des vivants. Et pour ça, une seule méthode : être en paix avec soi-même. Clint l’est visiblement. Et la manière qu’il a de montrer les choses sans les appuyer, de filmer les drames sans en rajouter, en est la démonstration évidente. Eastwood est le dernier des grands réalisateurs classiques ; c’est aussi, peut-être, le plus serein de tous.

Il manque peut-être un peu de passion, justement, à Hereafter. Mais il y a derrière cette triple-histoire une sincérité absolue, comme on sent que l’hommage, appuyé, à Dickens est totalement sincère : cet auteur que vénère George, et dont ce gosse anglais semble être un personnage transposé dans le XXIème siècle (on se souvient d’ailleurs que Eastwood a eu un temps le projet de porter à l’écran la vie de Dickens, qu’il aurait lui-même interprété). Il y a aussi dans le film un premier degré rafraîchissant : le « don » du médium George (Matt Damon), qui communique avec les morts, est montré comme une chose presque naturelle, même si le personnage vit ça comme une malédiction, et pas comme un don.

Quelques petites fautes de goût, aussi, si on veut être tatillon : la manière un peu appuyée de montrer comment Marie, journaliste réputée (de France Télévision) est rejetée de tous parce qu’elle parle de son expérience de mort imminente, est parfois lourdingue (elle comprend qu’elle a été remplacée lorsque les affiches sur lesquelles sont visage figurait dans Paris sont remplacées par d’autres). L’utilisation des attentats de Londres, comme un ressort dramatique à peine effleuré, est aussi un peu discutable.

Ces (petites) réserves mises à part, Hereafter est une belle réussite, que l’immense majorité des réalisateurs auraient transformé en piteuse mièvrerie. Pas Clint Eastwood, grâce en partie à des détails minuscules et parfaitement eastwoodiens, qui parsèment le film. Cécile de France filmée en gros plan dans l’obscurité d’un restaurant. Matt Damon buvant une bière dans la solitude de son appartement. Un accord de guitare qui résonne doucement. Il n’en faut pas plus à Clint pour faire naître l’émotion, poser sa touche, et faire vivre son univers.

Un univers qui, malgré la multiplicité des sujets qu’il aborde film après film, nous est si familier. C’est sans doute ça, la marque d’un véritable auteur…

Centurion (id.) – de Neil Marshall – 2010

Posté : 20 janvier, 2011 @ 11:11 dans 2010-2019, MARSHALL Neil | Pas de commentaires »

Centurion

Dans un pays encore sauvage, loin de chez lui, un officier d’une armée de conquête se retrouve esseulé en terre ennemie. Il finira par réaliser que ses compatriotes utilisent des méthodes sanguinaires, et partira vivre avec une jeune femme du peuple combattu… Mais bon sang, mais c’est bien sûr : c’est Danse Avec Les Loups au cœur des conquêtes romaines. Pourquoi pas, après tout, le sujet est suffisamment fort pour être décliné. Ben oui, mais Neil Marshall, réalisateur et scénariste, se fiche complètement de l’histoire, qu’il pompe honteusement au film de Kevin Costner, sans jamais en explorer les possibilités.

D’ailleurs, on se fiche très vite du sort de ce centurion, interprété avec une force très mâle (style « j’suis un vrai mec et je vous emmerde, arrachez-moi les ongles un par un si vous voulez, j’vous dirais rien ») par un Michael Fassbender mono-bloc qui ne s’embarrasse pas plus de nuances que son réalisateur.

Pas le moindre signe d’humanité dans ce film (si ce n’est le personnage, sous-utilisé, de la « sorcière »), qui se contente d’enchaîner les scènes de combats filmés d’une manière très graphique, et ultra violentes : ça empale, ça trépane, ça ampute, ça charcle, avec des geysers de sang (rajoutés à la palette graphique) et des râles à n’en plus finir, qui laissent un peu froid, et qui lassent très vite.

Les paysages sont beaux, le mur d’Hadrien, qu’on voit à la fin du film, est impressionnant, mais ça ne suffit pas à faire un vrai film. Centurion, malgré ses qualités esthétiques, n’est rien d’autre qu’un « jeu vidéo passif ».

Edith et Marcel – de Claude Lelouch – 1983

Posté : 20 janvier, 2011 @ 11:09 dans 1980-1989, LELOUCH Claude | Pas de commentaires »

Edith et Marcel - de Claude Lelouch - 1983 dans 1980-1989 edith-et-marcel

Vingt-cinq ans avant La Môme, il y a eu ce Edith et Marcel un peu tombé dans l’oubli, mais qui mériterait d’être redécouvert. Ce n’est pas un Lelouch majeur, cependant : souvent trop sage, il laisse par moments un petit sentiment de frustration. Mais à d’autres moments, la « patte » Lelouch, cet excès sirupeux qui agace ses détracteurs et enchante ses admirateurs (j’en suis), éclate bel et bien, offrant quelques séquences magnifiques, et tirant des larmes : de douleur comme, lorsqu’au tout début du film, Jean-Claude Brialy (magnifique) s’occupe de tous les visiteurs, tournant et retournant en attendant d’annoncer à Edith que l’avion de son Marcel s’est écrasé… Ou de bonheur comme lorsque les deux futurs amants se retrouvent pour la première fois dans un restaurant marocain de New York, deux Français à l’étranger, qu’ils s’observent sans trop savoir quoi se dire, avant de se trouver enfin dans un premier baiser joliment enfantin.

Même s’ils ne sont pas tout à fait à la hauteur de leurs rôles, Evelyne Bouix et Marcel Cerdan Jr (c’est Dewaere qui devait tenir le rôle, mais il est mort juste avant le tournage) apportent ce qu’il faut de cette part d’enfance et d’innocence, dissimulés derrière les excès de la chanteuse, et le visage cabossé du boxeur. En donnant le rôle de son père à Cerdan Jr, Lelouch ajoute d’ailleurs une émotion naturelle à son film, comme lors des scènes où il dirige Charles Aznavour dans son propre rôle (avec 35 ans de plus que lors des faits). Dans un film aussi ouvertement cinématographique et romantique, voir surgir ces éléments de vérité est troublant.

Mélange de reconstitution fidèle, de vision fantasmée du mythe, et de thèmes purement lelouchiens (le hasard, le destin, et la guerre en toile de fond), Edith et Marcel vieillit plutôt bien. Grâce à la passion qu’y a visiblement mis le réalisateur (tempérée cette fois, par moments, par un respect peut-être trop grand pour les deux icônes dont il raconte l’histoire parallèle puis commune). Et grâce aussi à la qualité des seconds rôles, tous formidables. Brialy, donc, mais aussi Jean Bouise, tout en retenue, et Jacques Villeret, bouleversant.

Villeret, d’ailleurs, apparaît dans une sorte d’histoire secondaire qui n’a rien à voir avec celle d’Edith et Marcel, si ce n’est qu’elle lui est contemporaine.

Pas moments, dans ce long film (deux heures et demi), Lelouch prend des chemins de traverses, et oublie totalement et longuement son sujet principal pour en raconter une autre : celle d’une jeune fille qui ressemble étrangement à Edith Piaf (normal, elle est jouée aussi par Evelyne Bouix), Margot, qui tombe amoureuse sans le connaître de Jacques, un soldat français prisonnier en Allemagne (Villeret), dont elle est la marraine de guerre, et avec qui elle correspond. Mais comme dans Cyrano, Margot est amoureuse des lettres qu’elle reçoit, lettres qui sont dictées à Jacques par un grand acteur de théâtre (Francis Huster).

Forcément, la première rencontre entre Margot et Jacques sera difficile. Cruelle, même, la jeune femme passant à deux reprises devant ce petit gros sans le reconnaître, elle qui attendait son prince charmant. Villeret, dans un rôle pas facile, est très émouvant.

Ce second film dans le film est lui aussi passionnant, mais la manière dont il s’intègre dans l’histoire principale (parce que, justement, il ne s’intègre pas), casse un peu le rythme. Dommage.

Le Diable au corps – de Claude Autant-Lara – 1947

Posté : 20 janvier, 2011 @ 11:06 dans 1940-1949, AUTANT-LARA Claude | Pas de commentaires »

Le Diable au corps

Autant-Lara a côtoyé les sommets comme les bas-fonds du cinéma français d’après-guerre. Et dans ses très hauts, cette adaptation d’un roman à scandale de Raymond Radiguet se situe vraiment très, très, très haut. D’une beauté formelle et d’une audace incroyables, ce chef d’œuvre a fait de Gérard Philipe une star, et donne à Micheline Presle, star n°1 de l’époque en France, ce qui est peut-être son plus beau rôle. Peu importe qu’ils aient tous les deux le même âge, alors que lui joue un ado de 16 ans et elle une femme plus âgée sur le point de se marier… Comme a dit Autant-Lara à Philipe qui hésitait à accepter le rôle : ‘‘la jeunesse, ça se joue’’ (voir les excellents bonus de l’édition DVD que vient de publier Paramount). Et Gérard Philipe la joue d’une manière absolument géniale : il ne se transforme pas physiquement, mais adopte un comportement délicatement puériles (fait de petites touches discrètes et touchantes), face à une Micheline Presle plus mature. Plus bouleversante, aussi.

L’histoire d’amour qui réunit ces deux êtres qui ne devaient pas se rencontrer se déroule durant la Première Guerre mondiale, et ce n’est évidemment pas anecdotique : les deux tourtereaux sont continuellement à contre-courant avec le moral général des Français. On le voit dès la première séquence : alors que la fin de la guerre est annoncée, dans des rues animées par une grande ferveur populaire, où les hommes et les femmes chantent, dansent, et crient leur joie, François (Gérard Philipe) déambule à contre-sens, le visage fermé, les épaules tombantes. Pour la France, c’est un nouveau départ, le retour à la vie. Pour lui, c’est une petite mort…

Les flash-backs, dont le film est fait, expliqueront cet état d’esprit. Jeune étudiant, François tombe amoureux d’une infirmière, fiancée à un soldat qui lutte dans les tranchées. Elle-même partagera bientôt la passion du jeune homme. Leur premier baiser, leur première étreinte, est à la fois d’une douceur et d’une sensualité infinies, elle, jusqu’alors très prude, passant sa main sur le dos nu de François avec une tendresse joliment érotique. C’est beau, et digne des plus belles histoires d’amour au cinéma (cette caresse si émouvante m’a fait penser à la main de Kay Lenz sortant de l’ombre pour étreindre William Holden dans Breezy de Clint Eastwood…).

Mais la jolie romance est bien plus complexe que ça… Bien sûr, ces deux-là s’aiment pour la vie. Mais on sent bien qu’il n’y a pas d’issue heureuse, pour eux. Et puis, il y a quelque chose de profondément révoltant dans leur amour exclusif, dans la façon qu’ils ont de rejeter le monde entier : la mère de Marthe (Denise Grey, déjà vieille), le père si attentif de François (c’est une jolie relation père-fils que montre Autant-Lara), et surtout ce mari qu’on ne fait qu’entrapercevoir à l’écran, souvent dans l’ombre, mais qui est omniprésent dans le film, et dans la passion que vivent Marthe et François.

Ce mari qui risque sa vie pour son pays, ne survivant que pour revoir celle qu’il aime, alors que cette dernière trouve le bonheur le plus parfait avec son jeune amant. Un bonheur qui n’est possible que parce que le mari est au combat, et que les amoureux savent être condamné dès la fin de la guerre… C’est d’un cynisme total, et d’une cruauté particulièrement dérangeante. Mais Autant-Lara et ses scénaristes (Jean Aurenche et Pierre Bost) ne jugent pas, pas plus qu’ils ne dédouanent leurs amants. Ils n’édulcorent pas non plus le pathétique de la situation, et de la lâcheté de François, terrorisé à l’idée d’affronter le mari (ce qu’il ne fera d’ailleurs jamais) ou de devoir mener une vie de père de famille, et dont les mauvaises décisions précipiteront l’issue tragique de leur histoire. Des décisions toujours en négatif : ne pas rejoindre Marthe sur le ponton ; ne pas aller à la rencontre du mari à la gare ; ne pas accompagner sa maîtresse à Cabourg… Pour François, jeune homme trop immature (« j’ai deux enfants », lance une Marthe enceinte à son jeune amant), il est plus facile de « ne pas » agir.

Le Diable au corps est un film qui bouscule, qui choque aussi, sans jamais tomber dans la moindre facilité. Mais c’est aussi un film magnifique, crépusculaire et charnel.

Le Renne blanc (Valkoinen peura) – de Erik Blomberg – 1952

Posté : 17 janvier, 2011 @ 7:03 dans 1950-1959, BLOMBERG Erik | Pas de commentaires »

Le Renne blanc

Voilà peut-être bien le premier film finlandais que j’ai l’occasion de voir. Et la découverte est pour le moins intéressant. Gros succès public et critique lors de sa sortie (le film a décroché un « prix international du film légendaire » au festival de Cannes), Le Renne blanc est un film séduisant et plutôt fascinant, basé sur une vieille légende lapone : l’histoire d’une jeune femme qui, après avoir sacrifié un jeune renne blanc sur l’autel du Dieu de pierre pour que son mari, chasseur de rennes, reste à ses côtés, se transforme elle-même en renne sauvage, qui vampe et tue les chasseurs un à un. Pas de surprise au niveau de l’histoire : on devine dès le début que le mari finira par tuer le renne ensorcelé, découvrant ainsi qu’il s’agit de sa bien-aimée, qui retrouve son vrai visage dans la mort…

Qu’importe l’histoire, finalement. Ce qui compte, et ce qui fascine, c’est la solitude qui transpire littéralement de la pellicule. Le réalisateur utilise merveilleusement les immenses étendues couvertes de neige, qu’il prend le temps de filmer longuement, avec d’interminables panoramiques qui rappellent continuellement que l’homme est bien fragile, au sein de cette nature omniprésente, et pas vraiment accueillante. Carrément oppressante, même, comme le suggèrent ces séquences étonnamment semblables, où l’on voit le renne blanc attirer les chasseurs les uns après les autres, au cœur d’une vallée encaissée… comme si la terre (la neige plutôt) s’apprêtait à les avaler.

Il y a bien quelques temps morts dans ce film, par ailleurs plutôt séduisant. Mais il y a surtout quelques moments magnifiques, comme cette longue scène où l’héroïne regarde son mari partir avec un troupeau de rennes, lui faisant de grands signes jusqu’à ce qu’il disparaisse derrière la ligne d’horizon. Et la ligne d’horizon, dans ces paysages immenses et désertiques, est très, très loin…

Comme ces gros plans aussi sur le visage inquiétant de Mirjami Kuosmanen (la femme du réalisateur), dont les contours prennent des intonations presque diaboliques lorsqu’il est caressé par la lumière vacillante des feux de camps. Les visages, d’ailleurs, sont particulièrement importants dans le film, gueules fascinantes marquées par le vent qui balaye la plaine neigeuse, et par la vie difficile dans ce petit village de chasseurs, perdu au milieu de nulle part.

Et puis il y a la musique, magnifique, signée Einar Endglund : un mélange de chants traditionnels et de sons à la fois mélodieux et légèrement stridants, qui souligne parfaitement la fascination qu’exercent les images.

The Skin Game (id.) – de Alfred Hitchcock – 1931

Posté : 17 janvier, 2011 @ 12:33 dans 1930-1939, HITCHCOCK Alfred | Pas de commentaires »

The Skin Game (id.) - de Alfred Hitchcock - 1931 dans 1930-1939 the-skin-game

C’est l’un des films les plus mal aimés de la riche filmo d’Hitchcock. Un gros succès à sa sortie, cela dit, mais que la postérité a transformé en ratage indigne des chef d’œuvre passés et à venir du génial Hitch. Je trouve ça franchement injustifié. Tiré, encore une fois, d’une pièce de théâtre, The Skin Game n’a effectivement pas grand-chose avec les chef d’œuvre que sont Blackmail ou Murder ! Le film leur est aussi nettement inférieur, certes, mais de ce drame un peut indigeste où s’entremêlent secrets de familles et conflits entre tradition et modernité, Hitchcock s’en tire avec les honneurs, signant un film certes inégal, mais jalonné par quelques très grands moments.

La scène de la vente aux enchères, succession magistrale et folle de plans de plus en plus serrés, fait partie de ces passages magiques, chef d’œuvre de mise en scène et de montage, qui peuplent tous les films hitchcockiens. Il y a aussi ce moment, insensé, où le corps sans vie d’une jeune femme est retiré d’un bassin, alors que les deux protagonistes principaux s’écharpent en ombres chinoises, à l’arrière plan. C’est un moment glaçant, d’une audace assez incroyable : Hitchcock ose montrer d’une manière totalement dépassionnée, avec une sorte d’indifférence générale, l’issue tragique du drame, pourtant redoutée depuis un moment.

Cette mort est pourtant d’autant plus tragique que c’est celle de l’unique personnage réellement sympathique du film. Parce qu’une nouvelle fois, Hitchcock prend un malin plaisir à prendre le contre-pied de ce que le spectateur attend. Dans les premières séquences, tout semblait pourtant très clair : la famille Hornblower, nouveaux riches industriels, représente le côté obscur de la force, prête à détruire la nature environnante pour permettre à ses usines de se construire. De l’autre côté, la famille Hillcrist représente les bonnes vieilles valeurs traditionnelles, grâce auxquelles ce couple de vieux villageois ne sera pas expulsé de la maison où ils vivent depuis si longtemps.

Sauf que ces certitudes ne tardent pas à voler en éclat. Si le vieux Hillcrist s’élève contre Hornblower le parvenu, ce n’est certainement pas pour ce petit couple de vieux (que le patriarche avait d’ailleurs totalement oublié lorsqu’ils réapparaissent à la fin du film, alors qu’ils sont à l’origine du conflit), mais pour sauvegarder la jolie vue qu’il a de son salon… Niveau altruisme, on fait mieux… C’est à qui sera le plus infâme, le plus vil.

Finalement, personne ne sort gagnant de ce jeu de massacre cynique et un brin dérangeant, mené avec inspiration par Hitchcock. Le réalisateur crée une tension permanente, échappant brillamment au piège du théâtre filmé : le film est vif, fluide, et échappe aux contraintes du décor unique… jusqu’à cette scène au cours de laquelle la mère Hillcrist, horrible mégère à baffer, met à genou le vieux Hornblower (joué par un Edmund Gwenn carrément génial, dont le jeu moderne tranche avec le niveau de l’époque). Après ça, bizarrement, le film perd toute sa tenue, comme si un vulgaire tâcheron avait remplacé Hitchcock.

Dans sa dernière partie, le film devient inutilement bavard, et étonnamment théâtral. C’est du pur théâtre filmé, guère plus inspiré (si ce n’est quelques plans) que des captations de théâtre. Bizarre et frustrant, après trois premiers quarts franchement réussis.

Chantage (Blackmail) – de Alfred Hitchcock – 1929

Posté : 14 janvier, 2011 @ 11:15 dans * Polars européens, 1920-1929, HITCHCOCK Alfred | Pas de commentaires »

Chantage (Blackmail) - de Alfred Hitchcock - 1929 dans * Polars européens chantage

Hitchcock passe du muet au parlant de manière magistrale, dans ce petit chef d’œuvre (ben oui, encore) qui est la matrice presque définitive de la plupart des grands films à suivre du génial cinéaste.

Tout commence comme un film muet (le tournage a d’ailleurs réellement commencé comme un muet traditionnel, mais Hitchcock, qui s’attendait à ce qu’on lui demande de sonoriser son film, préparait cette transition dès l’origine du projet) : la première séquence, qui n’a rien à voir avec l’intrigue principale, présente l’inspecteur Frank Webber (John Longden) et son équipier, deux policiers de Scotland Yard, qui s’apprêtent à arrêter un homme recherché. Hitchcock se montre d’une précision absolue dans cette séquence : l’arrestation (filmée avec l’inventivité et l’efficacité qui lui sont déjà naturelles par le cinéaste), la mise en examen, la confrontation avec un témoin, la mise en cellule… Hitchcock n’oublie aucune étape pour ce qui se veut être une vision la plus réaliste possible du quotidien d’un policier. C’est passionnant, et brillant. Blackmail promet alors d’être le plus abouti des films muets du gros Hitch.

Sauf que la partie muette s’arrête là. Sitôt leur journée de travail finie, la véritable intrigue s’apprête à se mettre en place, et le film prend la parole. Gonflé, cynique, et bourré d’humour, Hitchcock fait son entrée dans le parlant avec un dialogue entre les deux flics d’un inintérêt total : durant quelques instants, alors qu’ils quittent les locaux de Scotland Yard, Frank et son équipier parlent de tailleur, de costumes, d’étoffe… un dialogue sans la moindre profondeur, sans le moindre second degré. Bref, sans le moindre intérêt. Si Hitchcock avait voulu se moquer de la passion grandissante pour le cinéma parlant, il ne s’y serait pas pris autrement.

Ce n’est pas pour autant qu’il prend à la légère les possibilités offertes par le son. Bien au contraire : il ne cesse d’en explorer toutes les possibilités, jusqu’à la fin du film.

Les quelques scènes qui suivent son un peu poussives, mais permettent de découvrir les autres personnages : la fiancée de Frank, Alice (la craquante Anny Ondra, déjà filmée par Hitch dans The Manxman, absolument magnifique dans tous les registres ; même si elle est doublée par Joan Barry pour cause d’accent tchèque imbitable, sa prestation est inoubliable) ; et un obscur artiste qui tente de séduire Alice, cette dernière se montrant d’ailleurs peu farouche, au point de le suivre jusque chez lui.

Et là, le film redevient génial. Utilisant la musique, la profondeur de champs, le champs-contre champs, le hors cadre… avec une inspiration de chaque plan, Hitchcock ne laisse plus jamais retomber la pression avant la fin du film. Dans une longue séquence d’une grande beauté (Anny Ondra y est bouleversante), Alice finit par poignarder à mort celui qui se voyait comme son amant, dans un final dont on ne voit rien, mais qui évoque avant l’heure la mort du Crime était presque parfait.

Bien sûr, c’est Frank qui est chargé de l’affaire, et il suffit d’un soudain travelling sur le visage du mort pour que le flic comprenne que sa fiancée était là, et qu’elle a fait le coup. C’est simple, d’une richesse visuelle folle, et d’une efficacité absolue.

out ce qui suit est aussi réussi. On a beaucoup parlé, évidemment, de cette scène où Alice est à table avec ses parents, et où une mégère parle sans jamais s’arrêter du crime, flot de paroles dont on finit par ne plus rien saisir si ce n’est le mot « knife » (couteau) qui revient sans cesse et par lequel Alice, rongée par la culpabilité, est obnubilée. De la même manière, alors qu’elle déambule dans les rues du Londres nocturne, des signes, des gestes, des images, lui rappellent son crime à chaque pas… Un procédé que Hitchcock reprendra notamment dans La Maison du docteur Edwardes.

On retrouve même le thème du faux coupable, omniprésent dans le cinéma hitchcockien, mais traité ici avec un cynisme total : le faux coupable est un maître chanteur qui a la preuve qu’Alice est coupable, et qui tente d’en tirer parti, est puni à la place de la vraie meurtrière, qui ne sera punie elle que par sa propre culpabilité. Une culpabilité qui ne semble même pas effleurer son compagnon policier, visiblement tout à fait prêt à vivre avec ce poids, et totalement inflexible lorsque le maître chanteur supplie (dans une scène particulièrement dure) le policier de le laisser partir. Blackmail est tout, sauf un film moral…

Même l’apparition traditionnelle d’Hitchcock est réjouissante : tout jeunôt, il apparaît dans une courte scène de métro, dans le rôle d’un passager martyrisé par un enfant très turbulent.

Fièvre printanière (Recreation) – de Charles Chaplin – 1914

Posté : 12 janvier, 2011 @ 2:54 dans 1895-1919, CHAPLIN Charles, COURTS MÉTRAGES, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Fièvre printanière

• Titres alternatifs (VO) : Spring Fever

• Titre alternatif (VF) : Charlot s’amuse

C’est peut-être le plus inintéressant de tous les films de Chaplin. Tourné en quelques heures seulement dans un parc, le film est visiblement totalement improvisé (on voit même encore les tâches de peintures de Charlot artiste peintre, tourné quelques jours plus tôt, sur la défroque de notre vagabond préféré). Pas d’histoire, ni même de trame dans ce film qui se contente de présenter Charlot, sa conquête féminine, son rival, et des policiers, qui se croisent, se toisent, se poursuivent, se disputent… et finissent tous dans le lac.

On a déjà vu ça plein de fois, y compris chez Chaplin, et toujours bien mieux qu’ici. Seules les mimiques de Chaplin parviennent à tirer quelques sourires. Quand on les voit nettement, car le film n’existe plus que dans une copie calamiteuse, dont l’image permet à peine de voir clairement les visages des comédiens.C’est aussi un film très court : bien moins d’une bobine. Le film était à l’origine présenté avec un court film éducatif, intitulé The Yosemite.

Charlot artiste peintre (The Face on the barroom floor) – de Charles Chaplin – 1914

Posté : 12 janvier, 2011 @ 2:36 dans 1895-1919, CHAPLIN Charles, COURTS MÉTRAGES, FILMS MUETS | Pas de commentaires »

Charlot artiste peintre

• Titres alternatifs (VO) : The Ham Artist, The Ham Actor

• Titre alternatif (VF) : Charlot fou, Charlot peintre, Charlot cabotin, Histoire comique

Voilà un court métrage très original : Chaplin signe avec ce petit film d’une bobine l’une des premières parodies d’une œuvre littéraire, en l’occurrence la ballade « The Face upon the Floor », de Hugh Antoine d’Arcy. Un alcoolique raconte à ses camarades de beuverie pourquoi il a sombré dans l’alcool. Il était jadis un grand peintre, spécialisé dans les portraits. Mais un jour, la femme de sa vie est tombée amoureuse de l’un de ses portraits, et est partie avec le modèle. Depuis, il a cessé de peindre et oublie son chagrin dans l’alcool.

Chaplin met en image cette fable avec son personnage de Charlot, qui raconte son passé à grands coups de flash-backs. Le résultat est inégal, mais assez amusant. Le film n’est toutefois pas très drôle, si ce n’est peut-être à la fin, alors que Charlot pète les plombs et se met à dessiner le visage de la femme de ses pensées sur le sol (d’où le titre) : un portrait qui ressemble à un mauvais dessin d’enfant, que notre ivrogne favori se met à dessiner à la chaîne, dans une sorte d’extase incontrôlable. Curieux…

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